Le suffrage universel proclamé en 1848 en France donne le droit de vote à l'ensemble de la population masculine. Les femmes ne l'obtiennent qu'un siècle plus tard en 1944 et cet écart est évidemment frappant. La participation électorale introduite par la Révolution française semble donc être définie par l'appartenance au sexe masculin. Le corpus de documents sur le thème de la « fabrique de l'électrice » revient à la fois sur les étapes de l'accès des femmes au droit de vote et sur sa mise en application. Mattei Dogan et Jacques Narbonne dans leur observation des françaises face à la politique constatent les modalités d'accès au vote des femmes et s'interrogent sur le comportement électoral de celles-ci. Janine Mossuz Lavau fait quant à elle le bilan d'un demi siècle de participation électorale dans un article issu de la revue Pouvoir en 1997. Cette sociologue, dans un ouvrage en collaboration avec Mariette Sineau (Enquête sur les femmes et la politique en France) revient sur la relation entre les françaises et la politique. Professeur au Collège de France, Pierre Rosanvallon dans Le sacre du citoyen, Histoire du suffrage universel publié en 1992, pose la question du décalage entre français et anglo saxons quant à l'accès des femmes au droit de vote. Enfin, Anne Verjus, chargée de recherche au CNRS dans « Le cens de la famille. Les femmes et le vote » publié en 2002 observe l'impact de l'instauration du suffrage universel masculin en 1848 sur la condition féminine et leur représentation de la citoyenneté
[...] Pierre Rosanvallon souligne l'éparpillement et l'incompatibilité des défenseurs de l'accès des femmes au droit de vote. Ainsi, les Saint Simoniens sont de fervents supporters de cette cause voyant dans l'émancipation féminine la réalisation de la société nouvelle. Face à cela, les féministes françaises développent essentiellement des thèmes utilitaristes qui les rapprochent des milieux catholiques. Il y a également l'extrême droite de harles Maurras pour qui l'accès des femmes aux urnes pourrait être le grain de sable capable de stopper la formidable machine collectiviste Enfin, citant Alexandre Dumas fils, Pierre Rosanvallon montre la compatibilité entre la misogynie et le souhait de voir les femmes s'émanciper. [...]
[...] Leur immaturité politique est également montrée du doigt et pour ces deux auteurs, il existe avant la seconde guerre mondiale une sorte d'antiféminisme inhérent au monde latin. Pierre Rosanvallon s'oppose à cette idée : le retard français par rapport aux pays avant-gardiste quant au vote des femmes ne serait pas dû à un antiféminisme plus marqué qu'ailleurs. L'un des grands débats de la troisième République a été la laïcité. C'est en ce sens que le personnel politique de cette époque a utilisé l'influence de la religion sur les femmes pour justifier leur mise à l'écart du jeu politique. [...]
[...] Une nouvelle fois, la France se trouve en retard par rapport à certains pays occidentaux. La notion d'égalité présente dans le triptyque caractéristique de la République Française n'est-elle pas dès lors que purement symbolique ? La citoyenneté ne semble pas être dans le cas de la France un privilège facile à obtenir Bibliographie - Achin Catherine, Lévêque Sandrine, Femmes en Politique, La Découverte, Paris - Adler Laure, Les femmes politiques, Paris, Seuil - Bard Baudelot Mossuz-Lavau J(dir), Quand les femmes s'en mêlent. [...]
[...] La femme est donc un électeur comme les autres à quelques détails près : malgré une relative analogie, J .Massuz Lavau constate trois différences avec le vote masculin (moins voter pour le FN que les hommes, un léger survote à gauche et une tendance à plus voter pour les écologistes que les hommes). Les femmes sont véritablement devenues un enjeu pour les hommes politiques. Leur participation est forte mais elles sont sous représentés politiquement. S'agit-il d'une nouvelle forme de domination orchestrée par les hommes ? Comme le souligne A. [...]
[...] Selon Pierre Rosanvallon, une raison englobant ces arguments expliquerait les obstacles à l'accès des femmes aux urnes. Le retard français par rapport aux pays anglo-saxons ne s'explique pas par un antiféminisme latent mais bien par une conception différente de la citoyenneté qui ne peut être fractionnée. Donner progressivement le droit de vote aux femmes aurait alors été un non-sens total. Anne Verjus présente une approche différente de la citoyenneté : pour elle, la citoyenneté symbolisée de 1789 à 1848 par le pater familias ne fait que se masculiniser avec l'instauration du suffrage universel. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture