Terme éculé, abondamment employé sans pour autant être clairement défini, le terrorisme reste un concept peu clair à l'usage délicat. Si le suffixe –isme semble lui conférer le statut de théorie ou de système figé, le vocable n'en recouvre pas moins une réalité changeante, dont on est encore incapable de déterminer précisément les caractéristiques et les contours. L'aspect inattendu, monstrueux et révoltant de la terreur suscite à la fois la fascination pour ce qui pourrait sembler relever de l'inhumain mais également, en conséquence, la difficulté d'une interprétation rationnelle du phénomène. Or la réalité terroriste est aussi insaisissable que sa définition est cruciale pour qui veut prétendre lutter contre cette menace effrayante que d'aucuns considèrent comme le fléau de notre époque. Mais cette définition reste polémique, tant la notion est chargée de jugement moral et de valeur affective. Si comme le suggère le sociologue Anselm Strauss, « un nom est un vase dans lequel celui qui nomme verse ses évaluations conscientes ou inconscientes », comment nommer cette violence particulière en évitant l'écueil de la dénonciation ?
[...] Il devient plus que jamais impératif de s'accorder sur la réalité que recouvre le vocable terrorisme Toute tentative de définition se heurte aux mêmes limites : elle est soit trop précise pour couvrir toutes les formes de terrorismes, soit trop large si elle se veut plus compréhensive, elle devient alors indistincte d'une autre notion, celle de violence politique, ou tautologique est terroriste tout régime basé sur la terreur Le terrorisme est une réalité protéiforme, qui s'adapte et épouse les structures de la société dans laquelle elle évolue. Il convient donc, si l'on veut chercher ce qui définit le terrorisme, de mener une réflexion sur la relation bilatérale qu'il entretient avec notre société. 3. Le seul constat possible invite à se résigner au principe de précaution : un type de violence politique inédit et révélateur de notre société 1. Une arme rhétorique Le terme même de terrorisme, si sa définition reste floue n'en demeure pas moins une arme redoutable dans la lutte rhétorique. [...]
[...] Peut-on définir le terrorisme par l'intimidation, la guerre psychologique et reléguer ainsi les objectifs au second ordre ? Pour certains le terrorisme n'est qu'un balbutiement politique sans réelle doctrine, qui se baserait uniquement sur la violence intimidante mais il semble difficile d'appliquer ce concept à toutes les formes de terrorismes dont certaines ont une réelle visée politique. Ou faut-il se baser principalement sur la méthode particulière des terroristes ? Ceci nous inviterait à dresser une typologie de ce qui est ou n'est pas un acte terroriste : attentat, assassinat, détournement d'avion, prise d'otage. [...]
[...] La condamnation morale est certainement la principale caractéristique du concept. Désigner l'opposant de terroriste c'est donc légitimer son action contre lui, action dont les moyens ne sauraient être limités aux moyens traditionnels : aux grands maux, les grands remèdes. On assiste alors à un combat symbolique des légitimités, les deux camps se renvoyant l'étiquette : on est toujours terroriste sous le regard d'un autre selon Wieviorka. Mais les terroristes des uns sont toujours les résistants des autres, de chaque côté une glorification des combattants se met en place. [...]
[...] En effet si tous ces mouvements se basent sur le sectarisme religieux, leurs motifs politiques varient d'un extrême à l'autre. Le mouvement peut dans certains cas avoir une vocation religieuse qui n'est pas sans rappeler une résurgence des guerres saintes du Moyen Age. Dans cette situation, l'usage de la violence à des fins religieuses est légitimée par le commentaire de St Augustin du texte de St Luc Compelle intrare (force-les à entrer, image du festin auquel personne ne veut goûter). [...]
[...] L'analyse de Paul Ricœur, donne un éclairage relativement inédit du phénomène. Le terrorisme s'inscrirait en effet dans le cadre plus général de la perversion et la dégradation de la forme traditionnelle de violence politique, il représente ainsi la conséquence logique d'un phénomène de grande échelle. Braud rejoint cette analyse en postulant que le critère de l'entreprise de terrorisation est le franchissement délibéré de tous les seuils d'acceptabilité Le terrorisme est donc particulier, et révélateur de notre modernité en cela qu'il n'obéit en aucune façon aux canons traditionnels de la guerre. [...]
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