L’intérêt général n’est-il qu’un mythe ?

Résumé du document

« Toute classe qui aspire à la domination doit conquérir d'abord le pouvoir politique pour représenter à son tour son intérêt propre comme étant l'intérêt général » (Karl Marx, L'idéologie allemande). C'est sous cet angle de la domination que Karl Marx envisage le concept d'intérêt général. L'intérêt général ne serait qu'un mythe au service d'une classe dominante, cherchant à légitimer sa position politique. Le concept d'intérêt général fait partie de ces notions qui sont « à la fois indéfinissables et irremplaçables » pour reprendre l'expression du doyen Vedel (préface de L'idéologie de l'intérêt général de F. Rangeon). Indéfinissable parce que l'intérêt général est avant tout une abstraction qui trouve difficilement une application concrète. Mais irremplaçable parce que c'est la satisfaction de l'intérêt général qui guide ou doit guider les sociétés démocratiques.. L'intérêt général est donc une notion extrêmement ambivalente, qui séduit mais dont l'existence même est remise en question par certains auteurs, pour qui elle n'est qu'un mythe. Dans Phédon, Platon oppose le logos, qui signifie le discours, et le muthos, récit inventé par le poète.

Extraits

[...] L'intérêt général est donc une notion extrêmement ambivalente, qui séduit mais dont l'existence même est remise en question par certains auteurs, pour qui elle n'est qu'un mythe. Dans Phédon, Platon oppose le logos, qui signifie le discours, et le muthos, récit inventé par le poète. Le mythe relève donc du récit imaginaire, et est donc au moins en partie faux. Derrière cela, il y a souvent la volonté de faire croire à la véracité du récit bien qu'il soit faux. [...]

[...] Ainsi, l'intérêt général défendu dans les démocraties libérales n'est qu'un mythe au service d'une classe sociale. Il dénonce également la conception hégélienne de l'intérêt général, ainsi que celle défendue dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui consiste à séparer l'intérêt général et les intérêts particuliers. Marx montre, notamment dans la Critique du droit politique hégélien, que cette vision est purement abstraite. L'intérêt général, pour Hegel, n'existe qu'en dehors des intérêts particuliers, c'est pourquoi, selon Marx, ces deux intérêts sont irréconciliables. [...]

[...] Presses de la FNSP : 1991 L'intérêt général In Etudes et documents Conseil d'Etat n°50 p.239 RANGEON, François. L'idéologie de l'intérêt général. Economica : 1986 ROUSSEAU, Jean-Jacques. Du Contrat Social WEBER, Max. Le savant et le politique : une nouvelle traduction : la profession et la vocation de savant, la profession et la vocation de politique. [...]

[...] Ainsi, en s'exprimant au nom de l'intérêt général, les gouvernants donnent une légitimité à leur action, en la faisant accepter par l'ensemble du corps social. Max Weber, dans Le savant et le politique, affirmait que l'autorité est fondée sur la croyance en la validité d'un statut légal et d'une compétence positive On peut ajouter que le respect de l'autorité des gouvernants dans une démocratie tient aussi à ce que ceux-ci affirment agir au nom de l'intérêt général. En effet, l'intérêt général est devenu une arme de combat politique (F. Rangeon). [...]

[...] (Rêveries politiques). La recherche de l'intérêt général est le fondement de la démocratie, car dans un tel régime politique, on ne peut imaginer que l'intérêt de la communauté ne soit pas la priorité. D'ailleurs, la plupart des textes fondateurs de la démocratie française par exemple expriment cette idée selon laquelle un gouvernement qui n'agirait pas dans le sens de l'intérêt général ne serait plus légitime. L'article 12 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen prévoit ainsi que la garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confiée De même, cette même Déclaration dans son article 17 précise qu'il ne peut être porté atteinte à la propriété privée qu'en vertu de la nécessité publique, légalement constatée. [...]