En janvier 2004, un journal irakien Al-Mada dénonce le scandale en publiant une liste de 270 noms de personnes et de sociétés ayant reçus des dessous de table dans le cadre du programme. Cette liste inclut les noms de responsables de l'ONU, accusés d'avoir favorisé certaines entreprises, et ceux d'hommes politiques et d'entreprises accusés d'avoir profité de détournements de fonds. Selon ce journal, l'ancien dictateur irakien Saddam Hussein aurait détourné à lui seul près de onze milliards de dollars avec l'argent de la contrebande de pétrole. Mais ces chiffres sont en grande partie basés sur des estimations (elles concernent plus des deux-tiers des montants publiés). Selon le quotidien irakien ayant dénoncé l'existence de ce phénomène, les personnes qui ont participé dans le détournement de fonds et de corruption sont de nationalité russe, américaine, française, chinoise etc. . En nous basant sur cette information, nous pouvons affirmer qu'il s'agit d'une corruption internationale et donc par définition d'une criminalité transnationale organisée .
Dès février, une commission dirigée par Paul Volcker , « l'Independant Inquiry Commitee » (IIC), est mise en place par le secrétaire de l'ONU, M. Kofi ANNAN, pour enquêter sur ce scandale qui met en cause de nombreuses personnalités influentes, et ce au sein même de l'organisation . A la fin du mois de mars 2005 le deuxième rapport de l'IIC met en cause deux hauts fonctionnaires onusiens: le chypriote Benon Sevan, ancien directeur du programme « pétrole contre nourriture », et le Russe Alexander Iakovlev, ancien responsable des marchés publics au sein des Nations unies qui encore une fois confirme le choix de traiter cette affaire pour illustrer le cas de la corruption internationale. Après la publication du troisième rapport, M. Iakovlev démissionne avant d'être arrêté pour fraude et blanchiment d'argent, le 9 août 2005. Il est remis en liberté après avoir annoncé son intention de plaider coupable. M. Sevan, quant à lui, continue de nier catégoriquement les faits qui lui sont reprochés. Il est suspendu de ses fonctions, et une demande de levée d'immunité diplomatique est déposée contre lui.
Entre temps, ont également été mises en cause de nombreuses compagnies pétrolières, la BNP-Paribas qui s'occupait du compte bancaire de l'ONU dans le cadre du programme, et d'autres personnalités mondiales notamment des politiques amis du régime de Sadam HUSSEIN . Pour la corruption des politiques français, une procédure d'instruction dirigée par le juge Courroye est actuellement ouverte depuis juillet 2002 (audition en cours de plusieurs personnalités dont le nom est cité dans les rapports de la Commission ) .
Un dernier rapport de l'IIC a été publié le 27 octobre 2005 ; il donne le détail des fonds versés par chaque entreprise à l'Irak, et implique la BNP . Il résulte pour l'instant de l'enquête que la raison majeure de ces détournements a été le manque de vigilance des gouvernements et de l'ONU dans l'application du programme.
Il est donc important de savoir comment un programme d'une telle ampleur a pu faire l'objet du plus important détournement de fonds pour la corruption dans le domaine du pétrole et de l'humanitaire. L'objectif sera de décrire et d'observer par quels montages juridiques et par mécanismes financiers, tout en usant de la corruption, les dignitaires irakiens ont exercé leurs activités criminelles, en toute impunité, et en défiant la surveillance onusienne. En effet, la corruption est un phénomène dangereux car tend de plus en plus à se mondialiser et gangrène les échanges internationaux de toute nature ; en tant que délit lié à la politique et géopolitique, les chances de réduire son emprise sont presque inexistantes, alors que ses conséquences sont énormes. La difficulté dans le fait d'aborder un réseau de corruption est d'une part qu'il est composé d'autres délits aussi graves indispensables à son établissement qui finissent par masquer le véritable objet du délit initial, et d'autre part qu'il se sert de techniques « juridico-financières » avec l'appui implicite des pouvoirs en place (banques, pouvoirs politiques, lenteurs de la procédure judiciaire) qui dissimulent la circulation des flux de capitaux illégaux.
Dans le cadre de notre travail sur la corruption internationale, nous avons choisi de nous baser sur des données dites secondaires. Ce choix s'explique par la difficulté de prouver l'existence d'un pacte préalable en vue d'un certain résultat entre le corrupteur et le corrompu : c'est très difficile à rapporter d'où le nombre limité de poursuites et de condamnations pour corruption. Les accusés peuvent nier les faits ou avancer l'hypothèse que les avantages reçues étaient en titre de gratification ou de remerciement.
Par conséquent, nous utiliserons des articles de la presse d'investigation qui parfois est aussi efficace dans la découverte de la vérité sur des affaires internationales que les investigations judiciaires. Nous utiliserons aussi des ouvrages qui nous paraissent utiles à l'apport d'informations sur le sujet en question.
C'est alors l'affaire récente et d'actualité du programme « Pétrole contre nourriture » qui nous offrira l'opportunité de décortiquer l'établissement d'un réseau de corruption à l'échelle mondiale, impliquant un contexte géopolitique et économique tendu, celui de la guerre en Irak et de la « guerre » pour le pétrole (I) ; après démonstration du système mis en place, une analyse pluridisciplinaire permettra de mettre en relief les externalités et la dangerosité de ce phénomène qui se base sur les faiblesses de sa répression pour se développer en tant que crime organisé (II). Ainsi, si nous traiterons l'affaire dans sa globalité, les répercussions de la corruption étant étendues au monde entier, nous nous concentrerons sur les effets évalués en France.
[...] Nous pouvons faire la conclusion qu'il s'agit d'une corruption internationale qui peut illustrer un cas pervers du développement mondial au sens large. Par ceci nous voulons attirer l'attention vers l'existence de plusieurs dérives possibles dans l'action d'entre aides étatiques. L'analyse de tous les faits observés et des hypothèses choisies nous amène vers le constat que la volonté d'aboutir à un résultat positif (par un programme humanitaire pour aider un Etat émergeant) peut produire des effets négatifs non recherchés ( la création d'un réseau international de corruption). [...]
[...] Finalement, quels avantages pour les protagonistes? Les personnalités gratifiées reçoivent une somme d'argent conséquente à travers un circuit de corruption pseudo-légal ; les entreprises achètent du pétrole au rabais en rachetant les bons d'achat et gardent le marché irakien ; le gouvernement enfin, obtient le soutien d'hommes politiques influents et récupère une partie de la valeur du pétrole donnée, en retours sur commissions. Ces rétro-commissions sont classiques dans le domaine de la corruption internationale[35], et consistent pour le corrompu à reverser une partie de sa commission au corrupteur d'origine, afin de lui démontrer sa sollicitation de futurs pots-de-vin Ce système est donc très lucratif pour les personnalités récompensées ; il aurait rapporté selon les données de journaux d'investigation[36] , plus de $ à J-B MERIMEE, environ $ chacun à M. [...]
[...] Nous pouvons penser que l'aide apportée par les compagnies à la découverte de l'ampleur de ce phénomène, prouve en quelque sorte qu'elles ne jouaient pas tout à fait le rôle actif dans la corruption[74] et qu'elles subissaient les règles du jeu fixées par l'Irak. Examinons à présent le préjudice causé par le développement de la délinquance économique et financière au niveau mondial, et en particulier le cas de la corruption. Le préjudice causé par la corruption : La délinquance économique et financière porte préjudice en premier lieu au système économique et financier tel qu'il fonctionne dans un système libéral, c'est un préjudice au marché[75]. Mais la pénalisation du droit des affaires est souvent dénoncée comme celle de la vie politique. [...]
[...] Ici nous avons observé un cas de corruption internationale dans le contexte d'un pays émergeant. Mais demain le nombre de ces pays augmentera, par conséquent le nombre des personnes sur-adaptées par rapport à la situation mondiale qui change, sera en augmentation aussi. La concurrence sera encore plus prononcée entre les différentes entreprises d'un même secteur d'activités. Les entreprises qui vont utiliser les mêmes méthodes seront en augmentation qui met directement en cause le futur développement de l'économie et de l'ordre social en Europe qui se veut exemplaire avec les valeurs européennes C'est la raison pour laquelle une pénalisation de la vie économique est nécessaire. [...]
[...] Nous pouvons nous poser la question de savoir si la sur-adaptation de ces acteurs sociaux ne pourrait pas être considérée comme marginale, par rapport au reste des acteurs de la société. Cela veut dire, que les sur- adaptés ne sont pas majoritaires, et que leur comportement serait toujours une exception, une marge par rapport au reste des comportements les plus souvent observés dans la vie quotidienne. Le domaine criminel devient insaisissable puisque ceux qui le composent échappent au classement qui servait auparavant à désigner un délinquant. Avec l'invisibilité du crime, le criminel passe de la marginalité à la rationalité[65]. [...]
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