L'Inde se présente volontiers comme « la plus grande démocratie du monde ». Elle est en effet l'un des rares pays du Sud à avoir organisé des élections libres au suffrage universel à intervalles réguliers depuis qu'elle a accédé à l'indépendance en 1947. Les Indiens se sont peu à peu familiarisés avec la compétition électorale et le taux de participation s'est régulièrement élevé. D‘autre part, ces élections sont de plus en plus disputées à mesure que le système des partis s'est étoffé et que le Congrès s'est vu de plus en plus contesté sur sa gauche comme sur sa droite. C'est ainsi que l'Inde est entrée dans le cercle restreint des démocraties à alternance depuis 1977. L'indépendance de la justice n'a jamais été remise en cause de façon radicale, sauf pendant l'état d'urgence de 1975 à 1977, période pendant laquelle Indira Gandhi a mis les institutions démocratiques entre parenthèses. Enfin, la Constitution garantit les droits et les libertés fondamentales des citoyens de l'Union indienne.
L'Inde vérifie donc depuis plus d'un demi-siècle les critères essentiels de la démocratie. Pourtant, elle connaît un taux d'analphabétisation élevé, un niveau de vie faible et elle est l'une des sociétés les plus inégalitaires du monde, puisque le système des castes régule encore les rapports sociaux. Autant d'éléments qui ont suggéré les pronostics les plus sombres, notamment au vue des théories économicistes, telle celle de S.M. Lipset, qui postule qu'il ne peut y avoir de démocratie sans un niveau de développement socio-économique minimal en termes de niveau de vie et d'alphabétisation. Malgré cela l'Inde est marquée par la stabilité de son système politique et une capacité d'évolution au sein du cadre démocratique.
Dès lors, comment la démocratie a pu et continue à s'implanter en Inde en dépit de ces facteurs a priori défavorables?
[...] Les problèmes politiques sont résolus grâce au rôle de coordination qu'offraient les organes directeurs du parti. Sa dominance et sa gestion souple lui ont permis de concilier les composantes sociales et géographiques. Il joue donc un rôle de fédérateur politique en tant qu'instrument de convergence des forces politiques et sociales et est ainsi caractérisé par sa capacité à rassembler. Le Congrès, qui se veut représentatif de toute la nation se structure donc très tôt comme un parti de masse, capable de développer dans les campagnes une conscience politique,et même comme un parlement en miniature où les groupes apprennent à passer des compromis. [...]
[...] L'intention des constituants était certainement de lui conférer une compétence fédérale puisqu'elle est élue par les assemblées législatives renouvelées par tiers tous les 2 ans des États. Mais elle ressemble plus à une assemblée de notables qu'à une seconde chambre fédérale. Un Président sans grands pouvoirs incarne la République. Il est élu pour 5 ans par un collège électoral. Tous ses actes sont contresignés par le Premier ministre, qu‘il désigne. Ce dernier gouverne à la tête de son Cabinet, dont il nomme les ministres. [...]
[...] Aucun empire de l'Inde pré musulmane n'était régi par une autorité centrale très affirmée. Les royaumes de l'Inde médiévale ont été qualifiés d' États segmentaires Cet agencement rend le pouvoir du souverain vulnérable, celui-ci étant sans cesse menacé par la dissidence et sédition, la fitna. Le faible degré de centralisation et la fitna ont largement entravé la consolidation des empires comme des royaumes, obligeant les souverains à élaborer des compromis. Enfin, si l'Inde emprunte la voie de la démocratie en 1947, c'est que ce système politique convient aux élites du pays, dans la mesure où il leur permet de régler leurs différends, selon une logique rappelant le modèle de Rostow. [...]
[...] 122) Le fédéralisme indien Mais l'Inde a aussi su adapter son système institutionnel à ses spécificités. L'Inde, contrairement à la Grande-Bretagne, offre une très grande diversité aussi bien au niveau social que linguistique et religieux. Elle appelle de ce fait une organisation fédérale que la constitution de 1950 comme le Government of India Act de 1935 avait reconnue. Les constituants n'ont pas voulu briser le particularisme et affermir l'unité autant que possible, qui paraissait fragile et menacée. Le fédéralisme présente donc un biais centralisateur. [...]
[...] Ils présentèrent la démocratie parlementaire comme une émanation du bouddhisme. Cet imaginaire de l'Inde ancienne a contribué à désamorcer l'opposition des traditionalistes hindous à l'instauration d'un système politique inspiré du modèle de Westminster. 112) Un contexte et une culture favorables à l'enracinement de la démocratie Plusieurs traits de civilisation indienne ont contribué à façonner des cultures politiques favorables à l'implantation de la démocratie, ce qui explique que la greffe démocratique ait pris. La différenciation des sphères du pouvoir temporel et de l'autorité spirituelle, voire la subordination du premier à la seconde dans le discours brahamique, ne permettait sans doute pas que le politique s'érige en absolu, le système de valeurs dominant accordant la priorité à la cohérence sociale et au renoncement. [...]
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