« La reconnaissance par la théorie du droit d'un pouvoir discrétionnaire des juges pose à la théorie politique un problème redoutable, celui de la légitimité de ce pouvoir dans un système démocratique ». Ici, Michel Troper vient poser les fondements du débat juridique quant à l'interprétation, ce rôle étant indissociable du nouveau rôle des cours constitutionnelles.
Les termes de ce débat, dont les conséquences sur le plan politique sont exposées par Michel Troper, furent déjà évoquées par Hans Kelsen dans sa Théorie pure du droit, en ce sens qu'il s'interroge sur la détermination de l'acte d'interprétation : acte de connaissance ou de volonté ?
Hans Kelsen reconnaît l'éminence de l'interprétation comme processus de création de droit, en effet il estime que l'interprétation est « le processus intellectuel qui accompagne nécessairement le processus d'application du droit dans sa progression d'un degré supérieur à un degré inférieur ».
[...] La nécessité de cette interprétation authentique s'explique par les caractéristiques mêmes de l'acte de droit qui est indéterminé. Cette indétermination de la norme pouvant résulter d'une indétermination, relative, intentionnelle ou involontaire. Cependant cette reconnaissance de la primordialité de l'interprétation dans le processus de création du droit arrive assez tard dans la théorie de Kelsen, c'est son voyage aux Etats-Unis où il fut influencé par les réalistes américains qui est en le fondement. Auparavant il n'avait consacré que peu de développement théorique sur l'interprétation, lui consacrant une place marginale dans sa réflexion. [...]
[...] Kelsen réfute donc le postulat selon lequel l'interprétation doit permettre par un procédé de connaissance de déterminer le sens véritable de la norme interprétée, et parallèlement il va venir dire que les éléments d'extériorité au droit positif s'ils ont une influence ne peuvent être l'objet de l'étude du droit. La connaissance des éléments exogènes au droit positif : un non objet en droit : Kelsen reconnaît qu'en science du droit il existe une démarche interprétative fondée sur la connaissance, il s'agit de l'interprétation qu'il désigne comme étant scientifique. [...]
[...] L'extrait de Kelsen, l'interprétation : acte de connaissance ou acte de volonté ? met en exergue une évolution modérément réaliste de la théorie juridique d'Hans Kelsen en même temps qu'elle introduit des contradictions avec les postulats initiaux et constitue par voie de conséquence un affaiblissement de la globalité de la théorie normativiste, plus qu'un renforcement (II). La théorie de l'interprétation, une évolution modérément réaliste de la théorie de Kelsen : La nouvelle conception de l'interprétation de Kelsen l'a conduit à adopter une modération réaliste de sa théorie, en effet, dès lors l'interprétation n'est plus complètement déterminée, elle est le fruit d'acteurs, les autorités chargées d'appliquer le droit. [...]
[...] En effet, l'émergence du contrôle de la constitutionnalité et le primat de 1 la légalité juridique sur la légitimité politique, renforce la nécessité de coroller la question de l'interprétation à celle de la liberté de l'interprète à mesure que les juges constitutionnels prennent une place de plus en plus centrale dans les systèmes juridiques. La théorie de l'interprétation de Kelsen comme processus d'application du droit résulte t'elle d'un acte de volonté, laissant à l'interprète une entière liberté ou n'est elle que le résultat d'un acte de connaissance ? [...]
[...] Ainsi Kelsen, le résume, dans le texte étudié, de l'interprétation par un organe d'application du droit, toute autre interprétation se distingue par le fait qu'elle n'est pas authentique, c'est-à-dire qu'elle crée pas de droit Au sein même de la démarche d'interprétation authentique, au cours du processus d'application du droit, Kelsen admet la présence d'une part de connaissance, par delà la détermination. Mais cette activité n'est pas connaissance du droit positif, mais connaissance d'autres normes qui peuvent y déboucher dans la procédure de création du droit : normes de la morale, de la justice, jugements de valeur sociaux que l'on a accoutumé de désigner par les slogans : bien du peuple, intérêts de l'Etat Cependant en l'occurrence, Kelsen, qui pose l'interprétation comme un acte de volonté, ramène la norme à un acte de volonté, ce qui exclut de fait de se situer dans une science du droit et lui substitue une psychologie du droit, dont la détermination ne peut exclure la prise en compte des éléments d'extériorité Reprenant se distinction entre l'interprétation authentique et scientifique, il va poser le processus d'interprétation comme suit : Dans l'application du droit par un organe juridique, l'interprétation du droit à appliquer, par une opération de connaissance, s'unit à un acte de volonté par lequel l'organe applicateur de droit fait un choix entre les possibilités révélées par l'interprétation à base de connaissance Si le cadre des possibilités laissées ouvertes par le droit est révélé par l'interprétation scientifique, la détermination de la norme va donc être le fait d'un interprète qui va faire un choix, et par conséquent être libre, et dont l'interprétation va conférer sa validité à la norme. [...]
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