Le débat sur la discrimination positive ne date pas d'hier. En effet, dès les années 80 en France et la création d'un concours parallèle à l'entrée de la prestigieuse ENA pour diversifier l'origine sociale de ses élèves, la discrimination positive a été l'objet de nombreux débats et est devenu un enjeu politique majeur. Néanmoins, il serait erroné de penser que ce concept serait une invention française. En effet, l'Inde, marginalement, et les Etats-Unis de manière plus répandue, sont perçus comme les investigateurs des politiques d' « affirmative action » pour reprendre le terme américain, politique mise en place dans les années 60 dans un contexte de lutte des populations Noire – Américaines pour l'attribution de droits civiques (mouvement du Civil Right Act). Dans ce contexte particulier, l'affirmative action définira des mesures compensatoires ciblant une partie de la population pour compenser l'ensemble des préjudices subis dans le passé. La politique est là un moyen de rétablir une égalité compromise par une histoire parfois chaotique.
Le terme de discrimination positive se veut donc être la traduction française de l'affirmative action américaine, même si ici, on ne pourra rapprocher les deux conceptions ; en effet, la version américaine se base sur des critères que la France refuse de prendre en compte (critères ethniques et raciaux). Il n'est donc ici question que de la conception française des mesures compensatoires, et plus précisément de l'articulation avec la tradition républicaine française résumée par notre devise, « liberté, égalité, fraternité ». Les partisans de cette politique font valoir que le « volontarisme républicain » maintes fois mis en avant par les politiques commande de lutter activement contre les inégalités et autres discriminations, indéniables aujourd'hui ; ses adversaires lui opposent « les principes républicains » au regard desquels la suspension de l'égalité formelle imposée par la loi ainsi que l'assignation automatique à une appartenance particulière apparaissent tout bonnement inadmissibles. En droit public français, la majorité des auteurs et juristes estiment que les discriminations positives n'ont pas droit de cité en France ; elles ne seraient tout bonnement pas adaptées au modèle français basé sur l'idéal d'égalité. Dès lors, quelle position adopter, lorsque l'on sait que la tradition juridique française promeut l'égale liberté des individus et refuse le concept de « minorités », et semble donc faire barrage à la revendication de droits spécifiques à certains groupes, l'essence même de la discrimination positive ? Ainsi, comment articuler le principe d'égalité, principe fondateur de notre République, le droit, censé le garantir, et la discrimination positive, une méthode consistant à instituer une inégalité formelle en vue de parvenir à une égalité réelle des chances ?
[...] Donc le législateur ne peut faire de discriminations qui porteraient atteinte à ces prohibitions. Mais, pour le reste, il est absolument libre de faire toutes les discriminations qu'il juge nécessaires Le droit sait donc jouer des silences de la loi Vers une redéfinition de l'égalité républicaine L'égalité est un principe directeur du droit français. En tant que telle, elle est le point de rencontre entre des valeurs et des règles de droit. De fait, l'égalité est un principe changeant, mouvant, s'adaptant aux évolutions des mœurs et des attentes de la société. [...]
[...] Le silence de la loi a été ici favorable à une relecture puis à une redéfinition de l'égalité, passant ainsi d'une égalité absolue et formelle au principe d'équité, selon lequel chacun peut prétendre à un traitement juste, égalitaire et raisonnable Le législateur peut ainsi écarter les règles légales lorsqu'il estime que leur application stricte aurait des conséquences inégalitaires ou déraisonnables Le droit a donc permis, via la discrimination positive, le passage d'une utopie (égalité arithmétique) à la mise en place de moyens pour tendre au plus près vers cet idéal (égalité géométrique). Bibliographie Le communautarisme, Mythes et réalités L. BOUVET, éd. Lignes de Repères p.157 La discrimination positive, G., éd. [...]
[...] Ainsi, le Conseil Constitutionnel à plusieurs reprises, affirmé la conformité de certaines propositions s'apparentant à de la discrimination positive, comme le cas de la Corse (possédant un statut fiscal particulier du fait de son insularité) ou encore celui de la Nouvelle-Calédonie. Le traitement préférentiel est ici justifié par une localisation géographique particulière. Le Conseil s'est également prononcé en faveur d'une distinction sociale dans le domaine de l'emploi, considérant par exemple l'âge des salariés ou encore la présence de certaines caractéristiques sociales sans pour autant préciser lesquelles. [...]
[...] Les paradoxes de l'égalité : une réponse apportée par le droit ; la discrimination positive, une nouvelle approche de l'égalité Une constitutionnalisation progressive L'égalité à la française est souvent apparentée à la formule réductrice à situation équivalente, traitement équivalent ce qui n'implique pas qu'à situation différente, il y ait traitement différent, Mais une distinction s'avère nécessaire pour comprendre la possible mise en place de différentiations malgré les principes juridiques précédemment exposés : le principe est celui de l'égalité, et non de l'égalitarisme. Face à la multiplication des inégalités et des discriminations, le droit ne peut rester indifférent et prôner des principes sans en permettre l'application et l'effectivité. [...]
[...] Dès lors, quelle position adopter, lorsque l'on sait que la tradition juridique française promeut l'égale liberté des individus et refuse le concept de minorités et semble donc faire barrage à la revendication de droits spécifiques à certains groupes, l'essence même de la discrimination positive ? Ainsi, comment articuler le principe d'égalité, principe fondateur de notre République, le droit, censé le garantir, et la discrimination positive, une méthode consistant à instituer une inégalité formelle en vue de parvenir à une égalité réelle des chances ? I. [...]
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