« Je me marierai dès que je pourrai le faire sans inconvénients pour mon peuple, dit elle. Je ne peux vous en dire plus pour l'instant. Et j'espère avoir des enfants, sinon je ne songerai pas à me marier […]. Soyez sûrs que tout sera fait pour votre sûreté, mais que je n'entends pas être contrainte ni bousculée. Il est sans exemple que les pieds prétendent diriger la tête, bien que je ne sois qu'une femme. Dieu merci, j'ai assez de qualités pour pouvoir gagner ma vie dans n'importe quel pays de la chrétienté, si j'étais chassée de mon royaume en jupon. » C'est en ces termes que la reine Elisabeth I s'adresse à son Parlement le 5 novembre 1566 avant d'interdire à la délégation de reprendre la discussion au sujet de la succession. Le Parlement rappelait en effet à reine qu'il était temps qu'elle se soucie sérieusement et rapidement au mariage pour assurer la succession au trône mais aussi et surtout la sécurité du royaume. Cette citation témoigne avec justesse non seulement de l'assurance et de l'autorité de la reine mais elle éclaire de surcroît les relations qu'entretenait cette dernière avec le Parlement. Dès le début du XVIe siècle avec Henry II jusqu'au règne d'Elisabeth, le Parlement à toujours eu une influence grandissante et une place primordiale dans l'organisation du gouvernement anglais. L'institution parlementaire a été volontairement sauvée et développée par la volonté même des souverains. Le Parlement comprend, par ordre de prestige, d'importance et de pouvoir les Lords et les Communes. Il est traditionnellement perçu comme le représentant de la volonté de la nation et est appelé à définir les règles de la succession royale dès 1534, invité à ratifier, voire a définir les statuts de la religion nouvelle. Le Parlement a donc un rôle majeur pour le royaume anglais. Mais le Parlement n'est pas à proprement parler un « contre-pouvoir » de la royauté comme il est parfaitement possible de le voir au sein de cette seule citation. En effet, la reine s'oppose ouvertement au Parlement et refuse catégoriquement d'aborder le sujet sans qu'elle ne le décide elle-même. On comprend ainsi qu'Elisabeth n'a aucunement l'intention de partager son autorité avec ce qu'elle va jusqu'à qualifier de « pieds » (« les pieds prétendent diriger la tête »). Elle donne ainsi clairement sa vision du Parlement qu'elle considère comme étant une d'influence largement inférieure à la sienne et remet ainsi en cause leur liberté de parole. Elle se présente comme une reine mais surtout comme une femme est digne qui ne laissera pas sa conduite être dictée et cela même si elle doit être « chassée de son royaume en jupon ». Cependant, cette dernière idée révèle également qu'Elisabeth n'est pas aussi invulnérable que l'on pourrait penser. En effet, si de sa propre initiative, elle fait allusion à la possibilité qu'elle puisse elle aussi avoir recours à l'exil, c'est qu'elle a conscience qu'avec la montée en flèche des complots contre sa personne, elle n'est pas à l'abri de perdre sa situation. Elle a donc déjà envisagé une fin de règne forcé. Ainsi sa relation avec le Parlement ne va pas de soi. Certes, ce dernier ne semble avoir qu'un rôle annexe dans les décisions importantes que doit prendre Elisabeth mais concrètement son influence est telle que la situation d'Elisabeth sur le trône peut elle-même être remise en cause par le peuple en cas de mauvaise relation entre la Couronne et le Parlement. Au-delà de son rôle politique le parlement n'aurait-il pas que l'on pourrait qualifier de fonction diplomatique ? Ne peut-on pas parler du Parlement comme d'un outil qu'utilise Elisabeth pour légitimer ses actions ?
[...] Mais Elisabeth a fréquemment recours aux emprunts forcés. En 1589, cinquante mille livres sont ainsi empruntées, l'équivalent d'une année d'impositions accordées par le Parlement. Ainsi les finances du royaume ont été très mal gérées. C'est l'ombre du règne d'Elisabeth qui laisse à son successeur un royaume bien mois prospère qu'il n'y semble. Le Parlement a été moins sollicité sous Elisabeth que sous les règnes précédents. Il était encore une institution de second rang placée dans la main de la reine qui en disposait à sa guise. [...]
[...] Le Parlement a donc un rôle majeur pour le royaume anglais. Mais le Parlement n'est pas à proprement parler un contre-pouvoir de la royauté comme il est parfaitement possible de le voir au sein de cette seule citation. En effet, la reine s'oppose ouvertement au Parlement et refuse catégoriquement d'aborder le sujet sans qu'elle ne le décide elle-même. On comprend ainsi qu'Elisabeth n'a aucunement l'intention de partager son autorité avec ce qu'elle va jusqu'à qualifier de pieds les pieds prétendent diriger la tête Elle donne ainsi clairement sa vision du Parlement qu'elle considère comme étant une d'influence largement inférieure à la sienne et remet ainsi en cause leur liberté de parole. [...]
[...] Quoi qu'il en soi, Elisabeth rompt avec la tendance traditionnelle de faire appel systématiquement au Parlement. Disposant du droit de convoquer ce dernier à son gré, elle n'hésitait pas à ne pas le réunir pendant plusieurs années consécutives. Mais après les règnes d'Henry VIII, d'Edouard VI et de Marie Tudor, Elisabeth savait qu'aucune grande réforme, aucune grande mesure législative ne pourrait se faire sans l'accord du Parlement. Au lieu de percevoir le Parlement comme une force, elle le voyait comme une fatalité. [...]
[...] Depuis l'avènement même de Henri VII, les Tudor ont dû leur pouvoir à l'acquiescement du Parlement ; le divorce de Henry VIII pose le problème de la succession et c'est encore au Parlement que le souverain songe pour établir une règle de succession indiscutable et fonder solidement la légitimité des droits de ses enfants : dès 1534, le Parlement vote une Act reconnaissant la validité du mariage du roi et d'Anne Boleyn et des droits successoraux de leur progéniture. Pourquoi ne pas se contenter d'une monarchie absolutiste ? Pourquoi cette conciliation avec l'institution ? L'objectif est d'assurer leur autorité personnelle en autorisant une autre force qui sera chargée de légitimer les actions de la Couronne. Le rapprochement du roi et du Parlement est perçu comme un rapprochement du roi à la nation. Le Parlement s'affirme en quelque sorte comme un juge. S'il acquiesce, l'action du roi se considérée légitime. [...]
[...] Dans la complicité qui s'établit entre le roi et le Parlement réside la force principale de la dynastie. Cependant, Elisabeth n'entretient pas les mêmes relations avec le Parlement que ses prédécesseurs et semble au contraire considérer la convocation de Parlement comme étant une contrainte. Elle y fait appel qu'en dernier recours. Cependant, contrairement, à la relation qu'entretenait le Parlement avec les autres Tudor, on se souviendra des relations entre Elisabeth et le Parlement comme particulièrement chaotiques II. Relations conflictuelles entre les pieds et la tête A. [...]
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