Marcel Mauss définissait la nation comme une « société matériellement et moralement intégrée, à pouvoir central stable, permanent à frontières déterminées, à relative unité morale, mentale et culturelle des habitants ». Ces traits qui peuvent constituer l'identité d'une nation, ce qui fait les caractéristiques de son homogénéité culturelle sa langue, son histoire… semblent pouvoir cependant être remis en cause dans le monde contemporain. La spécificité et l'unité culturelles nationales ne sont-elles pas aujourd'hui remises en cause par la diversité des populations qui peuplent un territoire, par les multiples échanges entre individus qui dépassent la cadre de la sphère d'appartenance nationale, par l'affaiblissement de l'état-nation ? On peut ainsi se demander si les identités nationales ne seraient pas aujourd'hui menacées d'affaiblissement ou de disparition dans le monde globalisé de 2007 ?
S'il est vrai que notre époque est porteuse d'éléments de susceptibles d'affaiblir l'identité des nations, il est convient de les relativiser et de voir que ces facteurs qui bousculent les identités ne sont pas forcément des menaces.
L'identité nationale semble, aujourd'hui, pouvoir être modifié altéré par un certain nombre de phénomènes du monde contemporain.
On évoquera, tout d'abord, le phénomène de mondialisation que certains voient comme l'émergence d'une authentique communauté internationale et un arasement des différences. La multiplication des échanges économiques, la constitution de réseaux de communication mondiaux, la diffusion d'une culture de masse standardisée largement américanisée pourraient ainsi conduire à une dilution des spécificités nationales. Le rôle croissant des organisations internationales, l'apparition d'enjeux planétaires comme l'environnement, la technologie, le cinéma, les politiques commerciales des multinationales… peuvent apparaître comme tendant à faire émerger une civilisation mondiale. Aujourd'hui des hommes, issus de sociétés différentes, habitant aux quatre coins du monde partagent certains traits communs : habitudes de consommation, référents culturels, valeurs. On peut ainsi noter une certaine convergence des modes de vie, des conceptions, des représentations.
[...] De plus, que l'identité nationale puisse être amenée à être bousculée par l'immigration, la mondialisation, l'Europe ne doit pas être systématiquement conçue comme une menace. La fermeture est plutôt le signe d'un déclin des nations, la capacité à accueillir des différences permettant de s'adapter à l'environnement extérieur est, au contraire, le signe que l'identité nationale n'est pas figée à jamais comme le promouvaient certaines conceptions de la nation, ce n'est pas un socle culturel devant briser toutes les autres identités. [...]
[...] En effet, il semble qu'il ne soit pas possible de confondre la proximité socioculturelle et la convergence identitaire. L'adoption d'habitudes, de comportements, de valeurs semblables ne suffit pas à faire émerger une identité commune. La similarité, loin d'éroder les démarcations identitaires, contribue fréquemment à les renforcer. Ainsi, Lévi-Strauss insiste sur le fait qu'il y dans les sociétés humaines, des forces travaillant dans des directions opposées : les unes tendant à l'accentuation des particularismes, les autres agissant dans le sens de la convergence et de l'affinité. [...]
[...] L'emprise de l'identité nationale est, à tout le moins, conçue comme devant être réduite. L'existence de la nation en tant qu'ensemble homogène risque alors d'être menacée d'une fragmentation interne avec l'existence de communautés diverses ne parvenant à développer des liens sociaux importants avec les autres. Cette question n'est bien sûr pas propre aux États-Unis. La France fut pendant deux siècles le seul grand pays d'immigration en Europe. À l'égard des immigrés fut suivie une même volonté de les transformer en Français. [...]
[...] Lorsque les conditions diffèrent peu, les moindres avantages ont de l'importance. Comme chacun voit autour de soi un million de gens qui en possèdent tous de semblables et d'analogues, l'orgueil devient exigeant et jaloux, il s'attache à des misères et les défend opiniâtrement Cette volonté de distinctions s'exprime à l'échelle des individus comme des groupes. Sur le plan collectif, il peut se manifester à travers différentes sphères d'appartenance (communautés religieuses, associations ) mais il se concentre de façon prioritaire autour du référent national, cadre politique considéré comme seul véritablement légitime dans la mesure où il est fondé sur la passion démocratique, par excellence, l'égalité. [...]
[...] De plus, l'État-nation reste un lieu important de socialisation continuant à détenir une capacité d'homogénéisation culturelle réaffirmée, aujourd'hui, dans des pays comme la France ou la Grande-Bretagne qui nuance les risques de voir les nations se fragmenter au point d'être menacées dans leur identité. [...]
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