On observe aujourd'hui le développement de phénomènes d'affirmation identitaire, de demandes de reconnaissance des spécificités culturelles, qui semblent exacerbés par la multiplication des échanges entre tous et l'affaiblissement de l'idée et des institutions nationales. La mondialisation dépossède les Etats d'une fonction essentielle qui est la régulation de leurs économies ; les constructions politiques supra- et infranationales érodent leur souveraineté ; les institutions fondatrices de l'intégration (le travail et l'école) semblent perdre de leurs capacités de socialisation. On compte aujourd'hui 175 millions de migrants internationaux (soit deux fois plus qu'en 1965), et il s'agit le plus souvent de migrations de proximité.
[...] (texte Le multiculturalisme renvoie donc plus largement à la question de l'intégration assimilation La première approche de gestion politique de la diversité culturelle fut celle de l'assimilation. La nation moderne est une forme particulière d'organisation politique qui a pour spécificité d'intégrer les populations en une communauté de citoyens, transcendant les appartenances particulières. Auparavant, les sociétés agraires de l'Ancien Régime avaient vécu selon un principe de différentiation. Les strates de la classe dirigeante étaient nettement séparées des communautés locales paysannes. Il semble que cette hétérogénéité n'était pas perçue comme une menace pour l'ordre social. [...]
[...] On peut penser qu'il est de plus en plus compliqué de se sentir appartenir à une nation. La diversité des formes culturelles au sein des sociétés occidentales prouve-t-elle leur évolution vers un monde post national, comme nombre de critiques de l'État-Nation le suggèrent ? Concevoir une identité nationale multiple implique de revoir ses fondements historiques ainsi que le fonctionnement des institutions qui l'incarnent. Cela est a priori plus facile dans les pays du Nouveau Monde qui célèbrent leurs origines migratoires et notamment dans ceux, comme le Canada, qui n'ont pas connu un processus ancien et soutenu de construction nationale. [...]
[...] Que devraient enseigner les programmes scolaires ? Ce sont autant de questions pratiques posées par le multiculturalisme. Pour certains, il est le signe du déclin de l'État-Nation et de l'émergence de nouvelles formes d'intégration politique (locales et transnationales). Pour d'autres, c'est une évolution propre aux institutions nationales, caractérisées par une tension constitutive entre unité et pluralisme.Le multiculturalisme traduit précisément cette recherche d'un nouveau point d'équilibre entre pluralisme culturel et intégration nationale. Dès lors, il ne recouvre pas simplement la question de la diversité, mais plutôt celle de la reconnaissance à l'intérieur d'un horizon de valeurs communes. [...]
[...] Ce qui fut d'abord un combat contre l'ethnocentrisme, en vue d'une tolérance et compréhension plus grande entre les cultures par la reconnaissance d'un droit à la différence, peut aboutir à l'inverse du résultat escompté. Le différentialisme poussé à l'extrême conduit à tout accepter au nom du droit de différer. Toute valeur universelle est engloutie et chaque culture est ainsi encouragée à s'enfermer dans sa particularité locale. Ce qui ne combat pas le racisme, mais l'alimente. La reconnaissance légitime de la diversité et la revendication d'un droit à la différence ne risquent-elles pas d'exposer à la dérive du relativisme érigé en dogme de façon non critique ? [...]
[...] Cela passe par la création de zones urbaines sensibles, de zones franches urbaines et l'imposition de quotas d'emplois réservés aux candidats locaux. Les logiques de discrimination positive territoriale se communiquent à la société, comme on peut le voir à Sciences Po avec la création en 2001 d'une voie d'admission spéciale réservée aux lycéens scolarisés en ZEP. Appelée à statuer sur la légalité de certaines obligations vestimentaires à l'école, à l'usine ou au bureau, la chambre des Lords a élaboré un discours judiciaire à contenu sociologique qui permet de rattacher une obligation comportementale (le port du turban par un Sikh, par exemple) à l'appartenance culturelle héréditaire et au contenu de la culture en question. [...]
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