Le ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Co développement présidé par Brice Hortefeux constitue une nouveauté dans le paysage ministériel français depuis 2007. Cette proposition de Sarkozy devenue aujourd'hui réalité fut lourdement controversée pendant la campagne présidentielle du fait de la juxtaposition de ces deux termes d'immigration et d'identité nationale ; juxtaposition qui laissait sous-entendre que la vocation du futur ministère serait de préserver une prétendue identité française. Or du point de vue de l'historien privilégiant la longue durée, toute nation est le fruit de phénomènes migratoires et de métissages. De même toute nation repose sur le refoulement et l'oubli de vagues de migrations successives. En conséquence, « l'identité de la France »ne serait donc pas fixée et serait vouée à évoluer sans cesse. Comment expliquer alors le paradoxe apparent entre un désir de fortifier l'identité nationale et le refus de prendre en compte des origines plurielles de la nation ?
La nation est à la fois une réalité et une idée qui s'inscrit dans la modernité. Devenue depuis la Révolution française la forme privilégiée sinon unique de l'organisation politique dans le monde, la nation nous apparait comme le cadre naturel dans lequel se pense et se vit le lien social et politique moderne dans lequel s'exerce la solidarité entre les individus et les groupes sociaux.
Mais rendre possible et efficace ce lien signifie également exclure groupes et individus du cadre national. Aussi la nation nous apparaît également comme un lieu d'exclusion. Poussé à son paroxysme lors du 19e et 20e siècle elle sera le théâtre des pires moments et phénomènes de l'humanité (génocide, guerre..) du nationalisme au totalitarisme. Aujourd'hui alors même que le nationalisme reste une composante cruciale dans certaines sociétés dans le monde, la nation comme forme d'organisation politique est de plus en plus concurrencée par d'autres entités ou espace de légitimation des relations économiques (euros régions) politiques (espace Schengen) et sociales.
Comment expliquer la coexistence de groupe d'individus aux identités différentes dans une même entité politique ? Cette coexistence n'a-t-elle pas un autre fondement que « le vouloir-vivre ensemble »prôné lors de la Révolution française ?
Tout d'abord nous présenterons les deux issues du contexte tout particulier du 19 siècle puis nous en présenterons les limites.
[...] La DDHC qui voit le jour en 1789, fait de la nation la gardienne des droits fondamentaux. Les articles 5,6 et 16 attribuent à la nation un droit de souveraineté qui ne peut pas être exercé directement par la nation. C'est l'article 3 de la DDHC qui énonce les principes de la nation. Dès lors, la conception française de la nation devient un vouloir vivre ensemble (Ernest Renan, Qu'est-ce qu'une nation, 1882) : on est français parce qu'on le veut. [...]
[...] Le regroupement des individus au sein d'un corps politique (ou pas) peut ainsi avoir comme origine le partage d'une telle identité nationale. Cependant existe-t-il d'autres facteurs d'explications ? Un sentiment non naturel de commune appartenance politique L'abbé Sieyès dans qu'est-ce que le tiers Etat ? (1979) donne le premier la définition politique de la nation : un corps d'associés vivant sous une loi commune et représentée par la même législature CAD comme une communauté politique de citoyen, formée par l'union des volontés individuelles en une association libre, fondée sur la thèse du contrat social développée par les Lumières. [...]
[...] Un peuple se considérant comme une nation a le droit de choisir. C'est pour cela qu'en cette période révolutionnaire, un certain nombre de principautés comme celle d'Avignon ont demandé à appartenir à la France. Dans ces territoires, l'Assemblée constituante française organisa ainsi des plébiscites dont la question était : voulez vous être français Lorsque le peuple répondait oui, la France annexait les territoires : le peuple devenait donc à même de régler les territoires. Et puisque la nation est le peuple rassemblé la Révolution supprime toutes les inégalités existantes au sein de la société corps intermédiaires parlements titres, universités, corporations Les lois Lalande et Le Chapelier font disparaître les formes d'organisation professionnelle. [...]
[...] Or tous ces types d'appartenance font inévitablement appel au cœur des individus et viennent renforcer l'appartenance politique. Dans nos sociétés démocratiques, on ne peut expliquer l'appartenance politique sans avoir recours à tous les éléments subjectifs, qui définissent l'appartenance à une nation. Ainsi la nation est-elle une allégeance politique suprême dans le monde contemporain : être français, par exemple, c'est essentiellement être attaché politiquement à la France par un lien privilégié et souvent exclusif. L'exclusivité est d'ailleurs totale dans le cas d'Etats qui ne reconnaissent pas la possibilité de double nationalité. [...]
[...] Des buts sont proclamés communs par les Etats adhérant aux institutions but inscrit dans des déclarations ou des chartres. : interdiction de la guerre, émancipations des peuples colonisés, droit au développement, protection du patrimoine de l'humanité. ; il s'agit donc de la véritable naissance d'une société internationale avec ses institutions et ses buts propres, irréductibles les une et les autres aux Etats. La vocation de ces institutions et de ces buts est universelle. Après la guerre froide, le besoin d'une véritable régulation politique dépassant le cadre national s'est accru. [...]
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