On trouve dans l'actualité récente deux évènements qui peuvent paraître contradictoires : d'une part, Ségolène Royal, qui obtient l'investiture au Parti Socialiste, se trouve être la première femme en position de gagner les élections présidentielles. D'autre part, un rapport public publié par le ministère des affaires sociales révèle qu'une femme meurt en France tous les trois jours sous l'effet de violences conjugales.
Ces deux actualités illustrent un paradoxe : à une période où l'essentiel des droits de la femme a été reconnu juridiquement en France et où des avancées considérables ont été observées en matière notamment de droits politiques, de nombreuses pratiques discriminantes persistent et demeurent impunies.
Le problème que pose un travail sur les droits de la femme en France est donc celui de l'effectivité de notre système juridique, ou, plus largement, de la capacité du droit à transformer la société.
J'ai choisi pour traiter ce problème un plan simple. L'étude du passage du silence des femmes à la revendication et à la conquête de droits ouvrira sur une analyse du caractère inachevé de cette conquête.
[...] Le fait que le droit apparaisse comme la technique principale de libération des femmes traduit une profonde confiance dans la capacité du droit à transformer la société. Un certain nombre de textes de portée symbolique ou contraignante sont venus reconnaître les droits des femmes au niveau international comme au niveau interne, du préambule de la constitution de 1946 (qui a aujourd'hui valeur constitutionnelle) à la convention sur l'élimination des discriminations envers les femmes de 1995. Au niveau législatif, on peut distinguer trois phases : jusqu'en 1945, l'égalité des droits civils et politiques (droit à l'éduction, à l'entrée dans la profession, et droit de vote très tardivement à la libération) ; dans les années 60-70, des revendications liées à la maîtrise du corps sont satisfaites (avortement, contraception, création d'institutions qui libèrent la femme en assurant la prise en charge sociale des enfants comme la garderie) ; aujourd'hui, une troisième vague avec de nouveaux textes sur l'égalité au travail, la violence envers les femmes et la parité. [...]
[...] Où commence une discrimination ? Où commence une image dépréciative de la femme ? Une féministe radicale et un antiféministe radical ont deux visions très différentes de la frontière. A. Résistances sociales, résistances culturelles A ces difficultés liées à la structure juridique s'ajoute des résistances sociales et culturelles. Il est difficile d'appréhender ces résistances car elles transcendent les clivages politiques et sociaux. Pour bien comprendre, je vais prendre l'exemple de l'IVG développé par Janine Mossuz-Lavau dans le siècle des féministes. [...]
[...] J'ai choisi pour traiter ce problème un plan simple. L'étude du passage du silence des femmes à la revendication et à la conquête de droits ouvrira sur une analyse du caractère inachevé de cette conquête Du silence à la conquête de droits Silence et invisibilité des femmes Quand on tente de replacer dans une perspective historique la question du droit des femmes en France, on se heurte à un problème majeur, illustratif de la condition des femmes par le passé : celui des sources. [...]
[...] Il est possible par exemple dans la loi sur la parité d'acheter un droit à discriminer comme le font un certain nombre de partis en préférant payer une amende plutôt que d'appliquer les règles. Enfin, les textes juridiques ont des difficultés à s'immiscer profondément dans la sphère privée de la famille ou la sphère professionnelle. Les femmes ont de plus le sentiment de risquer beaucoup en portant plainte. Par ailleurs se pose le problème des frontières du juridique. Les droits de l'homme et les droits de la femme constituent un terrain où le droit recouvre la morale. Mais tout ce qui est immoral n'a pas pour autant vocation à devenir illégal. [...]
[...] La perspective universaliste est omniprésente. Cette perspective s'acclimate mieux à la spécificité du républicanisme français, hostile aux revendications des groupes basés sur leur différence. Mais, en retour, et je conclurai sur cette hypothèse, il n'est pas impossible de penser que la méfiance républicaine envers les différences entre citoyens et la faiblesse du credo différentialiste ait eu une influence négative sur l'application des textes législatifs visant une catégorie spécifique du corps social : les femmes. Il y aurait donc une résistance liée à l'idéal républicain qui ne considère les citoyens qu'arrachés à leurs appartenances, qu'elles soient culturelles ou sexuelles. [...]
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