18 juin 1954 ? 6 février 1955 : l'influence de Pierre Mendès France sur la vie politique française va bien au-delà de ces sept mois d'exercice du pouvoir, et la parenté avec le mendésisme a été revendiquée par des hommes politiques d'horizons différents.
On s'intéressera ici plus particulièrement à la façon dont Pierre Mendès France s'est situé par rapport à la construction européenne naissante, et à la vision de l'Europe qu'il a pu développer. Du rejet de la Communauté européenne, Mendès France a gardé une image d'anti-européen, confortée par son refus du traité de Paris en 1951, puis des traités de Rome en 1957. Pourtant, vers la fin de 1958 et avec l'arrivée au pouvoir du général de Gaulle, Mendès France va désormais défendre une Europe supranationale, socialiste et planifiée. Comment expliquer la trajectoire de cet engagement européen ? Est-il mieux décrit en termes de rupture ou de continuité ? Si elle pointe aussi des ruptures et des contradictions, l'analyse aboutit à montrer qu'il y a bien une continuité dans cette conception, depuis les années trente jusqu'à la fin de la vie de Mendès France : celle de la défense d'une Europe sociale.
Ainsi, l'engagement européen de Mendès France a été formé en partie par la position occupée par celui-ci à un moment donné dans le champ politique, mais la conception de l'Europe par Mendès France s'inscrit surtout en rapport avec la tradition radicale et républicaine, puis dans un projet socialiste ...
[...] En montrant que ce rapport à la question européenne s'inscrit d'abord dans la tradition radicale et républicaine, puis dans un projet socialiste, l'on aboutira au contraire à montrer la continuité de la pensée de Mendès France. Une conception de l'Europe aussi inscrite dans la tradition radicale et républicaine, puis dans un projet socialiste Dès 1930, Pierre Mendès France exprime de l'intérêt pour l'intégration européenne dans son ouvrage La Banque internationale, contribution à l'étude du problème des Etats-Unis d'Europe, dans lequel il défend la création d'une banque des règlements internationaux, assortie d'une union douanière européenne, parce qu'il ne semble plus possible de régler les questions économiques et monétaires dans le cadre de la nation[14]. [...]
[...] Il en sera de même dans les années soixante, avec l'adoption par Mendès France d'une position défendant la supranationalité, contre la défense gaullienne du caractère intergouvernemental de la construction européenne. L'épisode de la Communauté Européenne de Défense souligne la part de la contingence dans l'irruption de la question européenne au cours de la carrière politique de Pierre Mendès France. Lorsqu'il arrive à la présidence du Conseil, le 18 juin 1954, Mendès France hérite d'un traité en attente de ratification depuis sa signature le 27 mai 1952. [...]
[...] On s'intéressera ici plus particulièrement à la façon dont Pierre Mendès France s'est situé par rapport à la construction européenne naissante, et à la vision de l'Europe qu'il a pu développer. Du rejet de la Communauté européenne, Mendès France a gardé une image d'anti-européen, confortée par son refus du traité de Paris en 1951, puis des traités de Rome en 1957. Pourtant, vers la fin de 1958 et avec l'arrivée au pouvoir du général de Gaulle, Mendès France va désormais défendre une Europe supranationale, socialiste et planifiée. Comment expliquer la trajectoire de cet engagement européen ? Est-il mieux décrit en termes de rupture ou de continuité ? [...]
[...] L'Europe passe alors au second plan, au profit de la recherche d'une solution négociée au Proche-Orient, où Mendès France rencontre Sadate et Begin en 1977 à Jérusalem. On a ainsi vu que la position de Mendès France face à la construction européenne est en rapport avec son appartenance partisane ou sa situation dans le champ politique à un moment donné. Avec le glissement vers la gauche du champ politique, du parti radical vers la deuxième gauche du PSA puis du PSU, Mendès France passe d'une conception confédérale de l'Europe à la défense d'une Europe supranationale, mais sociale et planifiée. [...]
[...] Pour Gilles Cophornic, on retrouve là le clivage entre la gauche et la droite du parti, entre une droite majoritaire et favorable à la construction d'une Europe libérale et une gauche minoritaire, qui se prononce derrière Pierre Mendès France pour une Europe sociale et planifiée[6]. On voit ici que la question de l'intégration européenne révèle et accentue les dissensions au sein du parti radical : pour Mendès France, défendre une conception sociale de l'Europe, c'est se positionner à gauche du parti. [...]
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