Jean Monnet aurait dit, au soir de son oeuvre, que, si tout était à recommencer, il reconstruirait l'Europe en « commençant par la culture » et non par l'économie. Cette petite phrase, fût-elle apocryphe, est néanmoins révélatrice d'une frustration générée par une Europe qui apparaît lointaine et dominée par l'économie, une Europe de bureaucrates qui semblent vouloir imposer leur gestion des marchés sans chercher à comprendre les aspirations des populations européennes. Ce souhait d'une Europe plus proche des hommes fondée non plus sur une gestion économique commune, mais sur des valeurs et un projet soulignant à la fois les points communs et l'enrichissement par la différence pourrait être le biais de la construction politique de l'Europe. La politique culturelle de l'Europe, en favorisant la collaboration culturelle, l'organisation de manifestations intra-européennes et le soutien d'initiatives à différentes échelles pour promouvoir similitudes et différences pourrait faire émerger un sentiment d'appartenance à une communauté d'histoire, de savoir, et de partage qui concourrait au rapprochement des Européens.
Les refus français et néerlandais du Traité établissant une Constitution pour l'Europe font écho à ces propos de 1963 et remettent en question l'identité de l'Europe. La voie du « tout économique » semble avoir été négativement sanctionnée dans sa capacité à construire l'Europe politique, aussi il s'agit de trouver une voie de relance qui définisse l'identité à atteindre et qui fasse consensus.
[...] Les frontières, l'état, le peuple, La Découverte, 2002). Ainsi la création d'un folklore, non pas artificiel, mais né et valorisant la diversité, permettrait d'échapper au côté technocratique souvent reproché à la politique de l'Union et, par conséquent, de favoriser la participation politique et le rapprochement des peuples. Cette adhésion serait d'autant plus forte qu'elle ne serait ni imposée, ni seulement dictée par la coutume, mais bien le fait d'un engagement librement consentit à une communauté de destin Ce débat permet aussi de reposer la question de l'entrée de la Turquie de manière différente : selon le Rapport stratégique sur l'élargissement de l'Union le terme européen mélange des éléments géographiques, historiques et culturels qui contribuent tous à l'identité européenne. [...]
[...] Il s'agit de trouver un juste milieu entre culture commune monolithique figée mais plus facilement accessible et une protection exacerbée des diversités culturelles qui favoriserait la résurgence de communautaires. Cette politique ambitieuse permettrait la consolidation d'une base commune de connaissances et de valeurs propres à l'aire européenne. Celle- ci stimulerait l'apparition d'espace d'échanges entre citoyens européens qui se connaîtraient mieux ; cet espace public constituant alors l'embryon d'une “Europe des hommes” plutôt que L'Europe des nations” actuelle. Cette mise en commun est un pas vers une opinion publique européenne. [...]
[...] Cette tendance à l'émergence spontanée de mouvements culturels européens va s'exprimer avec vigueur aux 19ème et 20ème siècles. La fin de ce qu'alors on espérait être la der des ders coïncide ainsi avec l'émergence du dadaïsme, nouveau courant artistique qui témoigne d'une volonté de rompre avec les valeurs, les formes d'expressions traditionnelles. Ce courant est incontestablement européen : après avoir été fondé à Zurich, par l'écrivain d'origine roumaine Tristan Tzara, il se développe en France entre autres sous le pinceau de Picabia, en Allemagne par des artistes comme Schwitters, touche ensuite l'Europe de l'Est (Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Hongrie Peu de temps après, le surréalisme gagne à son tour l'Europe des artistes (William Black, Klimt, Moreau, Miro ) Après la seconde guerre mondiale, l'Europe sort divisée ; ce qui lui reste comme le souligne le philosophe Denis de Rougemont, c'est sa culture, une certaine mesure de l'homme La création du Conseil de l'Europe en mai 1949 est une première pierre posée sur le chemin d'une Europe de la culture. [...]
[...] Les enjeux politiques de l'action culturelle européenne Jean Monnet aurait dit, au soir de son oeuvre, que, si tout était à recommencer, il reconstruirait l'Europe en commençant par la culture et non par l'économie. Cette petite phrase, fût-elle apocryphe, est néanmoins révélatrice d'une frustration générée par une Europe qui apparaît lointaine et dominée par l'économie, une Europe de bureaucrates qui semblent vouloir imposer leur gestion des marchés sans chercher à comprendre les aspirations des populations européennes. Ce souhait d'une Europe plus proche des hommes fondée non plus sur une gestion économique commune, mais sur des valeurs et un projet soulignant à la fois les points communs et l'enrichissement par la différence pourrait être le biais de la construction politique de l'Europe. [...]
[...] Une nouvelle approche de la culture apparaît avec l'affirmation d'une volonté proprement politique comme le montre l'appui sur le préambule du traitée de Maastricht qui définit comme objectif majeur d'établir une citoyenneté commune aux ressortissants [des états-membres] Les remaniements du projet par le parlement l'orientent cependant vers une plus grande participation des citoyens à l'encontre d'une politique jugée trop centralisante et atténuent l'aspect politique du programme : on parle ainsi d'action et non de politique culturelle. On peut alors regretter que les actions de grande envergure soient par conséquent moins nombreuses et visibles (e.g. capitale européenne) du fait d'un budget réduit. La politique culturelle européenne promeut paradoxalement la valorisation de la diversité des cultures et celle d'une identité européenne commune dès le traité de Maastricht. Des difficultés apparaissent ainsi quant à la conciliation de l'unité/diversité des cultures au sein des actions. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture