Comme le rappelle Hannah Pitkin dans The concept of representation (1967), le terme de représentation a de multiples significations. Il désigne au sens large l'acte de rendre présents, par un intermédiaire, des personnes, des groupes ou des abstractions qui ne le sont pas réellement. En politique, la représentation est la forme d'autorisation ou de délégation du pouvoir par laquelle les gens qui ne sont pas présents autorisent le représentant qu'ils ont mandaté à agir et parler en leur nom pour les défendre, et content ou obéissant à ses décisions – consentement qui s'exprime au moyen de l'élection. Il semble pourtant que ce consentement soit de plus en plus faible : cette crise de la représentation politique dont parlent de nombreux auteurs s'esquisse à travers l'évolution du taux de partition politique dans le sens d'une chute libre malgré un regain à certaines élections comme en 2007, le déclin du militantisme ou encore la diminution du taux de syndicalisation.
[...] Pour ce qui concerne la France, ses principes sont inscrits dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dont l'article 14 indique que “tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée”. Dans la logique de l'auteur, reconnaitre à l'opposition le droit de proposer la loi des finances revient à lui donner un rôle politique parlementaire ; ses volontés tendent à être reconnues, mais globalement, la majorité domine la vie parlementaire et gouvernementale, amoindrissant le travail de délibération du Parlement. Puisque la majorité fait la loi in fine, à quoi bon la débattre ? [...]
[...] Jean Marie Domégani suppose quant à lui que le citoyen a du mal à se sentir représenté par le personnel politique parce qu'il est en fait plus exigent envers lui. La hausse du niveau culturel moyen, notamment grâce à la démocratisation des études supérieures et l'accès aux sources d'information comme Internet, a formé des citoyens qui en demandent toujours plus au politique. Devant l'efficience compromise du Parlement et la formation des élites politiques différentes du corps social qui l'entoure, l'individu éprouve donc de plus en plus de mal à se sentir correctement représenté. [...]
[...] Aujourd'hui, selon les calculs de Philippe Sassier et Dominique Lansoy, dans leur livre Ubu roi, trop de lois tue la loi, le pays compterait lois et décrets. Entre 1986 et 2006, le Journal Officiel est ainsi passé de à pages ! La tendance est à la hausse et les députés ne sont pas près de ralentir le rythme : depuis des années, le gouvernement oblige les députés à travailler un peu plus en organisant des sessions extraordinaires du parlement au mois de juillet. [...]
[...] La crise de la représentation politique viendrait donc d'une part de l'érosion du clivage partisan traditionnel et du manque de diversité sociale et genrée des élus. Pourtant, comme le rappelle Bernard Manin dans Principes du gouvernement représentatif, ce phénomène semble inévitable puisque l'élu n'est pas exactement le miroir de son électeur, il en incarne les aspects supérieurs. C'est là le propre de la démocratie représentative ; dès lors, pourquoi la crise du politique ne semble-t-elle pas s'exprimer seulement depuis les années 1990 ? [...]
[...] Les députés ont le sentiment que le travail est parfois bâclé en raison d'une surproduction de textes législatifs parfois mal ficelés. Il n'y a donc pas assez de temps par rapport au nombre de lois sur lequel le Parlement doit se prononcer, d'où l'emploi de l'expression de sprint procédurier Dans un tel contexte, les représentants prennent-ils le temps de délibérer sur la loi ? Probablement pas, surtout si on prend en compte les textes votés sous le coup de l'émotion en un temps record, comme en décembre 2002, concernant la loi pour de nouvelles normes aux ascenseurs, votée en une semaine suite à l'émoi suscité par deux accidents. [...]
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