Le 20 septembre 1792, c'est en scandant « Vive la Nation ! » que les soldats Français repoussent l'armée prussienne à Valmy. Constatant la force de l'affirmation de la nation, Goethe prédit alors : « D'ici et de ce jour commence une nouvelle époque de l'histoire du monde ». Le mythe du triomphe de Valmy révèle un paradoxe : alors même que la Révolution française se présente comme réalisation des idéaux cosmopolites des Lumières, elle porte en son sein le germe des chocs des nationalismes. L'ambivalence de l'idée de nation correspond à un enjeu majeur de la période révolutionnaire en France : il s'agit de définir la nation, de façon positive (qu'est-ce qu'une nation au sens civique?) et de façon négative (quelles sont les spécificités de la nation française ?), ainsi que de délimiter la place de la nation par rapport à l'État. Par nation, on désigne généralement une communauté d'individus dont la cohésion s'explique ou bien par le partage de certaines caractéristiques comme la langue, le passé, la géographie, la religion (définition dite objective), ou bien par un sentiment d'appartenance commune qui procède d'un choix conscient et sans cesse renouvelé (définition dite civique). La Révolution commence véritablement en 1789 lors de la formation de l'Assemblée nationale (17 juin), ce qui correspond à l'affirmation de la souveraineté de la nation librement unie. Elle s'achève définitivement en 1815 avec le Congrès de Vienne, qui déclare la mort de l'idée civique, universaliste de la nation de nation pour lui substituer celle de la spécificité des nationalités.
En quoi la période révolutionnaire dans son ensemble coïncide-t-elle avec une tentative d'affirmation de l'idée de nation en tant que souveraineté des citoyens sciemment unis?
[...] La nation civique, d'abord affirmée de façon idéale puis par le combat, tente de s'universaliser, produisant ainsi le nationalisme particulier. Cette deuxième vision prend le pas sur la première lors du Congrès de Vienne en 1815, où émerge un ordre de nations définies et délimitées par leurs frontières géographiques supposées intangibles. Selon l'historien Miroslav Hroch, les problématiques de l'affirmation de la nation esquissées durant la période révolutionnaire puis l'appropriation de l'idée nationale par le romantisme seront les prodromes des mouvements nationaux du Printemps de peuples, quinze ans plus tard. [...]
[...] L'idée de la nation en France de 1789 à 1815 Le 20 septembre 1792, c'est en scandant Vive la Nation ! que les soldats français repoussent l'armée prussienne à Valmy. Constatant la force de l'affirmation de la nation, Goethe prédit alors : D'ici et de ce jour commence une nouvelle époque de l'histoire du monde Le mythe du triomphe de Valmy révèle un paradoxe : alors même que la Révolution française se présente comme réalisation des idéaux cosmopolites des Lumières, elle porte en son sein le germe des chocs des nationalismes. [...]
[...] Napoléon tente de réaliser un consensus national autour de sa personne. Afin de réaliser cette unification de la nation étendue à des départements étrangers, il met en place des mesures diverses, et on peut retenir que sa réforme de l'instruction va dans ce sens : Tant qu'on n'apprendra pas dès l'enfance s'il faut être républicain ou monarchiste, l'État ne formera pas une nation, il reposera sur des bases incertaines et vagues, et sera constamment exposé aux désordres et aux changements Au- delà de l'unification, Bonaparte entend établir la souveraineté de la Grande Nation : il ravive le rêve des frontières naturelles et par ses conquêtes, exporte l'idée d'affirmation de la nation à l'étranger. [...]
[...] Si en théorie la nation est souveraine et unie, dans la réalité, ce mythe a bien des failles. Tout d'abord, très peu de Français sont considérés comme des citoyens actifs par la Constitution de 1791 ; de plus, le pouvoir du Roi est encore étendu, grâce à son droit de veto notamment ; la souveraineté de la nation n'est donc pas complète. En outre, l'unité concerne surtout les élites bourgeoises parisiennes, les profondes disparités (linguistiques, administratives, etc) en vigueur depuis l'Ancien Régime étant encore valables. [...]
[...] À la tête des députés du Tiers nouvellement déclaré Assemblée nationale, Bailly affirme devant Louis XVI que la nation assemblée ne peut recevoir d'ordre réalisant ainsi le souhait de Sieyès : Le Tiers-État deviendra noble en s'affirmant national (qu'est-ce que le Tiers-État ? janvier 1789). La nation est alors considérée comme un ensemble de sujets devenus citoyens par l'affirmation même de leur souveraineté. L'article 3 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août stipule : Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément ; une portée indéfinie et universelle est ainsi accordée à la nation. [...]
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