L'électeur a tous les maux ! Quand il vote vert, on lui reproche de voter blanc. S'il s'abstient, il ne croit plus en la démocratie. Il vote tantôt à droite, tantôt à gauche et bientôt on l'étiquettera d'être de l'extrême centre. Il ne s'identifie plus aux partis traditionnels, il est plus individualiste, plus volatile et il peut même être protestataire… Et par-dessus tout, on se questionne à savoir s'il fait ses choix de façon rationnelle.
La question ayant été abordée d'abord aux Etats-Unis dans les années 1950, la rationalité de l'électeur continue d'être au centre des analyses des comportements politiques du citoyen. Bien que le concept ne soit pas né d'hier, la notion d'électeur rationnel apparaît souvent comme étant assez vaporeuse, sans quel le temps ait clairement définit ses contours. On se demande alors qu'est-ce que peut bien être la rationalité de l'électeur mais également si l'électeur est rationnel selon ce qu'on aura convenu d'appeler rationalité.
C'est le thème que nous aborderons dans ce texte. Dans une première partie, il sera important de définir ce qu'on entend par « électeur rationnel » notamment en définissant deux variables incontournables dans l'explication de la rationalité de l'électeur : l'information et l'intérêt. Dans un second temps, nous étudierons les deux côtés de l'échiquier à savoir, les tenants de l'irrationalité de l'électeur et ceux qui croient plutôt en une certaine rationalité de l'électeur.
[...] Loïc BLONDIAUX, op. cit. p LAZARSFELD et al., op cit., p.100. Bernard MANIN, Le concept d'opinion publique dans B. MANIN, P. PASQUINO, D. REYNIÉ, Opinion publique et démocratie, Paris, CNRS p Samuel POPKIN, The reasoning voter, Chicago, University of Chicago Press, 1991. [...]
[...] On constate ici que l'intérêt à la politique peut certainement être un facteur clé dans la rationalité de l'électeur L'électeur est-il rationnel ? Après avoir approfondi les notions d'information et d'intérêt dans l'explication du concept de rationalité de l'électeur, il est maintenant venu le temps d'attaquer la question centrale de ce texte, en l'occurrence, l'électeur est-il rationnel ? Sans prétendre dresser un panorama historique complet du thème de la rationalité de l'électeur comme l'a fait Loïc Blondiaux dans Mort et résurrection de l'électeur rationnel, les métamorphoses d'une problématique incertaine[5], nous résumerons plutôt les idées débattues en les classant dans deux sections, une première qui prétend que l'électeur n'est pas compétent et une seconde dans laquelle l'électeur apparaît plutôt comme un acteur rationnel Pessimisme : l'électeur n'est pas compétent Dans The American voter[6], Angus Campbell, Philip Converse, Warren Miller et Donald Stokes dressent un portrait très sombre des électeurs américains. [...]
[...] La question est incontournable. Fortement liée aux notions de démocratie et de citoyenneté, la rationalité de l'électeur se situerait aujourd'hui quelque part entre le concept français de compétence et son penchant américain de sophistication C'est deux concepts pouvant être rapidement résumés en une norme démocratique [ ] d'un citoyen éclairé, informé, intéressé par la chose publique et investi dans les affaires de la cité[1] comme l'écrit Vincent Tiberj dans Compétence et repérage politiques en France et aux Etats-Unis : une contribution au modèle de l'électeur raisonnant On prendra donc pour acquise cette conception de l'électeur qui fait, au bout d'un processus de réflexion, un choix conscient avec l'information dont il dispose. [...]
[...] Ces derniers fournissant sous plusieurs formes (sondages, débats, reportages) de l'information quant aux enjeux et aux candidats en présence lors de la campagne. L'électeur est ainsi confronté à une multitude de sources qu'il jugera pertinentes ou non dans l'élaboration de son choix. Sans négliger toutefois qu'il peut n'être exposé qu'à un minimum d'information. Dans The people's choice, Paul Lazarsfeld relativise l'effet de l'information sur les choix de l'électeur. Il explique entre autres que l'exposition à l'information n'accompagne pas nécessairement de changement d'orientations politiques. [...]
[...] Dans The reasoning voter, Samuel Popkin vient également donner sa chance au concept d'électeur rationnel. Il écrit : Il est facile de démontrer que les Américains ont une connaissance limitée des faits élémentaires relatifs à leurs gouvernements et aux débats politiques du moment. Mais évaluer les citoyens seulement en termes de leur connaissance factuelle n'est peut-être pas un bon moyen d'évaluer leur compétence en temps qu'électeur.[10] Ce qui amène à croire que pour être rationnel, l'électeur n'a pas à être politologue, sociologue, philosophe ou journaliste. [...]
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