"Les nations ne sont pas quelque chose d'éternel. Elles ont commencé, elles finiront". Ernest Renan. Cette réflexion de l'un des penseurs emblématiques du fait national relève d'un constat simple : la nation est le fruit d'un contexte politique, économique et social ; en conséquence, cette entité historiquement constituée, en dépit des principes apparemment intemporels qui légitiment souvent son existence, va être amenée à disparaître.
[...] Le cadre national lui, perdu de sa pertinence, car les dynamiques de domination mais aussi celles de participation trouvent dans le local et dans le mondial des champs d'intervention plus efficaces. Face à ces mutations, de nouveaux mouvements semblent avoir esquissé le travail d'adaptation nécessaire au renouveau de l'action citoyenne. Constitués autour d'une cause précise (la lutte contre le chômage, le droit au logement, le soutien aux sans-papiers ils exercent, par leur action fortement médiatisée, une pression sur les réformateurs sociaux à l'échelle européenne. [...]
[...] La Guerre de Sécession et la Révolution française de 1848 contribuent ainsi à faire fusionner les deux notions : même si les appartenances partisanes et les solidarités communautaires d'antan persistent, les émigrés anglo-saxons comme les sujets français deviennent des nationaux et des citoyens. Cette évolution apparemment inéluctable a alimenté de façon décisive les représentations collectives et les controverses au sujet de la nation. Dans le conflit idéologique qui, dans la seconde moitié du XIXè siècle, oppose la France à l'Allemagne, le fait national et les formes concrètes de la citoyenneté deviennent un enjeu majeur. [...]
[...] S'il a été un progrès incontestable, le changement d'échelle n'a pas véritablement aboli les phénomènes d'exclusion. L'idée de nation a certes joué un rôle fondamental dans l'affirmation de l'individu-citoyen, et Frantz Fanon, à l'heure où la France disposait encore d'un Empire colonial, stigmatisait à raison l'erreur, lourde de conséquences, [qui] consisterait à vouloir sauter l'étape nationale De fait, selon lui, c'est au cœur de la conscience nationale que s'élève et se vivifie la conscience internationale Sur la culture nationale Les damnés de la terre). [...]
[...] Une telle marchandisation des rapports sociaux est également à l'origine d'un dépassement de la nation par le haut. Les faibles débouchés offerts par le cadre national à une économie de plus en plus concentrée incite les détenteurs du capital industriel et financier à franchir les frontières pour conquérir de nouveaux marchés. Dans une brochure publiée en 1916, Lénine dévoilait les caractères fondamentaux de cet impérialisme, qu'il décrit comme le stade suprême du capitalisme Si, à l'époque, cette course à l'exportation des capitaux a culminé dans le déclenchement d'un conflit planétaire, elle prend aujourd'hui la forme d'une politique de paix menée par une plus grande concertation des gouvernements et des chefs d'Etat, se concrétisant par la création d'institutions supranationales. [...]
[...] L'identification du citoyen à la cause de la nation serait ainsi parfaite. Il faut pourtant constater que la citoyenneté n'est pas souvent vécue de la sorte ; elle ne peut l'être que de moins en moins à mesure que le projet démocratique dominant s'essouffle et perd l'Etat-nation comme cadre principal. Le régime de démocratie bourgeoise, tel qu'il se généralise en Europe à partir de la fin du XVIIIè siècle, a été le promoteur le plus ambitieux d'une citoyenneté basée sur l'action et l'intégration. [...]
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