Au lendemain de l'effondrement du bloc soviétique, la Constitution de 1993 institue en Russie un régime présidentialiste voire ultra-présidentialiste, c'est-à-dire un régime politique dans lequel le Président dirige effectivement la politique du pays et a pour cela de très larges attributions. Celles du Président de la Fédération de Russie sont exposées dans les articles 80 à 93. Mais, si la Constitution est fondée sur des principes démocratiques, la pratique s'avère souvent différente. Après le gouvernement de Boris Eltsine, marqué selon certains par l'archaïsme de la vie politique, vient le temps de Vladimir Poutine. Nommé Premier ministre en août 1999, il accède à la présidence en mars 2000 et la gardera jusqu'en 2008, date à laquelle il redeviendra Premier ministre sous la présidence de son successeur désigné, Dimitri Medvedev. Vladislav Sourkov, conseiller politique de Poutine à partir de 2006, décrit le régime comme une « démocratie souveraine » en réponse aux critiques occidentales, qu'il définit comme un « mode de vie politique de la société, dans lequel le pouvoir, ses organes et ses actions sont choisis, formés et dirigés uniquement par la nation russe, dans toute sa diversité et son unité afin d'atteindre le bien-être matériel, la liberté et l'égalité de chaque citoyen, des groupes sociaux et des peuples qui la composent ».
[...] Peu après son élection, Vladimir Poutine signe un décret reconnaissant l'immunité à vie du premier Président russe, Boris Eltsine. On note aussi la soumission de la Douma qui peu à peu se transforme en véritable chambre d'enregistrement des programmes gouvernementaux et des lois proposés par le Président, devenant ainsi un instrument du pouvoir exécutif. De la même manière, les tribunaux font preuve de bonne volonté puisque, depuis la vague de terrorisme, les juges des Cours suprêmes sont nommés par le Haut Collège de qualification des juges, institution dont la plupart des membres sont nommés par le Président lui-même (en violation de l'article 10 sur l'indépendance des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire). Enfin, la Cour constitutionnelle et la Cour suprême avalisent les choix de l'exécutif, confirmant ainsi l'abandon de leur rôle de contrôle indépendant. La lutte contre le terrorisme notamment, justifie ce processus de concentration des pouvoirs exécutifs au Kremlin. (...)
[...] Il reste à savoir si cela nécessite forcément une dérive présidentialiste voire même autoritaire du pouvoir. En effet, étant donné l'état des libertés et le caractère peu compétitif des élections, on peut parler d'un présidentialisme autoritaire Selon Marie Mendras : ni le président Poutine, ni ses ministres et conseillers proches ne cherchent à convaincre que leur pays reste sur la «voie de la démocratisation» Certes, on maintient, à intervalles réguliers, des élections au suffrage universel pour illustrer le caractère démocratique du régime. [...]
[...] En mars 2000, Poutine déclare qu'il faut restaurer la verticale du pouvoir, ce qui se traduit par un renforcement du centre sur les autres régions du pays. Cette volonté de reprise en main des régions donne lieu à la création de sept districts fédéraux, à la tête desquels le Président place des superpréfets Mais, comme l'explique Marie Mendras en 2001, en pensant la gouvernance dans un esprit de contrôle et de limitation des initiatives locales et individuelles, l'équipe Poutine révèle une attitude tout en défense et en repli sur des méthodes obsolètes On le voit également à travers l'instrumentalisation du jeu électoral qui prend forme dans l'adoption puis la modification de la loi sur les partis politiques et de la loi électorale. [...]
[...] Ainsi, le nombre de formations politiques chute radicalement entre 2001 et 2007, passant de 190 à une quinzaine. Plus aucun parti d'opposition n'a réellement les moyens d'émerger, et le pluralisme politique en ressort donc profondément limité. Russie unie est la principale organisation politique du pays, mais Poutine, s'estimant au dessus des partis, n'en est pas membre. Ces révisions des lois électorales affaiblissent encore les chances pour un opposant au régime de siéger à la Douma et sont contraires à la Constitution qui garantit le multipartisme. [...]
[...] Enfin, la Cour constitutionnelle et la Cour suprême avalisent les choix de l'exécutif, confirmant ainsi l'abandon de leur rôle de contrôle indépendant. La lutte contre le terrorisme notamment, justifie ce processus de concentration des pouvoirs exécutifs au Kremlin. Certes, le principe constitutionnel de l'alternance au pouvoir est formellement respecté par Poutine. Mais sa nomination en tant que Premier ministre, après deux mandats successifs montre la volonté de ne pas enfreindre la Constitution et les règles de non-cumul des mandats qui y sont exposées afin de maintenir ce qui n'est plus qu'une apparence démocratique. [...]
[...] Le vote des Russes est alors presque inutile, seule compte leur participation : Poutine est en effet réélu avec 71,3% des voix, le taux de participation s'élevant à 65%. Par ailleurs, le vote est parfois particulièrement discrédité lorsqu'il donne au président sortant plus de 90% des suffrages, comme c'est le cas dans certaines républiques. L'OSCE note d'ailleurs que les élections ont été réalisées avec professionnalisme ( ) mais que le processus dans son ensemble ne respecte pas les principes d'une élection démocratique saine. [...]
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