Liberté, égalité, fraternité, telle est la devise française, énoncée en premier par Robespierre et vulgarisée par Monoro. Ce triptyque fut abandonné sous la Restauration et la Monarchie de Juillet au profit de la formule « Liberté et ordre public ». C'est finalement en 1848 que la Seconde République lui donna ses lettres de noblesse. Désormais son sort est lié à celui de la République. Elle fut d'ailleurs remplacée par « Travail, Famille, Patrie » sous le régime de Pétain.
La liberté est l'état d'une personne qui n'est aucunement assujettie, qui n'appartient à aucun maître. Raynal, dans le tome X de l'Histoire philosophique de l'abbé Raynal, définit la liberté comme « la propriété de soi » et distingue « trois sortes de libertés : la liberté naturelle, la liberté civile, la liberté politique ; c'est-à-dire la liberté de l'homme, celle du citoyen et celle d'un peuple ». L'Egalité est également une valeur ancienne qui peut être définie comme la qualité de ce qui est égal telle que l'égalité de deux lignes, de deux angles, d'âge ou encore de mérite. D'un point de vu politique, c'est essentiellement l'égalité devant la loi, c'est-à-dire la condition où tous les citoyens sont sujets de la loi, sans exception ni privilège, qui est évoquée. Ces deux valeurs sont issues de la pensée humaniste. Enfin, la dernière notion de ce triptyque ne fut incorporée dans la devise française qu'en 1848 sous l'influence de la religion chrétienne, la fraternité, fait référence aux liens entre les citoyens comme ceux qui existent entre des frères et sœurs, comme la liaison étroite de ceux qui, sans être frères, se traitent comme frères ou enfin, lato sensu, comme l'amour universel qui unit tous les membres de la famille humaine telle que Bossuet la conçoit en énonçant que « Dieu a établi la fraternité des hommes en les faisant tous naître d'un seul qui, pour cela, est leur père commun et porte en lui-même l'image de la paternité de Dieu ». « Là elle [la nature humaine] découvre les règles de la justice, de la bienséance, de la société ou, pour mieux parler, de la fraternité humaine ». Ces trois notions réunies forment la devise de la République française et donc les valeurs fondamentales à la base de la société. Ces trois notions apparaissent comme inséparables si l'on se réfère à Paul Bert selon lequel « si vous enlevez l'un des trois mots, cela ne marche plus : sans la liberté, l'égalité peut être le plus abominable de tous les esclavages car tout le monde est égal sous un tyran. Sans la liberté, la liberté conduit à l'égoïsme ».
Une devise est une parole symbolisant une pensée. Cette pensée est-elle toujours d'actualité ? Comment sont perçues les notions de liberté, d'égalité et de fraternité dans la société contemporaine ? Il est fréquent de dénoncer, à tort ou à raison, la perte des valeurs dans le monde contemporain. Toutefois, ce triptyque fondateur de la France ne démontre t-il pas, par sa permanence, que ces valeurs demeurent ? Finalement, est-ce que malgré la remise en cause du progrès, l'inquiétude de l'homme et l'altération de la confiance des hommes dans leurs propres valeurs c'est-à-dire l'ébranlement de leur identité comme l'illustre notamment l'ouvrage de F. Kafka, Le procès ou le château, certaines valeurs demeurent ? La crise de l'identité qui, selon certains auteurs, serait à rechercher d'une part dans la désymbolisation constante des institutions fondamentales de la Républiques, notamment celle de l'Ecole à laquelle peut être ajoutée la devise française et d'autre part dans la crise de la représentation, remet-elle en cause ce triptyque fondateur ? Cette désymbolisation peut, effectivement, être à l'origine de l'affaiblissement du lien civil en France. Mais, d'un autre côté, n'assiste-t-on pas, aujourd'hui, à un retour de la morale sous le terme d'éthique ?
Il apparaît finalement que les notions de liberté, d'égalité et de fraternité n'ont toujours été que des valeurs relatives (I) même si les hommes ont toujours cherché à les promouvoir (II).
[...] De plus, selon G. Lipovetsky, plus les individus se libèrent des codes et des coutumes en quête d'une vérité personnelle, plus leurs relations deviennent fratricides et asociales. De tels comportements mettent fin selon l'auteur à toute conscience de classe. Pour lui, on fraternise désormais sur la base du quartier, de la région ou des sentiments communs. La fraternité n'est plus que l'union d'un groupe sélectif qui rejette tous ceux qui ne font pas partie de lui La fragmentation et les divisions internes sont le produit de la fraternité moderne Toutefois, il semble que tant les Etats que les personnes, morales ou physiques, tentent d'aider les personnes en difficulté. [...]
[...] En outre, le concept de liberté ne relève t-il pas du mythe dans une société de consommation dans laquelle la publicité peut aliéner les hommes ? Les désirs de chacun sont finalement plus ou moins assujettis aux impératifs de la consommation. Enfin, le développement de l'éthique et en particulier de la bioéthique en matière médicale contribue aussi à limiter la liberté individuelle au profit des libertés collectives. Concrètement, les scientifiques doivent s'autolimiter afin de ne pas remettre en cause l'espèce humaine elle-même. [...]
[...] Cette conception s'oppose donc radicalement aux autres courants chrétiens comme en témoigne notamment l'ouvrage de Luther, Le serf arbitre. La notion même de liberté est donc différemment entendue selon les courants de pensée. Par ailleurs, sa relativité se note également dans l'absence d'effectivité réelle de cette valeur. Dans l'Antiquité, seuls les citoyens sont libres et égaux. La démocratie grecque était par exemple une démocratie esclavagiste. En outre, si le fondement de la société réside dans le contrat social définit par Rousseau, l'homme est-il réellement libre ? [...]
[...] Ces valeurs, porteuses d'un discours, d'une idéologie, ne peuvent qu'être relatives aujourd'hui comme hier A La relativité historique des notions de liberté, d'égalité et de fraternité La liberté est une notion ancienne, elle fut, en effet, évoquée par le Pic de la Mirandole dès le XVe siècle et par Montesquieu au XVIe. Cette liberté peut être différemment perçue. Pour Descartes, par exemple, elle réside dans la pensée des idées, seul domaine où l'homme est vraiment libre selon lui. Ce lien entre la raison et la liberté sera d'ailleurs confirmé par les philosophes des Lumières comme l'exprime Kant dans Qu'est ce que les lumières ? [...]
[...] Néanmoins, des inégalités demeurent. Il appartient aujourd'hui à l'Etat de les combler. La notion d'Etat providence qui a émergé au cours du XIXe siècle, fait référence à un Etat qui prend en charge de nouvelles fonctions touchant au bien-être social. Cette volonté se traduit concrètement par l'assurance d'une certaine sécurité économique aux citoyens par le biais du système de Sécurité sociale, par la redistribution des richesses entre les citoyens et par la volonté de l'Etat de fournir à la population des services et équipements collectifs à des coûts inférieurs à ceux du marché. [...]
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