Il semble difficile de ne pas conclure que l'opinion japonaise est très largement favorable au maintien de la peine capitale, et que ce sujet ne prête pas à débat au Japon. Ceci étant, ce n'est pas uniquement parce que l'opinion est favorable que le débat n'existe pas : c'est également du fait de la faible saillance (Johnson 2005) de la cette question au Japon que l'opinion reste favorable. Johnson explique que cette faible saillance n'a rien de naturel ou d'inévitable, mais qu'elle résulte dans une large mesure d'une politique délibérée de l'État de maintenir le public très peu informé à propos de « comment, quand, et pourquoi il tue ». A l'instar du système de prisons, un voile de secret et de silence – encore plus épais dans ce cas – recouvre la fonction d'exécution des condamnés à mort de l'État. Ainsi, le Japonais moyen ne connaît rien à propos de la peine capitale et ne s'intéresse pas vraiment au sujet. Cette apathie sert à l'État afin d'éviter un débat et éventuellement une opposition sur cette question. Il faut donc garder à l'esprit que par conséquent l'opinion publique du Japon sur la question de la peine capitale est certes très marquée, mais peu consistante. Peut-être ne résisterait-elle pas à un véritable débat porté sur la place publique.
[...] Ceux qui l'on subie parlent d'une insoutenable incertitude très dure à supporter. Voici par exemple le témoignage de Mendae Sukae, acquitté et relâché en 1983 après avoir passé trente-quatre ans dans le couloir de la mort : Le moment le plus critique était entre 8h et 8h30, car c'était généralement à cette heure-ci que l'on apprenait aux prisonniers qu'ils allaient être exécutés. Vous commencez alors à ressentir la plus terrible des angoisses, parce que vous ne savez pas s'ils vont s'arrêter devant votre cellule ou non. [...]
[...] C'est bien avant tout la société, dont l'Etat n'est après tout que l'émanation, qui décide de s'amputer totalement de ses membres jugés les plus dangereux et considérés comme absolument hors d'atteinte de tout contrôle social informel. Il ne faut cependant pas occulter le fait que la peine capitale n'a pas toujours été entourée d'autant de secret. Jusque dans les années 1960 les condamnés à mort étaient prévenus un jour à l'avance de leur exécution et avaient la possibilité d'organiser une rencontre avec leur famille. [...]
[...] L'individu pour la société n'existe plus. Officiellement, tout ce secret qui entoure l'exécution a pour raison d'existence l'intérêt des condamnés à mort. Comme l'a dit un procureur, nous devons prendre en compte ce que ressent un criminel condamné à mort. Il s'agit d'une telle atteinte à son honneur. Croyez-vous que, parce qu'il a dû renoncer à la vie, il doit également renoncer à son honneur et à son intimité ? Un autre procureur a déclaré qu' il serait plus cruel d'informer le condamné de la date de son exécution à l'avance, car alors cela lui infligerait une grande souffrance. [...]
[...] La seule certitude est que ce n'est pas démocratique. Le secret et donc le déficit démocratique qui entourent la peine de mort et le système de prisons au Japon, et les atteintes aux droits de l'homme monnaie courante vis-à-vis des détenus japonais, sont l'illustration du peu d'empathie, de respect que nourrit la société japonaise envers ceux de ses membres qu'elle estime irrécupérable car hors d'atteinte du contrôle social informel. La mort par pendaison. Le Japon n'a expérimenté aucun changement significatif dans la méthode d'exécution depuis 1873 (année ou un nouveau type de gibet fut introduit). [...]
[...] Le condamné n'a pas la plus petite chance de pouvoir contacter sa famille ou un avocat. Il est également impossible à des gens qui souhaiteraient protester contre une exécution jugée imminente de le faire, par manque d'information. Une fois le condamné exécuté, l'Etat publie un communiqué du type : Aujourd'hui à Tokyo deux condamnés à mort ont été exécutés C'est tout. Jusqu'en 2007 les noms des condamnés exécutés n'étaient même pas révélés[1]. Jusqu'en 1999, le gouvernement ne faisait même aucune annonce après l'exécution. [...]
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