Ce document est une dissertation complète et entièrement rédigée qui se propose d'expliquer comment s'est opérée "l'individualisation" du vote, entre croyances et dispositifs techniques.
[...] En mars 1848, un décret met en place le suffrage universel dans un contexte de révolution. Le gouvernement espère ainsi calmer les tensions en prenant davantage en compte l'opinion des citoyens avec l'élection directe de leurs représentants. Bien qu'il soit alors imparfait (les femmes en sont par exemple complétement exclues), il représente le début de pratiques démocratiques effectives dans le paysage politique français. Cependant, si ce vote a vocation a être l'expression des citoyens, il est organisé de manière trop aléatoire pour la traduire réellement : on utilise des caisses en bois, les procédures de vote sont improvisées et la plupart des électeurs sont illettrés et « incapables » électoralement (c'est-à-dire dans l'incapacité de comprendre les règles de vote et d'effectuer un choix sans être soumis aux diverses influences). [...]
[...] Les transformations sociales et économiques qui surviennent durant le XIXe siècle participe à ce changement de paradigme. Des outils sont mis en place pour permettre une plus grande individualisation du vote, à commencer par l'usage du bulletin. Celui-ci est placé dans une enveloppe qui évite de reconnaître les bulletins, ce qui permet de limiter les tentatives de pression auparavant exercées par les présidents des bureaux de vote. Désormais, l'électeur doit également introduire lui-même son enveloppe dans l'urne. Le secret du vote est ainsi affirmé avec toute la notion d'intimité qu'il comporte. [...]
[...] Les manuels électoraux ont également vocation à apprendre les mécanismes du vote : on tente de créer une réelle capacité électorale. C'est ainsi que s'est opérée l'individualisation du vote en France. Aujourd'hui, celle-ci évolue encore pour prendre une forme différente. Lors des dernières élections présidentielles en France, le taux d'abstention d'élevait à 25%. Même si la crise de la représentation politique peut expliquer ce taux élevé, les politologues considèrent de moins en moins cette abstention comme révélatrice d'un désintéressement politique car elle est souvent accompagnée d'une vraie conscience et traduit un choix du citoyen. [...]
[...] Par ailleurs, comme la population est relativement ignorante, il est facile d'utiliser des arguments économiques pour corrompre les votes. Très rapidement, ces pratiques seront sanctionnées avec des lois très strictes contre la corruption collective. Enfin, l'ignorance est également une barrière importante à l'individualisation du vote puisque la sous-formation des électeurs, pour la plupart illettrés à l'instauration du suffrage universel, pose problème dans l'appropriation d'une opinion politique. Comme les individus sont peu éduqués, on assiste à une incompétence politique généralisée avec une incompréhension des normes et des enjeux qui rend difficile d'accorder une importance au choix du vote. [...]
[...] La procédure du vote secret en public instaurée en 1848 représente d'ailleurs bien cette conception collective du vote. Dans ces sociétés, le vote repose donc sur le réseau familial, social, religieux. Il dépend de logiques communautaires et de logiques d'appartenance, il n'est donc en aucun cas individuel. Souvent, les électeurs vont voter ensemble pour le même candidat après des délibérations communales, c'est donc une vraie « affaire familiale ». Au XIXe siècle, la religion représente une autorité morale qui a également une influence considérable sur le vote des citoyens. [...]
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