On constate depuis maintenant deux décennies la préoccupation croissante autour de l'intégration des personnes « issues de l'immigration », qui remet ainsi à l'ordre du jour la question du « vivre ensemble ». On observe ainsi l'importation en France du discours multiculturaliste, par la conversion de nos élites politico-intellectuelles à ces principes venus de l'Amérique du Nord principalement. Le multiculturalisme est une notion assez vaste qu'on peut globalement définir comme un programme politique voué à la valorisation et à la promotion du pluralisme culturel au sein d'une société donnée.
Il est vrai que la France, comme d'autres nations, est aujourd'hui au cœur de la période postcoloniale de son histoire qui impose un retour sur soi douloureux et toujours pas assumé. Très récemment, Yazid Sabeg, commissaire à la diversité du gouvernement Sarkozy, a proposé un projet de loi visant à doter la France d'outils ressemblant à des statistiques ethniques afin de mener une politique, sinon de "discrimination positive", du moins d'"action positive". On voit donc l'intérêt que porte le gouvernement aux questions liées à la diversité culturelle.
Mais la thèse multiculturaliste est aussi en confrontation avec l'idéal républicain d'égalité puisqu'elle incite à une rupture de cette égalité et à une refondation de l'idée de méritocratie. En quoi le multiculturalisme s'oppose-t-il au principe républicain d'égalité ?
Si l'émergence de la notion de multiculturalisme dans la société française se traduit par l'apparition d'un véritable programme politique, nous verrons que celui-ci créé une rupture avec le modèle républicain d'égalité.
[...] L'individuation des cultures Un élément important qui se dégage de la doctrine multiculturaliste des pays pluralistes contemporains c'est leur dimension individualiste. En effet, le multiculturalisme n'est pas un projet de reconnaissance culturelle étendue à quelques communautés historiques, mais à l'ensemble des individus, quelque soit leur origine. Dans les sociétés démocratiques, il n'existe pas aujourd'hui de communauté, au réel sens du terme, comme il a pu en exister du temps des empires coloniaux. Il existe en outre des associations volontaires d'individus, souvent hétérogènes, ou coexistent différentes conceptions et différentes réinterprétations d'une même culture originelle. [...]
[...] Désormais les hommes sont égaux du fait de leur qualité d'être humain, mais ils le sont aussi devant la loi et sont tous des citoyens libres et souverains. On constate donc l'idée d'égalité totale. Toutefois, l'idéal républicain poussera encore plus loin ce principe de triple égalité (morale, juridique et politique) en l'assortissant de celui d'égalité des chances. En effet, tel qu'elle se formule, l'idée d'égalité dont héritent les premières républiques considère les hommes qu'en tant qu'individus citoyen. L'Etat ignore donc toutes les frontières infra politiques telles que la frontière religieuse ou ethnique par exemple et ignore donc les cadres communautaires en ne reconnaissant que des citoyens. [...]
[...] Il aide ainsi les minorités culturelles à préserver leur particularisme, luttant contre le racisme et en faveur de l'inclusion des minorités ethnoculturelles. C'est dans ce but que des programmes de sensibilisation multiculturelle pourront être engagés. Dans le domaine de l'éducation scolaire notamment. La France autorise par exemple l'enseignement de langues régionales dans les établissements scolaires à condition que le français reste la langue officielle. De plus, le principe de reconnaissance de la légitimité des cultures s'applique également à l'enseignement de l'histoire et de la littérature. Ces dernières sont en effet propices à rehausser le prestige en faveur des minorités culturelles. [...]
[...] De ce fait, l'application du principe d'égalité des chances annulerait les inégalités de patrimoine et d'accès au service que propose la société (information, culture, loisirs C'est sur ce principe d'égalité des chances que se fonde la légitimité de l'Etat providence. C'est donc pour ainsi dire toute cette idéologie de l'égalité (l'égalité morale, juridico-politique et sociale) que va remettre en cause le multiculturalisme, en accordant davantage de reconnaissance aux communautés par les institutions. Pourtant, ses défenseurs affirment être motivés par la quête d'égalité. Il est donc nécessaire de confronter le modèle républicain d'égalité avec la discrimination positive, qui est ici le principal levier d'action du multiculturalisme. [...]
[...] On voit donc l'intérêt que porte le gouvernement aux questions liées à la diversité culturelle. On constate plus généralement l'intérêt de l'ensemble des Etats pour cette question. En atteste l'adoption par la conférence générale de l'UNESCO d'une convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles en 2005. Mais la thèse multiculturaliste est aussi en confrontation avec l'idéal républicain d'égalité puisqu'elle incite à une rupture de cette égalité et à une refondation de l'idée de méritocratie. En quoi le multiculturalisme s'oppose-t-il au principe républicain d'égalité ? [...]
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