Il est courant d'associer les démocraties contemporaines à la démocratie représentative qui devient une sorte d'idéal particulièrement depuis les années 1990. Cependant, l'étude du lien entre les termes de démocratie et de représentation dévoile des complexités quant à leur association systématique.
La démocratie, dont on situe la naissance durant l'Antiquité athénienne, comporte quelques difficultés de définition mais on la désignera sommairement ici comme un système politique dans lequel la souveraineté procède de l'ensemble des citoyens, c'est-à-dire un régime dans lequel le peuple exerce directement le pouvoir. On entendra donc par démocratie une démocratie directe exempte de toutes les ambiguïtés relevant de la démocratie athénienne.
D'autre part, on entend par représentation le fait que des personnes soient choisies ou déléguées pour en représenter d'autres et prennent légitimement des décisions en leur nom. Le mécanisme électif assure la représentation légitime et constitue l'institution centrale sur laquelle repose ce principe.
Nous allons donc nous demander en quoi le fait de lier la démocratie et la représentation fait apparaitre, pour reprendre les termes de Bernard Manin, une forme de “gouvernement mixte”, une sorte d'hybride qui se distingue de la démocratie directe en plaçant certaines limites à la souveraineté populaire.
Afin de répondre à cette question, nous n'allons pas faire ici l'étude du gouvernement représentatif mais plutôt nous servir de son histoire et de ses évolutions pour étudier le lien entre démocratie et représentation. Nous nous attacherons donc à donner une perspective historique à notre développement, dans le but de déceler certaines évolutions.
[...] De manière plus générale, on peut se demander si la crise que semble aujourd'hui connaître la démocratie représentative est réellement due au principe même de la représentation et non aux évolutions qu'ont subi les gouvernements représentatifs, et donc si l'on assiste depuis plusieurs années à la naissance d'une nouvelle forme de gouvernement basé sur la représentation plutôt qu'à la fin de ce type de régime. Bibliographie indicative Bernard Manin. Principes du gouvernement représentatif, Flammarion p. Colloque Démocratie et représentation (1994 : Albi France) et Michèle Riot- Sarcey, Démocratie et représentation, Kimé p. [...]
[...] Il existe également le sondage, qui désigne une enquête d'opinion réalisée sur un échantillon représentatif de la population. Ceci demeure cependant une expression partielle de l'opinion publique, non pas en raison de l'échantillon représentatif, mais parce que les thèmes des sondages sont déterminés par un ensemble particulier d'acteurs. Ainsi, le fait de connaitre l'opinion des représentés n'a pas seulement pour effet d'influencer les décisions des gouvernants, mais également d'assurer une communication que l'on pourrait dire horizontale entre les gouvernés eux-mêmes. [...]
[...] Aux États-Unis, certains ont voulu, lors de la discussion du Bill of Rights, inclure dans le premier amendement, c'est-à- dire celui de la liberté de conscience et de parole, le droit de donner des instructions aux représentants. Cependant, les représentants n'ont de manière générale jamais été contraints même s'il existe aujourd'hui dans certains Etats américains la possibilité de révoquer un gouverneur. En France, il faut noter que l'une des premières décisions de l'Assemblée nationale en 1789 a été d'interdire la pratique du mandat impératif. [...]
[...] La démarche est donc sensiblement différente de celle imaginée par les théoriciens de la représentation. Le lien représentatif change donc de nature avec l'apparition de programmes politiques. Les représentants semblent alors être des citoyens lambda qui ont milité des années pour telle ou telle organisation politique, mais ne sont plus systématiquement les individus que Montesquieu jugeait les plus compétents, c'est-à-dire ceux qui formaient une élite culturelle et économique. Ainsi, cette évolution semble améliorer ce lien représentatif, car les partis de masse feraient indirectement gouverner la volonté du peuple, mais de manière plus importante par le biais du choix d'un programme électoral, et les représentants seraient plus proches à tout point de vue que les gouvernés. [...]
[...] Mais ces mêmes systèmes sont donc remis en cause par la moitié les personnes représentées. Une autre enquête, réalisée par le Centre d'information civique en 2001, montre un progrès de l'abstention chez les moins de 25 ans aux diverses élections, le “décrochage” des institutions (et en premier lieu, l'école), mais également l'ignorance des “valeurs civiques” chez les collégiens et lycéens. Aujourd'hui, l'opinion semble considérer de plus en plus qu'une professionnalisation des fonctions politiques s'est instaurée ; en d'autres termes, il y a un sentiment que la politique est un métier qu'il faut apprendre et que le citoyen de base ne peut pas assumer les fonctions politiques. [...]
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