« L'Égypte avait essuyé le choc du conflit israélo-arabe. Tant monarchie que république, elle s'était engagée dans une lutte qui débordait ses intérêts nationaux. Elle avait sacrifié la fleur de sa jeunesse à la cause de l'unité arabe et de l'autodétermination palestinienne. Ce faisant elle avait perdu la péninsule du Sinaï et régulièrement mis en danger sa cohésion interne. L'Égypte avait gagné le droit de faire la paix ». Mais comment cette paix s'est-elle réalisée ?
Selon Blainey, seule la guerre permet de mesurer la puissance ; ainsi les guerres décisives objectivent la distribution de la puissance et renforcent la paix. L'estimation qu'un acteur fait de sa puissance et de ses capacités est influencée par plusieurs facteurs qui font qu'il peut juger premièrement que le statu quo est injuste, ne correspond pas à la distribution de la puissance objective mais deuxièmement que la guerre constitue une option rationnelle afin de faire reconnaître et accepter la véritable hiérarchie de puissance.
Ainsi Blainey a recensé sept facteurs entrant dans le calcul des dirigeants lorsqu'ils évaluent la distribution de la puissance : la puissance et les capacités militaires ; le comportement éventuel des autres acteurs ; l'unité nationale ; la capacité d'endurance de l'économie ; le souvenir des réalités de la guerre ; l'idéologie et les capacités des dirigeants à appréhender la réalité. Aussi la combinaison de ces facteurs constitue-t-elle la perception qu'à l'acteur de la puissance relative. Ces facteurs peuvent contribuer à la fois au déclenchement de la guerre et au surgissement de la paix. Blainey pense que les estimations contradictoires de la puissance relative dans le système mènent au conflit. Pour lui, la guerre constitue une épreuve, un test de la puissance, le seul moyen par lequel les belligérants se rapprochent de la distribution de la puissance objective, s'accorderont implicitement sur la distribution de la puissance. La guerre permet ainsi de révéler la hiérarchie de la puissance réelle, les deux acteurs sont amenés à admettre au vu du résultat des batailles, quelle est leur puissance relative. Blainey ajoute que dans l'Histoire, la paix a été la plus longue quand elle était précédée d'une guerre dont le résultat a été décisif. La prise de conscience de la réalité de la distribution de la puissance, lors de l'affrontement, peut expliquer l'avènement et la durée de la paix qui fait suite au conflit. Par conséquent, selon Blainey, un Etat décide d'entrer en guerre parce qu'il estime que sa puissance est supérieure à celle de son adversaire et qu'il a des chances de renverser la distribution de la puissance en sortant victorieux de la bataille.
Par application de la théorie de la thèse de Blainey sur les causes de la guerre, une hiérarchie de puissance réelle entre Israël et l'Egypte a été déterminée lors de la guerre des Six Jours. En effet cette dernière qui dura du 5 au 10 juin 1967 et qui opposa « les forces israéliennes aux forces armées égyptienne, syrienne et jordanienne, sur les territoires limitrophes de l'Etat israélien » a démontré « l'extrême supériorité militaire d'Israël sur ces adversaires ». « La guerre aura duré moins de six jours, se soldant par un triomphe inégal du petit Etat hébreu » . Ainsi suite à cette guerre décisive, on peut en déduire que l'Egypte avait connaissance de la faiblesse de sa puissance face à celle d'Israël. Certes le résultat de cette guerre a été décisif mais contrairement à la thèse de Blainey elle n'a pas eu pour conséquence la paix. En effet la prise de conscience de la réalité de la distribution de la puissance n'a pas empêché l'avènement d'une nouvelle guerre entre Israël et l'Egypte c'est-à-dire la guerre du Kippour qui dura du 6 au 25 octobre 1973. Mais alors comment expliquer les causes de l'entrée en guerre de l'Egypte, connaissant la faiblesse de sa puissance face à celle d'Israël ? Pourquoi un Etat entrerait-il en toute connaissance de cause en guerre s'il sait pertinemment qu'il ne sera pas le gagnant de cette dernière ?
[...] Israël, après sa victoire incontestable suite à la guerre des Six Jours, se sent largement supérieure à l'Egypte ainsi qu'aux Etats arabes. En effet, l'Etat hébreu surestime sa puissance, voit l'Egypte comme un Etat faible, ne représentant aucune menace ; alors pourquoi voudrait-il faire des concessions à ce même Etat ? Il semble alors logique qu'il faille commencer par prouver à l'Etat israélien qu'il n'est pas si infaillible, intouchable et que l'Egypte est un Etat qui a les moyens de le désorganiser, de le perturber ; même s'il ne peut le vaincre, il peut lui causer des pertes considérables et être à l'origine de troubles douloureux pouvant remettre en cause l'équilibre intérieur d'Israël. [...]
[...] Blainey pense que les estimations contradictoires de la puissance relative dans le système mènent au conflit. Pour lui, la guerre constitue une épreuve, un test de la puissance, le seul moyen par lequel les belligérants se rapprochent de la distribution de la puissance objective, s'accorderont implicitement sur la distribution de la puissance. La guerre permet ainsi de révéler la hiérarchie de la puissance réelle, les deux acteurs sont amenés à admettre au vu du résultat des batailles, quelle est leur puissance relative. [...]
[...] La guerre du Kippour a aussi démontré la dépendance d'Israël des Américains. Survient l'idée selon laquelle les Israéliens n'auraient pas eu cette puissance sans l'aide et le soutien des Etats-Unis. Cela se constate tout d'abord par le ravitaillement d'Israël en armes provenant des Etats- Unis, qui assurent cette livraison pour laquelle il faut au préalable l'autorisation du Congrès américain. Ainsi le 8 octobre 1973 les représentants aux Etats-Unis font le siège de la Maison Blanche pour obtenir d'urgence la livraison d'armes destinée à remplacer celle perdue depuis le début de cette guerre Israël se rend bien compte de cette dépendance sans laquelle une résistance aux coalitions des forces armées adversaires serait très difficile. [...]
[...] L'homme d'Etat doit penser en termes d'intérêt national. L'homme d'État doit avoir une vision à long terme »[54]Finalement la guerre du Kippour n'a-t-elle pas été provoquée par Israël qui a fait une mauvaise estimation des ambitions et objectifs de l'Égypte, ainsi qu'une mauvaise estimation de sa puissance qu'elle pensait être à l'abri des dangers, qui a fait l'erreur de sous-estimer la puissance égyptienne. Ne peut-on pas ajouter le cas d'Israël à la liste de Jervis des hommes politiques qui ont commis des erreurs ayant favorisé le déclenchement d'une guerre?[55] Bibliographie Henry KISSINGER, Sortie de crise Kippour 1973, Vietnam 1975 Fayard 548p Texte de BLAINEY Causes of war ainsi que les idées de la reprise de la séance 3 faite par Mr BRUSTLEIN. [...]
[...] Il semblerait que le risque pris par Sadate en 1973 d'attaquer par surprise Israël ait établi un statu quo assurant une paix permanente avec Israël. Survient alors l'idée selon laquelle un Etat a parfois intérêt à attaquer un adversaire plus puissant que lui face auquel il sait qu'il n'a pas de chance de sortir vainqueur afin d'améliorer sa situation dans le statu quo, sortir du sentiment d'infériorité et donc au final maintenir une paix la plus durable possible. Contrairement à Nasser, Sadate est l'exemple type du chef d'Etat rationnel. [...]
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