Jeanne d'Arc pour le Front National

Thèmes abordés

Jeanne d'Arc, front national, nationalisme, symbole, mythe

Résumé du document

Ma thèse porte sur l'idéologie du Front National, et plus spécifiquement sur la façon dont cette idéologie se structure comme un mythe. Les mythes politiques sont en général peu innovants, se contentant d'être des réactualisations des mythes religieux.

L'état de mes travaux ne me permet pas actuellement de vous présenter « Le » mythe du FN comme une totalité logique, c'est pourquoi je vais illustrer ma méthode avec la récupération opérée par le parti frontiste sur Jeanne d'Arc. Je pourrais donner comme titre à cette intervention : le défilé « Jeanne d'Arc » du FN : entre commémoration et réitération.

Extraits

[...] Conclusion Jeanne d'Arc est en quelque sorte une allégorie de la totalité, les différentes virtualités qui lui sont prêtées par Jean-Marie le Pen en font une véritable idole dont les valeurs vont bien au-delà de la simple religion catholique ou de la défense de la monarchie. Pour cette intervention j'ai d'une certaine façon extrait l'allégorie Jeanne d'Arc du mythe frontiste, ce qui est arbitraire car dans un mythe chaque référence fait appel à toutes les autres pour exprimer pleinement sa potentialité. Il faut en outre préciser que la Jeanne d'Arc frontiste n'a rien d'extrêmement originale ; Jean-Marie le Pen s'inspire à mon avis largement de l'historien Michelet pour compter l'épopée de Jeanne. [...]

[...] Je dirais simplement ici que la manière dont il conte le parcours de Jeanne d'Arc, la modestie de ses origines et le mérite de son parcours, n'est pas sans rappeler le récit qu'il fait de sa propre vie dans lequel il exagère volontiers les aspects misérabilistes. Je vais tenter à présent dans une deuxième partie de détailler les propriétés synthétiques qui sont prêtées à Jeanne d'Arc par Jean-Marie le Pen. II) Jeanne d'Arc, être synthétique Celles-ci s'articulent en deux points : Jeanne d'Arc fille de la terre et du ciel, Jeanne d'Arc une femme aux qualités d'homme. Si l'on suit la méthode de Gilbert Durand, on s'aperçoit la pucelle est bien plus qu'une simple héroïne pour Jean-Marie le Pen. [...]

[...] Jeanne d'Arc établit la liaison entre les modes séculier et régulier, voire tout simplement entre le sacré et le profane. C'est pourquoi la Jeanne frontiste est aussi l'allégorie de ce que Mircea Eliade nomme la rupture de niveau ontologique. Elle illustre en quelque sorte la possibilité pour tout un chacun de sortir du temps afin d'appréhender le sacré. C'est en cela que j'évoque la réitération dans le titre de mon intervention. La Jeanne d'Arc frontiste emprunte donc tout aussi bien aux structures héroïques et mystiques de l'image, et ce sont ses virtualités androgynes qui vont parachever l'édification synthétique de l'idole. [...]

[...] Le ciel souligne quant à lui l'aspect héroïque, il fait référence non plus aux origines, mais à l'itinéraire de Jeanne d'Arc ; Gilbert Durand : Le sentiment de la souveraineté accompagne naturellement les actes et les postures ascensionnelles p.152. Le sceptre est l'incarnation sociologique au processus d'élévation. Mais ce sceptre est également verge. Car il semble bien qu'il faille adjoindre à l'élévation monarchique la notion œdipienne de Dieu Père, de Dieu grand-mâle p.152-153. On retrouve le 1er mai 2007 une autre citation qui signifie sensiblement la même chose : elle fut toute à la fois Sainte et martyre au plan spirituel, un grand chef de guerre et un grand chef politique au temporel. [...]

[...] Vous l'aurez compris, Jean-Marie le Pen évoque dans cette phrase tout autant Jeanne d'Arc que son propre parti, voire sa propre personne. La gloire passée de Jeanne sert en fait de justification à l'existence du FN, et au parcours de son leader. La Jeanne d'Arc frontiste est en cela davantage une allégorie qu'un symbole. En effet le symbole se caractérise, comme j'ai tenté de l'expliquer dans l'introduction, par sa malléabilité sémantique, il peut presque signifier une chose et son contraire. [...]