« Tout nous conduit à instituer une deuxième chambre dont, pour l'essentiel, nos conseils généraux et municipaux éliront les membres. Cette chambre complétera la première... en faisant valoir dans la confection des lois ce facteur d'ordre administratif qu'un collège purement politique a forcément tendance à négliger ». C'est ainsi que s'exprime le Général De Gaulle dans son discours de Bayeux en 1946. Dans ce discours, il définit les contours du bicamérisme de la future Ve République. Ainsi, le 4 octobre 1958, la Constitution fait le choix d'un bicamérisme imparfait. L'article 24 C de la Constitution confie alors le soin au Sénat de représenter les collectivités territoriales et les Français établis hors de France.
Cependant, le Sénat est l'institution qui fit l'objet d'un des plus importants projets de modifications constitutionnelles déposés sous la Ve République. En effet, en 1969 Charles De Gaulle propose de changer la mission du Sénat. Selon lui, «le Sénat est une institution périmée dans sa composition actuelle. Il est l'émanation des communes rurales qui étaient l'essentiel de la France au XIXe siècle. Aujourd'hui, tel qu'il est, il n'est plus qu'une assemblée qui n'a de légitimité que pour s'occuper des adductions d'eau. ». Ainsi, il proposait de confier au Sénat la représentation non seulement des collectivités territoriales mais aussi différentes catégories socioprofessionnelles. Sa réforme se basait globalement sur la fusion des rôles de représentation confiés au Sénat et au Conseil Economique et Social. Elle visait aussi à retirer au Sénat l'essentiel de ses pouvoirs puisqu'il perdait l'initiative des lois. Toutefois, le peuple refusa le référendum du 27 avril 1969 qui modifiait la composition du Sénat. Outre le fait de désavouer le Général, les Français ne voulurent pas supprimer le seul pouvoir non gaulliste de la République. Car il semble que l'annihilation de toute opposition paraissait être le but inavoué de ce projet de révision.
Néanmoins, ce débat latent refait aujourd'hui surface. En effet, depuis presque 50 ans la France a beaucoup évolué tant d'un point de vue démographique qu'économique, et il semble que le Sénat soit désormais considéré par une large frange d'hommes politiques comme un « anachronisme » voire même comme une « véritable anomalie, […] survivance des chambres hautes conservatrices ».
Il convient ici de se demander si le Sénat a encore aujourd'hui toute sa légitimité. S'interroger sur la légitimité du Sénat et sur son maintien dans notre système institutionnel, revient à se demander si la désignation des sénateurs est réellement représentative de la nation : n'est elle pas désormais anachronique et désuète ?
Pour tenter de répondre à cette question, il convient de montrer dans quelle mesure le Sénat n'assure plus son rôle de représentativité de la nation et est ainsi devenu « une pièce archéologique constitutionnelle » (I). Cependant, le Sénat reste essentiel à la représentativité de la nation d'autant plus qu'il tente de s'adapter aux nouvelles exigences de la République (II).
[...] Un mode de désignation réellement démocratique ? Une élection au suffrage universel indirect Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect par un collège de grands électeurs. Ce collège est composé des 577 députés, des conseillers régionaux, généraux et municipaux. Les Conseillers et les délégués municipaux représentent 95% de ce collège. ( sur grands électeurs). Ce mode d'élection exclut les pouvoirs émergents comme les intercommunalités de la désignation des sénateurs. Depuis juillet 2003, les sénateurs sont élus pour un mandat de 6 ans. [...]
[...] Car il semble que l'annihilation de toute opposition paraissait être le but inavoué de ce projet de révision. Néanmoins, ce débat latent refait aujourd'hui surface. En effet, depuis presque 50 ans la France a beaucoup évolué tant d'un point de vue démographique qu'économique, et il semble que le Sénat soit désormais considéré par une large frange d'hommes politiques comme un anachronisme voire même comme une véritable anomalie, [ ] survivance des chambres hautes conservatrices Il convient ici de se demander si le Sénat a encore aujourd'hui toute sa légitimité. [...]
[...] Le mode d'élection a des conséquences profondes sur le fonctionnement du Sénat. En effet, on qualifie souvent le Sénat de grand conseil des Communes de France. mais il semble que ce ne soit a posteriori uniquement pour excuser la composition du collège électoral qui y rend l'alternance impossible. En effet, la composition de ce collège a fait que depuis sa création en 1958, le Sénat a toujours connu une majorité de droite. Le collège électoral est composé à l'essentiel de conseillers municipaux qui tendent à représenter plutôt les petites communes que les grandes agglomérations. [...]
[...] Les Français de l'étranger sont quant à eux représentés par 12 sénateurs élus. Le bicamérisme n'a pas de raison d'être dans une république indivisible où les hommes naissent égaux en droit. Le Sénat a donc un souci de légitimité même s'il représente les collectivités territoriales. Au Royaume-Uni, la régionalisation est très poussée, aucune Chambre n'est pour autant chargée spécifiquement de la représentation des régions. Ainsi, le Sénat républicain est fortement critiqué quant à sa participation à la démocratie et ce d'autant plus au regard de son mode d'élection. [...]
[...] Or, le mandat des conseillers municipaux se termine en 2006. Ils ne pourront alors pas élire leurs représentants et ce d'autant plus que les élections sénatoriales ont été repoussées en 2008 en raison des présidentielles. La réforme de juillet 2003 vise à empêcher cette ineptie en modifiant le mode d'élection des Sénateurs. Cependant, la loi met en place des mesures transitoires d'ici à 2011. Certes ces dispositions rendent la situation actuelle quelque peu difficile à cerner puisque certains sénateurs sont élus pour 6 ans, d'autres pour 9. [...]
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