Le Darfour - entre conflit et qualification de génocide

Résumé du document

Le Darfour est une région du sud du Soudan, pays fédéral à la charnière du monde arabo musulman et africain dirigé par le dictateur Omar El Bachir qui a mené à une guerre civile. Au vu du nombre de morts et du massacre des non-Arabes par les milices arabes, nous pourrions penser qu'il s'agit d'un génocide et non d'un simple conflit supposant une opposition pouvant aller jusqu'à la lutte armée entre deux groupes ou États. Pourtant, le Conseil de Sécurité de l'ONU a refusé de qualifier le conflit de génocide. Les raisons du conflit tout comme l'opposition apparente entre Arabes et non Arabes ne semblent pas traduire clairement un génocide.

Dès lors, nous pouvons nous demander si le terme de génocide complexe n'est pas l'apparence trompeuse et réductrice d'un conflit multidimensionnel qui ne se limite pas à une opposition entre Arabes et non Arabes ?

Extraits

[...] Une distinction plus claire entre conflit, crime contre l'Humanité et génocide est nécessaire pour éviter des usages à mauvais escient, souvent médiatiques, et dangereusement réducteurs. Le terme de génocide a été créé pour la Shoah et non pour désigner un type d'acte. Par conséquent, l'extension de ce terme à d'autres cas ne pouvait qu'être problématique. La frontière entre la qualification de conflit à celle de génocide est étroite et mouvante. Le passage de l'une à l'autre des notions est influencé par les médias, et par les enjeux qui sous-tendent cette qualification. [...]

[...] Cette dernière a alors refusé tout compromis avec les Nigérians, prolongeant ainsi le conflit[7]. Le mot génocide peut aussi servir à justifier une intervention internationale. Le risque est, comme le souligne Rony Brauman, que la justification débouche sur une mobilisation médiatique renvoyant souvent à des analyses simplistes. Ceci a notamment était le cas au Darfour en opposant les Arabes assassins aux Africains assassinés. Une guerre civile meurtrière a été transformée en guerre des religions par les médias. Selon Bruno Angsthelm, les Etats-Unis ont utilisé le terme de génocide pour répondre à l'idéologie interventionniste. [...]

[...] Ainsi, Jacques Semelin[5] identifie trois sortes d'enjeux autour de la qualification de génocide. Tout d'abord il y a un enjeu de mémoire. Le groupe, victime reconnue d'un génocide, va pouvoir (re)construire son identité. Egalement, il identifie un enjeu de l'action puisque la qualification doit permettre de déboucher sur une intervention internationale en faveur du groupe menacé d'extinction. Enfin, il y a un enjeu juridique car depuis la Deuxième Guerre mondiale il est devenu un crime de guerre en droit international. [...]

[...] http://www.mouvements.infoJ Marc LAVERGNE, le Conflit du Darfour n'est pas racial, http://www.mouvements.info/ Roland MARCHAL, Au Darfour jeux de puissance et d'impuissance, in l'Etat du Monde 2009 Roland MARCHAL, le Soudan au XXe siècle, in l'Etat du Monde 2009 Gérard PRUNIER, Darfour, un génocide ambigu, Paris, la Table Ronde Jérome TUBIANA. Darfour généalogies d'un conflit, juin 2007, http://www.mouvement.info/ Jérome TUBIANA. Le Darfour, un conflit pour la terre avril 2006, Conjoncture 101 SEMELIN. Purifier et détruire, usages politiques des massacres et génocides, octobre 2005, op.cité. Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, E/CN/4/2005/7 (2004), 36. Le Monde Diplomatique, Darfour chronique d'un génocide ambigu www.lemondediplomatique.fr Jérome TUBIANA. [...]

[...] Selon le rapport, le gouvernement visait à faire fuir les populations de leur village pour anéantir la rébellion et non pour détruire les tribus africaines. De même, les Janjawids et l'armée soudanaise ne commentent pas de massacre systématique des civils et tuer sert à terroriser les populations mais ce n'est pas une fin en soi. Les milices cherchent surtout au début à rendre errants les sédentaires afin de récupérer leur terre et à piller, dans un contexte de famine. D'autre part, si des viols sont commis, ils ne sont effectués dans le cadre d'un génocide biologique visant à une recomposition ethnique de la population. [...]