Quand on entend le mot « propagande », on pense immédiatement et presque naturellement aux régimes totalitaires et dictatoriaux qu'ont été les malheureuses expériences nazie, stalinienne et fasciste. Il est vrai que, pour le commun des mortels, le terme en lui-même est porteur d'un jugement de valeur très péjoratif, tel que la très grande majorité d'entre nous l'a appris au collège et au lycée.
Il ne faut cependant pas oublier que les plus illustres des démocraties ont aussi usé du procédé propagandiste : les exemples des États-Unis durant les deux Guerres mondiales sont très significatifs, en ce sens où le pouvoir a organisé à l'échelle nationale, une véritable campagne de mobilisation pour ses « boys » partis au combat. Qui a oublié Rosie la riveteuse, et son slogan « We can do it » durant la Seconde Guerre mondiale ? Jacques Ellul, dans Propagandes, parlait de « propagande d'agitation », qui vise à créer un mouvement autour d'un événement auquel la population ou sa grande partie est susceptible de participer. Prosaïquement, les circonstances exceptionnelles peuvent justifier l'usage intensif d'une propagande qui ne se cache pas et ne cache pas ses intentions, en l'occurrence, faire en sorte de gagner la guerre et prouver au monde que la démocratie n'est jamais plus forte que quand elle est menacée. Il existe pourtant au moins une propagande plus discrète dans les démocraties « en temps de paix ». Parmi ces autres avatars de la propagande, Jacques Ellul insiste sur la « propagande sociologique » ou « propagande de conformisation ». Comme son épithète l'indique, elle vise à inculquer aux membres d'un groupe déterminé, un ensemble de valeurs, un « socle commun », afin d'uniformiser ce groupe, de lui donner de la cohérence. Si le but est louable, les moyens le sont moins. La propagande est communément confondue avec l'intoxication, le formatage. S'ils s'éloignent du sens premier du terme « propagande » - issu du latin propaganda, qui doit être propagé - ces synonymes ont le mérite de dévoiler un caractère de la propagande : c'est un moyen de séduction, au sens littéral, loin de prodiguer une information exhaustive permettant au citoyen de décider rationnellement (...)
[...] En démocratie, quoiqu'on en dise, la légitimité du gouvernement se base sur le peuple. S'en attacher les faveurs obéit à un double mouvement : il faut à la fois le faire adhérer aux projets et étouffer ou dénaturer les contestations potentielles ou réelles. Sans appui populaire, le pouvoir perd sa capacité à se conformer à son agenda de mesures. Les élites politiques ont besoin de convaincre en permanence le corps électoral dans l'intention de reconquérir la majorité des votes lors de la prochaine élection. [...]
[...] Cette technique de l'écran de fumée est universelle et intemporelle, et est inévitable quelque soit le régime. Cette propagande est nécessaire et encadrée par le pouvoir : il entend en limiter les effets négatifs pour conserver l'initiative dans l'agenda politique. En France par exemple, la propagande électorale est officiellement reconnue et réglementée par le Code électoral (articles L47 à L52-3 entre autres). Une fois élues, pourquoi les élites consacrent-elles tant de temps à diffuser de la propagande en direction de leurs concitoyens ? [...]
[...] II Démocratie et propagande, un duo nécessaire et incontournable Les media sont une arme à double tranchant, magnifiquement utilisée par le pouvoir ou les groupes qui y prétendent, même dans un régime démocratique. Si elle distrait, elle permet aussi de manipuler. Les liens entre les politiques et les media sont intemporels, plusieurs documentaires ont été réalisés à ce sujet, et même quelques voix du sérail se sont dressées contre la collusion entre media et politique –notamment François Bayrou qui avait axé une partie de sa campagne présidentielle 2007 sur ce thème. [...]
[...] Ne disposant généralement pas des outils pour cela, par manque de temps, par manque de courage ou manque d'instruction, il faut les lui fournir. Et quoi de mieux qu'une histoire pour faciliter cette démarche ? Une histoire, c'est simple à écrire, c'est simple à truquer, c'est simple à utiliser, c'est simple tout court ! Une histoire permet d'émouvoir les gens, de créer des rêves, des besoins, voire des sensations. Une histoire a aussi l'avantage d'être facile à mémoriser, à intégrer, et donc de toucher toutes les couches de la population. [...]
[...] L'encadrement commence dès le plus jeune âge, avec l'éducation, qu'elle soit parentale ou scolaire. Il s'agit de faire rentrer l'enfant, l'adolescent, le jeune adulte dans un moule, un système de valeurs partagées et reconnues comme légitimes, sous-entendu qui ne mettent pas en péril l'intégrité de la société et de son gouvernement, fût-il démocratique et/ou libéral. Quels exemples frappants que ceux de la punition parentale ou de la retenue scolaire ! Naturellement, l'encadrement n'est pas que répressif, il se fait plus insidieux pour encore plus d'efficacité, dans une logique de conformisation des composantes de la société. [...]
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