Selon le sociologue Alain Touraine, un mouvement social désigne une action collective dont l'objet est de changer les comportements, les mentalités et les institutions en vue d'obtenir des transformations de la société. Pour qu'il prenne son entière mesure, un mouvement social doit avoir conscience de sa spécificité, il doit aussi posséder un adversaire commun et enfin avoir conscience des enjeux de son combat. Dans l'article « Expertise scientifique et capital militant : les rôles des médecins dans la lutte pour la législation de l'avortement » de Sandrine Garcia publié dans Les actes de la recherche en sciences sociales, le mouvement social lié à l'avortement possède bel et bien les caractéristiques présentés ci-dessus. L'auteur nous présente comment un tel mouvement social s'organise, se structure et parvient à ses fins après des longues années de conflit.
Dans quelle mesure et comment la lutte des femmes pour l'avortement est-elle le reflet d'un mouvement social ? Comment au regard des nombreuses divisions qui existent au sein du mouvement, ses membres réussissent-ils à les dépasser afin de parvenir à la finalité escomptée ?
[...] Nous avons vu à travers cet article que la lutte des femmes pour l'accès à un avortement libre et gratuit a dû affronter de nombreux obstacles. Longtemps pénalisé par les divisions internes, ce mouvement social a su les dépasser à la suite de l'imposition de revendications radicales par une minorité. En portant un regard critique sur le texte, nous constatons que l'auteur n'aborde quasiment pas le contexte politique de l'époque alors que pour de nombreux sociologues à l'instar de John Willem Duyvendak, le champ politique est indispensable à la compréhension d'un mouvement social dans son ensemble. [...]
[...] La décision de l'avortement revient à la femme ou le médecin est un technicien : tels sont les mots d'ordre des médecins du GIS. Ils souhaitent même que l'avortement soit remboursé par la sécurité sociale. A l'inverse, les membres de l'ANEA rappellent que l'avortement n'est pas un acte simple. Bien plus qu'un simple technicien, le médecin doit garder un pouvoir médical fort. De plus, afin de rendre le jugement le plus adéquat possible, l'ANEA prévoit que la décision d'avorter soit prise par une concertation entre un médecin, un juriste, un travailleur social et un homme de religion (l.110-112) 3. [...]
[...] La France est finalement parvenue à établir un équilibre. Le droit à l'IVG, déclinaison du droit des femmes à disposer de son corps, a ainsi vu ses garanties croître et a su dans le même temps éviter l'écueil de la banalisation. [...]
[...] Une action militante de grande ampleur, dont les médecins demeurent le socle inamovible, se met en place comme en témoigne l'alliance entre les médecins du GIS, le MLAC et les hôtesses du planning familial, récemment détachées du MFPF, contre le collège des médecins. En résultent le départ de l'équipe dirigeante du MFPF et la prise de pouvoir, en juin 1973, de Simone Iff, qui est proche du MLF (l.469-471). En outre, le MLAC sait répondre à la demande de la part des femmes. [...]
[...] La mobilisation des personnalités symboliques et compétentes Tout le travail des mouvements crées consiste à faire diffuser leurs idées au grand public afin que la question de l'avortement concerne l'ensemble de la société. Les médias constituent le vecteur idéal d'une telle volonté. Par exemple, l'hebdomadaire Le nouvel Observateur prend l'initiative de diffuser un manifeste de 343 femmes soutenant la cause féministe de l'avortement défendue par le MLF. De nombreuses personnalités, sollicitées par Simone de Beauvoir, signent le manifeste également ratifié par des femmes anonymes, bien souvent membres du MLF. [...]
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