Dans la définition d'Aristote, c'est l'homme et lui seul qui est politique : c'est même une des caractéristiques qui le distingue des autres animaux. Mais à ce titre, l'ouvrage intitulé The Great Ape Project, d'un statut ambigu, vient remettre en cause ce consensus : c'est particulièrement la définition de la communauté politique (celle d'Aristote) qu'il récuse. En effet, les auteurs de cet ouvrage s'attaquent particulièrement à ce qui est pour eux le fondement d'une société politique, ce qu'ils nomment : « une sphère de communauté d'égaux », fondée sur un système de droits qui garantiraient juridiquement cette égalité (l'insistance sur l'aspect juridique de la question est nette, notamment dans l'article de Gary L. Francione, professeur de droit et c'est à partir de là qu'on peut le percevoir comme un réel projet politique qui se veut applicable). Ils veulent intégrer dans celle-ci les « grands singes » ou singe anthropoïdes : orangs-outans, chimpanzés, bonobos et gorilles. La réflexion qu'ils vont développer réactive de nombreuses questions, mais en refusant tout acquis préalable, par exemple l'idée d'être humain comme limite naturelle d'un groupe :
- qu'est-ce qui fait le fondement d'un groupe politique ?
- quel doit-il être pour déterminer quels membres en font partie ?
[...] Francione, professeur de droit et c'est à partir de là qu'on peut le percevoir comme un réel projet politique qui se veut applicable). Ils veulent intégrer dans celle-ci les grands singes ou singe anthropoïdes : orangs-outans, chimpanzés, bonobos et gorilles. La réflexion qu'ils vont développer réactive de nombreuses questions, mais en refusant tout acquis préalable, par exemple l'idée d'être humain comme limite naturelle d'un groupe : - qu'est-ce qui fait le fondement d'un groupe politique ? - quel doit-il être pour déterminer quels membres en font partie ? [...]
[...] C'est le statut de personne qui est ici en jeu. En effet, les grands singes méritent d'après eux ce statut par leurs capacités intellectuelles, émotives, sociales, etc. Dans cette question, le problème majeur est celui du statut précis qu'il faut accorder, dans la loi, aux grands singes (pour passer à une législation, il est nécessaire de définir ce statut) : est-il réellement envisageable de leur accorder le même statut qu'aux êtres humains ? Cela est loin de sembler évident. En effet, ce qui frappe dans cette déclaration pour les droits des grands singes, c'est l'absence de la contrepartie nécessaire de droits pour chaque membre de la communauté : les devoirs. [...]
[...] Mais il semble bien qu'Aristote attribue au logos une fonction plus haute, qui est celle de délibérer, et de délibérer en commun, sur ce qu'il est bon ou juste de faire ou de ne pas faire. Ceci ressort du fait que l'appartenance à la communauté, qui est aussi une communauté de valeurs, n'est jamais automatique ; elle implique en effet deux conditions : le besoin et la capacité. C'est bien pourquoi les dieux sont exclus d'une communauté avec dieu : ils sont autarciques, donc n'ont aucun besoin, et a fortiori pas celui d'une médiation communautaire Mais c'est également la raison pour laquelle d'autres animaux que l'homme ne peuvent pas non plus avoir part à cette communauté : L'appartenance à la communauté implique, de la part de l'individu, la volonté et la capacité de communiquer, de partager, de mettre en commun, de participer capacité qu'ils dénient aux grands singes. [...]
[...] La communauté politique est d'abord la mise en commun d'un territoire. Le territoire doit bien sûr lui aussi être limité, par définition, et de plus, doit aussi remplir la condition de juste-milieu : ni trop petit, sans quoi il ne saurait être autarcique économiquement, ni trop grand, sans quoi le sentiment d'appartenance à la communauté ne pourrait être assez vif. L'idéal, pour Aristote, est celui d'un "territoire qu'on peut embrasser d'un seul coup d'œil". On voit bien là le désaccord majeur avec le projet grands singes car celui-ci est tout entier fondé sur une prise en compte de l'intérêt de ces animaux, qui, finalement, exige une séparation nette avec la communauté humaine, dans une optique de préservation de conservation de leur identité propre. [...]
[...] En effet, la communauté est par définition finie, définie. La communauté rassemble, mais dans des limites, qui sont les conditions mêmes de la mise en commun : il ne peut y avoir de mise en commun sans une certaine sélection de ceux avec qui on met en commun. L'idée d'une communauté ouverte semble contradictoire pour Aristote. Mais quelles sont les limites de la communauté? Qu'est-ce qui constitue l'identité d'une communauté? Aristote aborde expressément cette question, notamment au livre III de la Politique, en détaillant point par point les constituants de la communauté (on se référera une fois de plus aux analyses de Pierre Aubenque. [...]
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