Engagée sur la voie de la décentralisation, l'organisation administrative française entendait trouver un compromis entre le pouvoir local et le pouvoir centralisé. La complexité à laquelle a abouti la coexistence de plusieurs niveaux décisionnels conduit aujourd'hui à s'interroger sur la pérennité des rapports entre décentralisation et déconcentration.
La déconcentration peut se définir comme une délégation de pouvoir d'une autorité supérieure vers une autorité inférieure, à l'intérieur d'une même personne publique. Elle laisse subsister le pouvoir hiérarchique et la subordination des autorités dites déconcentrées. La décentralisation consiste à transférer des pouvoirs de décisions d'une personne juridique de droit public vers une autre. L'autorité de rang inférieur bénéficiant de ce transfert doit pouvoir également bénéficier d'un principe de libre administration, et être gérée librement par des conseils élus.
[...] Ces deux notions sont des procédés d'organisation du pouvoir, c'est-à-dire des modalités qui permettent de mettre en œuvre ce pouvoir. Dire que ces procédés sont opposés signifie qu'ils ne peuvent a priori exister sans se nier l'un l'autre : l'existence de l'un conduit, selon son degré de développement, à la disparition de l'autre. Dire qu'ils sont complémentaires revient à dire qu'ils ne peuvent que coexister, et que cette coexistence débouche sur une complémentarité. La subtilité de l'organisation française est un mélange savant de ces deux procédés : la question de leur opposition ou complémentarité sera donc étudiée uniquement du point de vue de l'organisation administrative française métropolitaine. [...]
[...] Là encore, ce procédé d'organisation procède de l'idée que le pouvoir parisien ne peut régir seul l'administration des provinces où les intérêts locaux peuvent quelque peu diverger. Il convient ainsi de relever que l'organisation administrative décentralisée est calquée sur l'organisation administrative déconcentrée : au sein de la région, le préfet de région représente l'Etat, le Président du Conseil régional la région ; au sein du département, le préfet représente l'Etat, le Président du Conseil général le département ; au sein des communes, certaines accueillent un sous-préfet, le Maire représentant sa Commune. Ce sont là les principaux exemples de la cohabitation entre autorités décentralisées et autorités déconcentrées. [...]
[...] La complémentarité entre décentralisation et déconcentration est donc nécessaire, et s'effectue sous le contrôle du Conseil constitutionnel. Cela signifie ainsi qu'elle est une obligation constitutionnelle : la Constitution proclame à la fois l'unité de l'Etat, l'égalité devant la loi, qui sont les caractéristiques de la déconcentration (cf. supra), mais aussi la libre administration des collectivités territoriales, qui caractérise la décentralisation. La complémentarité des deux procédés apparaît également dans la recherche nécessaire d'un équilibre entre décentralisation et déconcentration. En effet, c'est la survie de l'Etat unitaire qui est en jeu, dès lors que décentralisation ou déconcentration prendraient le dessus. [...]
[...] Pour autant, l'organisation de ces deux procédés demeure opposée. B/Des modes d'organisation répondant à des logiques opposées Même si le cadre géographique coïncide la plupart du temps, décentralisation et déconcentration restent des procédés aux logiques opposées. Cette opposition se manifeste dans le mode de désignation des acteurs, et en conséquence dans les relations avec le pouvoir central. Découlant de la logique de déconcentration, les autorités déconcentrées sont nommées directement par le pouvoir central. Les agents ont ainsi le statut de fonctionnaires. [...]
[...] Cette ambigüité révèle en réalité une nécessaire complémentarité. II/ La nécessité de la complémentarité : survie et efficacité de l'Etat unitaire Encore une fois c'est l'Etat unitaire qui apparaît comme vecteur de rapprochement entre la déconcentration et la décentralisation. En effet, leur coexistence dans le cadre d'une même organisation administrative révèle les tiraillements de l'Etat unitaire, poussé à la fois vers ces deux procédés Cette coexistence impose un nécessaire contrôle du pouvoir central, afin de faire respecter cette complémentarité et d'assurer la survie de l'unité normative (II). [...]
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