L'introduction d'éléments de budget participatif dans les municipes latino-américains est un phénomène relativement récent, mais qui fait pourtant beaucoup parler de lui. En moins d'une quinzaine d'années, le budget participatif est devenu un mécanisme innovant central, objet de nombreux débats. Né au Brésil à la fin des années 1980, propulsé sur la scène internationale grâce à la popularité de l'expérience de Porto Alegre, adapté et adopté par un grand nombre de municipes latino-américains, le budget participatif est aujourd'hui un thème central du débat sur la place du local dans la démocratie. On peut pour le définir reprendre les termes de Ubiratan de Souza, ancien élu du PT brésilien, selon qui le budget participatif est un « processus de démocratie directe, volontaire et universel, par lequel la population peut discuter et définir le budget et les politiques publiques. Le budget participatif combine démocratie directe et représentative ».
Une définition un peu plus complète est donnée par le professeur Boaventura de Sousa Santos, pour qui la notion de budget participatif désigne « une structure et un processus de participation communautaire basé sur trois principes et un ensemble d'institutions qui fonctionnent comme des mécanismes ou des canaux pour garantir la participation au processus de décision du gouvernement municipal.» Ces trois principes sont (a) la participation ouverte à tous les citoyens (b) la présence d'éléments à la fois de démocratie directe et représentative, et (c) l'allocation de ressources à investir.
[...] Ce conseil se réunit plusieurs fois par an pour avaliser les projets de budgets participatifs et les propositions d'action publique. Au sein de ces organes, la gestion et la répartition du budget se font en fonction de différentes logiques : Tout d'abord, ce que Marion Gret et Yves Sintomer nomment la logique majoritaire-démocratique correspond au nombre de présents lors des assemblées (qui déterminent le nombre de délégués que possédera le secteur, d'où l'intérêt de regrouper le plus de personnes possible lors de ces assemblées) et de l'orientation qu'ils souhaitent donner aux politiques publiques dans leur secteur. [...]
[...] Par exemple, à Villa Gonzalés en République Dominicaine, on dénote l'appui de la Fondation Interaméricaine, de la Coopération Internationale pour le Développement et la Solidarité, ou encore de la Fondation Solidarité. Cette dernière ONG a agi en tant qu'entité technique promouvant l'ambiance de dialogue et de concertation, dans le but de rendre la gestion municipale plus moderne, efficiente, efficace et équitative. La mise en place de budget participatif est donc également sous-tendue par les théories de New Management Public. Au-delà d'une participation à la gestion budgétaire de leur municipalité, à travers l'introduction de budgets participatifs, il s'agit également d'un apprentissage du politique pour les habitants. [...]
[...] De plus, les 10% des dépenses soumises au budget participatif ne sont pas directement gérées par les citoyens: les décisions populaires ne sont bien souvent que des recommandations de caractère indicatif, la décision finale appartenant aux autorités du gouvernement local mentionnées plus haut. Un troisième élément atteste du rôle central du gouvernement local: l'institutionnalisation des budgets participatifs. En effet, les budgets participatifs sont l'objet d'une institutionnalisation croissante (mis à part dans certains cas, notamment au Brésil), ce qui met en péril l'autonomie de la société civile face à l'Etat. On peut alors craindre une bureaucratisation et une récupération politique du budget participatif, qui n'est pas à l'abri luttes politiques. [...]
[...] Nous l'avons déjà dit, par leur participation, les habitants permettent une redéfinition de l'action publique en orientant les jugements de valeurs et les priorités de la communauté. Il y a intensification des relations entre les acteurs politiques et la société civile dans la construction des politiques publiques dans le sens d'un développement local, car l'avis apporté par les habitants est immergé dans les réalités socio-économiques et politiques des municipes. Si l'on envisage le budget participatif comme dispositif original relevant d'une nouvelle démocratie c'est d'abord car il permet à une plus grande diversité d'acteurs de prendre place au sein de la planification municipale. [...]
[...] Au-delà de cette permanence du rôle du gouvernement central, d'autres éléments peuvent amener des interrogations sur la réalité d'un renouvellement des pratiques politiques dont l'introduction de budgets participatifs serait la cause. Ils conduisent notamment à s'interroger sur l'impact du budget participatif sur la pluralisation de l'action publique. En premier lieu se pose la question de la participation effective des citoyens à la décision. En effet, il apparaît qu'en dépit de la volonté d'augmenter réellement la participation des citoyens, seuls certains d'entre eux s'impliquent activement dans le processus du budget participatif, qui rencontre rapidement des limites en termes de participation généralisée. [...]
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