Près de 40 ans après l'indépendance des Etats africains, le bilan du continent est plutôt sombre. Les guerres et la pauvreté accablent toujours le continent, et tous les domaines (éducation, situation sanitaire…) sont affectés par le « mal-développement ».
Pourtant, l'Afrique est en première position au niveau mondial concernant certaines ressources, avec des matières minières (bauxite, titane, cobalt) mais également du pétrole, des diamants, du gaz. Elle reçoit également de l'aide internationale environ 10 % de son Produit Intérieur Brut (PIB). Malgré cela, aujourd'hui son PIB est tombé largement en dessous de sa valeur en 1960.
Aujourd'hui, la première explication de cet échec relève principalement de la mauvaise gouvernance de ses dirigeants politiques. Les cercles au pouvoir s'enrichissent en effet impunément au détriment des populations, et alimentent les conflits ethniques et les conflits d'intérêt. Ces dérives étatiques appartiennent bel et bien au champ de la criminalité, dans le sens où loi et morale sont violées. Non respect des droits fondamentaux, dictatures, pillage des ressources, trafics en tout genre, génocides… ont marqué l'Afrique durant tout le XXe siècle, qualifiant ses Etats de « failed-states ». Sa trajectoire historique, marquée par la colonisation, relie de fait étroitement le fonctionnement des Etats africains aux puissances occidentales.
Par conséquent on peut se demander si la criminalisation de l'Etat est un processus qui lui est spécifique, ou bien est-ce qu'il a été exacerbé par la colonisation, et que les politiques de développement et les puissances occidentales alimentent plus qu'elles ne l'enrayent ? Autrement dit, doit-on parler de spécificité africaine ou d'effets pervers du néo-colonialisme ?
Trois axes d'études ressortent alors : d'abord en recherchant les causes de cette criminalisation, nous en étudierons le processus. De là, nous déterminerons s'il s'agit d'une spécificité africaine, et de quel type elle relève. Enfin, la mise en perspective de ce phénomène permettra de réfléchir aux enjeux du XXIe siècle de cette criminalisation et aux perspectives politiques du continent africain dans ses rapports Nord-Sud.
[...] Selon l'auteur, elle amène par exemple à la naissance de confréries, de sociétés secrètes, dont s'entourent parfois les dirigeants. (Cameroun, Gabon, Zaïre, Mozambique). Ces deux faits sont inhérents à la société africaine et font partis des comportements, et notamment ceux en lien avec l'ascension sociale. La vision occidentale dans ce cas peine à placer la limite entre ce qui relève de la ruse et ce qui peut devenir effectivement un comportement délictueux. Seul le regard du juriste trace une frontière entre ces divers statuts et créneaux de la promotion sociale ou du statut religieux Ce registre du jeu, de la ruse s'illustre par exemple dans le cas du Bindo, un jeu de hasard dans les années 90-91 au Zaïre, où l'on misait une certaine somme d'argent, pour gagner un lot. [...]
[...] L'Afrique perd annuellement près de 150 milliards de dollars, soit un quart du produit national brut du continent, à cause de la corruption. Certains pays, dont le Cameroun et le Nigeria ont été classés, plusieurs fois premier pays corrompu du monde par l'ONG Transparency International. - Sur l'exploitation des ressources : La plupart des chefs d'Etat africains ne se pensent pas comme des présidents de la République, garants de l'intérêt général, mais agissent plutôt comme des présidents de conseil d'administration. [...]
[...] Toutefois, une typologie peut s'établir selon les visages que prend la criminalité, avec quelques exemples ayant marqué l'histoire, ou perdurant encore aujourd'hui. Certains points méritent d'être détaillés : - Coup d'état : Dans un contexte de lourde déstabilisation politique et sociale : la puissance publique devient une fiction dont on cherche à tirer profit et le coup d'Etat, un mode naturel de conquête du pouvoir. En voici quelques exemples : - Coups d'Etat en Guinée-Bissau (septembre 2003) - Tentatives de putsch au Burkina Faso et en Mauritanie (octobre 2003), - Renversement de M. [...]
[...] La criminalisation de l'Etat: Frein au développement ? On ne peut s'attaquer avec succès à la criminalité que dans le contexte de programmes réussis de développement socio-économique. Or l'expansion économique et les programmes visant à atténuer la pauvreté sont eux-mêmes sapés par la criminalité et la corruption Telle est la conviction de Nelson Mandela pour qui, parmi les multiples cercles vicieux recouvrant les grands maux contemporains africains, celui qui relève de la criminalisation de l'Etat est certainement le plus risqué pour l'avenir du continent. [...]
[...] La formation de l'Etat est donc bien réelle, même si les trajectoires sont diverses. Il faut noter que cette formation de l'Etat en Afrique repose sur des principes différents de la formation des Etats européens du Moyen Age : l'Etat se reproduirait plus par la domination de groupes voisins que grâce aux tributs versés par ses propres populations, ce qui est très différent des états occidentaux dont l'emprise se construisait sur les taxes. De même, l'Etat africain n'a jamais contrôlé sa production agricole, et de fait, lorsqu'un état périclitait, la population survivait. [...]
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