A. de Tocqueville écrit en 1835 dans De la Démocratie en Amérique que « ce qu'un étranger comprend avec le plus de peine aux Etats-Unis, c'est l'organisation judiciaire. Il n'y a pour ainsi dire pas d'évènement politique dans lequel il n'entende invoquer l'autorité du juge ; et il en conclut naturellement qu'aux Etats-Unis, le juge est une des premières puissances politiques. »
Le meilleur exemple de l'importance du judiciaire en Amérique est la position privilégiée de la Cour suprême dans la structure du pouvoir politique. Le constat de Tocqueville était à l'époque pertinent et le semble encore aujourd'hui, mais il est nécessaire de s'interroger sur la réalité du rôle politique des juridictions fédérales. Plus particulièrement, peut-on soutenir que la Cour suprême des Etats-Unis est un organe politique ?
Nous verrons tout d'abord que la Cour suprême possède en effet un pouvoir politique conséquent, qu'elle apparaît même parfois comme la clef de voûte du système américain, dévoilant ainsi le spectre du « gouvernement des juges ». Puis nous nuancerons cette position en observant le système américain dans sa globalité, et nous pourrons alors distinguer que l'autorité de la Cour suprême est inévitable voire nécessaire, et qu'elle s'impose désormais comme une institution garante de la démocratie.
[...] La Cour White-Taft (1910-1930) marqua un tournant avec des jugements plus libéraux, mais la philosophie conservatrice prédomina pendant la majeure partie du XXe malgré la recherche du progrès social par la classe politique, notamment avec la Cour Hughes (1930-1941) : on peut citer comme preuves de ces Cours très activistes la décision Schenk v. U.S. (1919) qui institue la doctrine du danger manifeste et actuel (restriction possible de la liberté d'expression) ou encore le risque de blocage institutionnel qui apparut lors du New Deal. Lors des élections présidentielles de novembre 2002, la Cour Suprême est intervenue d'une manière on ne peut plus politique. En effet, le décompte des voix en Floride avait donné une différence de entre les deux candidats, G. [...]
[...] Cette sacralisation de la loi explique la tendance américaine à transformer tout problème social et politique en problème judiciaire, à souligner la composante juridique du problème. Le judiciaire est dans l'Etat, c'est-à-dire éminemment politique. On peut parler de véritable pouvoir judiciaire puisque les juridictions fédérales sont amenées à rendre des jugements ayant un effet direct sur le fonctionnement des institutions et souvent sur la vie politique. Il faut aussi noter que la Cour sert de contre-pouvoir dans certains cas, et permet ainsi à la séparation des pouvoirs à l'américaine c'est-à- dire avec des checks and balances d'être effective. [...]
[...] La Cour suprême des Etats-Unis est-elle un organe politique ? A. de Tocqueville écrit en 1835 dans De la Démocratie en Amérique que ce qu'un étranger comprend avec le plus de peine aux Etats-Unis, c'est l'organisation judiciaire. Il n'y a pour ainsi dire pas d'évènement politique dans lequel il n'entende invoquer l'autorité du juge ; et il en conclut naturellement qu'aux Etats-Unis, le juge est une des premières puissances politiques. Le meilleur exemple de l'importance du judiciaire en Amérique est la position privilégiée de la Cour suprême dans la structure du pouvoir politique. [...]
[...] Les présidents nomment en général des juges dont la philosophie politique est proche de celle de leur propre ligne gouvernementale. Pour garantir l'indépendance des juges, leur fonction leur est dévolue à vie (life tenure) et ils bénéficient d'une importante rémunération. La juridicisation du politique : la fonction première d'arbitre La Cour est l'organe souverain dans le système juridique américain : elle est avant tout l'arbitre suprême dans toute affaire qui met en jeu la Constitution, les lois, les traités, que l'affaire ait été précédemment jugée en première instance ou devant un tribunal d'Etat. [...]
[...] Les détracteurs de la Cour la qualifient même de troisième chambre dénonçant ainsi sa participation au pouvoir législatif. Il reste qu'aux yeux de la population, la Cour paraît être une institution impartiale et plus sûre que celles de l'exécutif et du législatif. des décisions historiques attestant de l'impact politique de la Cour suprême L'objectivité absolue de la Cour est aujourd'hui majoritairement considérée comme un mythe, et on compte deux attitudes dominantes dans son style: la réserve (self-restraint), prônée au nom de la démocratie (les juges ne sont pas des élus du peuple et doivent donc éviter toute confrontation directe avec les représentants), et l'activisme, qui tente de faire coïncider l'interprétation de la Constitution avec les besoins de la société contemporaine, dans la mesure où les sujets qu'elle traite sont souvent d'ordre politique ou sociétal (débat sur l'avortement, la peine de mort, l'homosexualité, etc.) L'une des décisions les plus marquantes du XIXe fut l'affaire Dred Scott v. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture