La problématisation des guerres contemporaines et les crises politiques sur la scène internationale montrent aujourd'hui l'image d'un monde devenu « un théâtre cruel » traversé par une panoplie de forces contradictoires. On assiste partout dans le monde à des bouleversements de nature diverse affectant non seulement les rapports interétatiques, mais aussi se prolongeant jusqu'à l'intérieur des Etats.
Longtemps lieu et enjeu des grandes puissances pendant l'ère coloniale, l'Afrique des « Soleils des indépendances » n'échappera pas à ces bouleversements au point d'en devenir avec l'Asie, les continents les plus affectés par la guerre.
Les crises africaines ne cessent d'étonner le monde et de dérouter de par leur complexité et leur fréquence, ceux qui tentent d'en comprendre les mécanismes parce qu'elles expriment une forte spécificité des cultures africaines. Tout naturellement, c'est dans leurs racines sociales, ethniques, politiques que les analystes ont cherché les clefs de ces conflits comme leurs solutions.
[...] La figure de l'autodestruction rend raison de l'absence de liaison et de continuité entre le temps long de l'histoire et le temps court du présent des acteurs politiques. La guerre devient alors la seule alternative politique pour dénoncer la partialité de l'Etat, le dysfonctionnement du gouvernement ou l'inéquitable répartition des efforts de développement au profit de certains groupes ethniques ou de certaines régions privilégiées. Dans cette logique où l'altérité devient adversité, la guerre est une alternative à une économie de paix qui ne nourrit plus; la kalachnikov est le meilleur moyen de sa production Ainsi, qu'il s'agisse ou non des séquelles des guerres coloniales, qu'ils s'articulent ou non au contrôle du pouvoir étatique, qu'ils aient des relents identitaires, claniques ou ethniques, les conflits que connaissent les Etats africains mettent en question, d'abord les territoires, les frontières, la constitution des pays et des Etats: s'ils se propagent vers les Etats voisins, ils apparaissent au préalable dans le cadre d'un Etat, comme c'est le cas de la crise ivoirienne du 19 septembre 2002. [...]
[...] On est parfois amené à se demander si l'Afrique n'est pas une terre maudite du fait de la forte capacité du continent à développer des conflits. Des conflits, qui en général, tournent autour du pouvoir, les revendications de territoires et de souveraineté des pays, des régions et qui peuvent avoir un lien avec le tribalisme ou l'ethnicité. Ces conflits qui sont circonscrits dans bon nombre de contextes, notamment des clans, des tribus, des régions, des formations politiques, entre plusieurs classes sociales, entre Etats ou à l'intérieur d'un même Etat, traduisent outre l'antagonisme sans médiation ni représentation possible, un processus d'implosion dramatique de ce qui pourrait être dénommé une radicalisation des logiques conflictuelles Ces guerres, produits de conjonctures régionales, nationales, relevant d'acteurs, de modalités et d'enjeux différents, s'articulent les unes aux autres et brouillent les frontières spatiales, sociales et politiques qui les distinguaient initialement en suscitant des représentations nouvelles. [...]
[...] La Côte d'Ivoire est alors coupée en deux. Dès le début de la crise et tout au long de son évolution, de nombreux articles et commentaires lui ont été consacrés, dans différents quotidiens français tels que Le Monde et Libération, qui constituent notre corpus d'analyse. De cette façon, le discours de ces médias sur cette crise ivoirienne donne des cadres d'intelligibilité et d'interprétation à l'information, et, en organisant ainsi sa représentation, instituent la guerre. La représentation qu'en donnent les médias constitue une médiation symbolique de la guerre. [...]
[...] Le rôle des médias est, déjà, en ce sens, de formuler de nouvelles logiques de compréhension et d'interprétation des événements constitutifs de la guerre. Ainsi, s'instaure, dans les formes et les représentations de la guerre, ce qu'on peut appeler la médiation de la guerre, c'est-à-dire l'articulation entre les trois dimensions de l'événement: l'événement réel, l'événement symbolique, l'événement imaginaire. Lire les médias, les entendre ou les voir, c'est confronter à son expérience propre les formes et les logiques de la communication médiatée. [...]
[...] Une représentation particulière de la violence de la guerre et l'importance particulière accordée à ses cortèges de souffrances, de blessures et de mort. La représentation de la guerre met en scène une dissolution du lien social ou, à tout le moins une menace de dissolution et dans laquelle, la logique de la confrontation, apparaît comme une forme dénégative de spécularité. Les relations entre la guerre et la représentation de l'irreprésentable qui la caractérise dans les fictions posent de façon particulière le problème de sa distanciation. La distanciation de la guerre représente ce qu'on pourrait appeler son intelligibilité pleine. [...]
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