L'idée de l'espace civil puise ses racines dans l'Antiquité où sa signification se rapproche de celle de l'espace public aujourd'hui. Dans cette interprétation, la société civile renvoie à un champ d'interaction sociale dominé par des rapports horizontaux s'opposant à la sphère privée où prédomine une autorité verticale. À l'âge de la modernité européenne, G. Hegel réintroduit la notion d'"espace civil" dans le débat politique en l'investissant avec un contenu d'autonomie individuelle par lequel s'introduira la notion de citoyenneté moderne.
Hegel définit la société civile comme "une sphère indépendante de l'état et de la famille, dans laquelle se développe la subjectivité propre aux individus". Selon cette interprétation, la société civile correspond à une sphère de jugement individuel et d'autonomie indépendante du pouvoir institué.
La sphère civile est vue comme un espace d'interaction sociale, géré par des rapports horizontaux et dans lequel sont socialisés les individus autonomes voués à devenir de futurs citoyens. La médiation civile relie les citoyens et institutions et prévient « une déconnexion » de la population et les élites politiques.
[...] Le concept d'espace civil a été érigé en norme politique et sociale de portée globale, norme véhiculée par des politiques de développement. Scepticismes civils Si en 1954, pour William Beveridge, la société civile est un concept plutôt univoque, sous-jacent au fonctionnement démocratique moderne et une garantie d'une société libre et juste aujourd'hui le concept est accompagné par une vague de scepticisme et méfiance. Les significations du concept se sont multipliées tout en ouvrant un vague conceptuel. Le constat d'un retrait politique généralisé à l'origine du déficit démocratique grandissant, est interprété systématiquement en continuité avec la diffusion de l'individualisme et du capitalisme à l'échelle globale, mouvement qui entraînerait une baisse généralisée du capital social et de l'engagement civil et politique. [...]
[...] Si certaines organisations civiles se confrontent à un sentiment d'impuissance politique, d'autres forment de puissants réseaux transnationaux (Amnesty International, Greenpeace, WWT, etc.) dotés d'un vrai pouvoir de négociation et de lobbying politiques. Dans bien des cas ces réseaux transnationaux perdent leur caractère horizontal et spontané et ainsi s'éloignent considérablement de l'élément participatif au cœur- même de l'idée civile. Dans ces organisations, les prises de décision ainsi que les rapports de pouvoir sont loin d'être distribués selon un modèle égalitaire. Les hiérarchies Nord-Sud ne font que se reproduire au sein de ces organisations. [...]
[...] Comme toute utopie, cette théorisation fournit un horizon normatif et une grille de lecture pour situer de nouveaux types de légitimités en émergence qui façonnent l'espace civil. Aujourd'hui, nous observons des phénomènes qui déstabilisent et rendent inapplicable la version moderne de l'état et de l'espace civile. Il y a bien une nécessité de trouver de nouveaux outils conceptuels pour étudier en profondeur des conséquences de la mondialisation sur la sphère civile. L'apparition de nouveaux phénomènes civils résiste à une lecture par les appréhensions traditionnelles du concept. [...]
[...] Le concept des nouveaux mouvements civils se réfère aussi bien à la révolution associative des années 70 du siècle dernier, qu' aux mouvements altermondialistes contemporains et le mouvement de justice globale lié au Forum Social Mondial créé en 2001. Désignant un ensemble assez diversifié de revendications et d'acteurs, ces mouvements ont en commun quelques éléments principaux. Tout d'abord, ils réhabilitent l'idée de démocratie participative s'accordant sur la vision d'une citoyenneté active sur un mode décentralisé. Deuxièmement, ces mouvements investissent des terrains politiques globaux (environnement, droits de l'homme, etc.), tout en conservant un ancrage local. [...]
[...] et Allard L., “Devenir Media“, éd. Amsterdam Castels M., rise of the Network Society“, Blackwell Publishers Ltd Civil society and political theory, J.L Cohen, Andrew Arato Colas A., “International Civil Society: Social Movements in Word's Politics“, Polity Press Deleuze G., “Postscriptum des sociétés de contrôle“, L'Autre journal, n Escobaro A., making of social movements in Latin America: Identity, Strategy and Democracy“, Westview Press Habermas J., “L'espace public“, éd. Payot Haubert M., “L'idéologie de la société civile. Les sociétés civiles face au marché. [...]
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