Comment un Etat d'inspiration néo-libérale, plus ou moins proche de l'Etat minimal, peut-il assurer 'avec succès' l'ordre public en abandonnant les relations sociales et économiques à un mécanisme, le marché, par définition étranger à toute idée de morale, de justice, et créateur d'inégalités pouvant déboucher sur une contestation sociale et politique croissante par ceux qui sont mis à l'écart du fait de la tendance monopolistique de tout marché. Nous verrons ainsi comment le néo-libéralisme est parvenu à s'imposer face à l'Etat-Providence, profitant d'un contexte nouveau, afin d'instaurer progressivement un nouvel ordre public avant d'aborder les problèmes concrets posés par cette mutation profonde et les critiques qu'elle suscite
[...] - Ce changement de l'Etat se traduit par une multitude d'évolutions sociales majeures qui font que l'Etat apparaît comme coupé en deux, assurant des fonctions différentes selon l'origine sociale. On peut citer ici Pierre Bourdieu qui écrit dans le tome 1 des contre-feux (p.37): Aux USA, on assiste à un dédoublement de l'Etat, avec d'un côté un Etat qui assure des garanties sociales, mais pour les privilégiés, suffisamment assurés pour donner des assurances, des garanties, et un Etat répressif, policier, pour le peuple. [...]
[...] De "l'Etat-providence" à "l'Etat-pénitence" : les mutations du rôle de l'Etat dans la gestion de l'ordre public Introduction La célèbre définition donné par Max Weber de l'Etat, comme entreprise politique à caractère institutionnel dont la direction administrative revendique avec succès le monopole de la contrainte physique légitime sur un territoire donné semble fondée sur les moyens utilisés (le monopole de la violence physique légitime) plutôt que sur les fins poursuivies par l'Etat. Celui-ci résulte en effet d'une trajectoire particulière de l'histoire nationale, associant éléments issus d'un volontarisme politique et hasards de l'histoire. [...]
[...] - Or l'absence de prise en compte des relations sociales peut conduire à une violence exagérée ou inadaptée, car aveugle. - De plus, David Garland note, après Durkheim et Nietzsche, que la répression peut passer pour un symbole de force, mais elle peut aussi s'interpréter comme le symptôme d'une absence d'autorité et comme répression inadéquate - Enfin, la banalisation du risque (et des dispositions que cela suscite) dans une société apparaît comme la négation de la seule fonction sur laquelle tous s'accordent pour l'Etat. [...]
[...] Un contexte international et théorique favorable La vision minimaliste de l'Etat n'est pas apparue de manière anodine. Alors que d'un point de vue philosophique, elle pouvait être déconnectée des faits politiques, d'un point de vue pratique, elle a bénéficié d'une mutation du contexte international qui rendait possible le succès politique des idées néo-libérales dans la mesure où les idéologies concurrentes ne paraissaient plus représenter des alternatives crédibles. En outre, elles pouvaient s'inscrire, comme pour prouver leur faisabilité et leur fonctionnalité, dans un héritage, celui 19ème siècle la fin de l'Histoire et le triomphe de la démocratie libérale - Le 20ème siècle a vu se succéder différentes idéologies (fascisme, nazisme, communisme) qui prétendaient assurer l'ordre public et social par l'intermédiaire d'un Etat omniprésent jusqu'à devenir totalitaire. [...]
[...] Le néo-libéralisme comme remise en cause de l'Etat-Providence La doctrine néo-libérale, nous l'avons vue, est basée sur un resserrement des fonctions de l'Etat. Cela ne correspondait cependant pas forcément à toutes les trajectoires nombreuses histoires nationales où l'Etat exerçait des fonctions plus larges afin d'assurer l'équilibre social, dans un contexte d'essor de la démocratie et de l'économie de marché. Il convient donc en premier lieu de s'interroger sur les causes de ce changement de paradigme et de voir comment le modèle néo-libéral, partiellement conforme au consensus fondateur de certains Etats, a pu s'exporter vers des pays de culture politique différente pour occuper aujourd'hui une position d'hégémonie. [...]
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