Au forum économique mondial de Davos, le Premier Ministre indien Manmohan Singh s'exclamait que « le XXIème siècle serait indien » confortant ainsi la thèse du diplomate Pavan K Varma. L'essor des services informatiques et le succès du cinéma de « Bollywood » suffiront-ils à l'Inde pour atteindre le prestige dont elle rêve dans un monde qui privilégie avant tout officiellement les valeurs démocratiques et l'éthique humaniste ?
Dès 1600, la Grande-Bretagne crée la Compagnie anglaise des Indes orientales et entame alors sa domination sur l'Empire des Indes qui durera jusqu'à la déclaration d'indépendance de l'Inde et du Pakistan le 15 août 1947. Quelques mois après, une première guerre déchire les deux pays tout récemment libérés du joug colonial et l'insécurité gagne alors la région. A l'intérieur, l'Inde cherche à se moderniser et à se stabiliser en promulguant le 26 janvier 1950 une Constitution qui en fait un État fédéral, démocratique et parlementaire d'inspiration britannique. L'Inde devient la « plus grande démocratie du monde », au moins formellement puisque souveraineté populaire, pluralisme, élections libres et compétition politique sont assurés. Cependant, au-delà d'un système institutionnel, la démocratie est un idéal à atteindre qui nécessite l'égalité, la liberté et le respect des droits fondamentaux, ce qui semble demeurait pour l'Inde un défi à relever.
Dans quelle mesure la démocratie indienne, qui a réussi à devenir une réalité sur les plans institutionnel et politique, témoigne-t-elle de son inachèvement en échouant à s'affranchir du poids de la tradition ?
Si l'Inde a relevé le défi de la démocratie politique et de la stabilité institutionnelle (I), elle peine à achever sa transition démocratique en se heurtant tant au lourd poids de la tradition qu'à sa complexité intrinsèque (II).
[...] L'instabilité politique ne s'impose pas comme une véritable menace pour la démocratie indienne. L'instabilité dans la pratique politique Le Premier Ministre, véritable figure du système institutionnel indien et de la conduite de la politique du pays, est un chef difficilement ébranlable d'une majorité parlementaire légitime. Son charisme vient souvent renforcer ce rôle prépondérant si bien que l'on parle même de dynastie Nehru-Gandhi depuis l'indépendance du pays. La tournure plébiscitaire et populiste est ainsi plus qu'un risque en Inde, c'est une réalité. [...]
[...] La volonté de s'affranchir du joug de la tradition. Avec les mandats de Rajiv Gandhi (1984-1989), de Vishwanath Pratap Singh et surtout de Narashimha Rao à la fin des années 1990, s'opère ce que Christophe Jaffrelot appelle une révolution silencieuse Les basses castes sont mises en scène de façon à devenir des acteurs centraux de la vie politique tant au niveau régional qu'au niveau national. Pour cela, ce sont des politiques de discrimination positive qui sont mises en œuvre, instaurant ainsi des quotas pour favoriser l'accès des Intouchables et des basses castes aux emplois publics d'une part et à l'éducation d'autre part. [...]
[...] Le système de castes. Hérité des siècles de domination britannique, le système des varnas (castes), élément fondamental de la société indienne, est un principe complexe de stratification sociale, rigide et ancien. Il existe officiellement quatre castes hindoues : ceux qui prient (brahmanes), ceux qui agissent (kshatryas), ceux qui travaillent (vaishya) et ceux qui servent (sudras). Il existe également des hors-castes, ce sont les Intouchables (Sheduled Castes) qui sont les parties les plus faibles de la population du fait de leurs besognes humiliantes (blanchisseurs, vidangeurs) et impures (éleveurs de porc, tanneurs) ainsi que de leur très faible accès à l'éducation. [...]
[...] L'Inde a relevé le défi de la démocratie politique et de la stabilité institutionnelle. La Constitution de 1950 fait de l'Inde la plus grande démocratie du monde L'instauration de la démocratie : le défi de la liberté. Une monarchie sous domination britannique. En 1600, la Grande-Bretagne crée la Compagnie anglaise des Indes orientales, sous l'impulsion de la Reine Elisabeth Ière, et débute alors sa domination sur la région, au détriment des empires néerlandais et français. Attirée par les richesses naturelles de l'Inde ainsi que par sa position géographique stratégique, la Grande-Bretagne tient particulièrement à cette grande colonie si bien que la Reine Victoria devient en 1876 Impératrice des Indes. [...]
[...] C'est une vraie révolution silencieuse qui s'opère en faisant de la caste un vecteur de démocratisation, celle-ci étant à la fois le reflet de la tradition indienne ainsi que le moyen par lequel l'Inde semble le mieux assurer sa transition démocratique. Est-ce une nouvelle forme de démocratie que l'Inde est en train de concevoir ? Peut-être, un modèle pour les pays du Sud, qui eux non plus, ne parviennent pas à s'affranchir du poids de la tradition ? En 1947, l'accès à l'indépendance de l'Inde était le moment de tous les espoirs de liberté et d'égalité. [...]
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