Depuis la Révolution industrielle anglaise au début du XIXème siècle, l'essor de la production textile-habillement a constitué la première étape du développement industriel. L'exemple anglais a notamment été suivi quelques décennies plus tard par d'autres pays européens tels que l'Allemagne et la France, puis par les Etats-Unis. Au siècle dernier, le développement du Japon, de l'Ile Maurice, de la Chine ou encore de l'Inde a suivi le même modèle : tous ces pays ont fait du secteur textile le moteur de leur développement industriel.
Ces industries obéissent à une logique de cycle de vie : au fur et à mesure que les pays se développent, que les salaires s'élèvent, d'autres pays, moins avancés, deviennent compétitifs et remettent en cause les positions acquises. Par conséquent, dès les années cinquante, l'essor des exportations asiatiques de textile- habillement a suscité une réaction de protection de la part des pays industrialisés, qui ont imposé des mesures de limitation de ces exportations. En effet, pour les pays industriels, l'ajustement était lourd et coûteux en marges, en emplois et en salaires. Ainsi, sous la pression des économies riches, l'accord multifibres entre en application en 1974. Le textile et l'habillement deviennent, comme l'agriculture, des secteurs d'exception. L'objectif de cet accord est de limiter les exportations textiles des pays en voie d'industrialisation vers les pays les plus avancés. Mais il ne se contente pas de durcir le protectionnisme. Il renie aussi les fondements du Gatt.
[...] Les Etats-Unis et la Communauté Européenne les ont ensuite étendus à la Corée et à Taiwan puis à tous les produits de textile- habillement dans le cadre de l'Accord multifibres de 1974. Cette réglementation a permis aux pays industriels de s'ajuster progressivement à la concurrence des pays à bas salaires. Cet ajustement est aujourd'hui achevé pour l'essentiel : après déjà plusieurs décennies de baisse, l'emploi dans ce secteur a ainsi été divisé par deux aux Etats-Unis entre 1995 et 2002. [...]
[...] En conséquence, la part des PED dans les exportations de ce secteur est devenue prépondérante. En effet, alors qu'elle représentait seulement 49% du total en 1967, la place des exportations des PED occupait 85% en 2001. L'emploi dans ce secteur a connu une évolution similaire : il a subi un déclin régulier dans les pays industrialisés pour ne plus représenter par exemple que de l'emploi manufacturier de l'UE en 2003 selon les données de la Commission européenne ; en sens inverse, ce secteur a constitué un important pourvoyeur d'emploi dans les PED. [...]
[...] Il est possible de constater la même évolution sur le marché australien qui s'est ouverte à la même époque que le japonais. Ces évolutions font craindre que le démantèlement des quotas ne provoque un raz de marée des exportations chinoises et indiennes au détriment de la plupart des autres PED. Les principaux perdants seront donc ceux qui bénéficiaient d'un accès préférentiel aux marchés européen et américain. Les pays pauvres qui bénéficiaient d'un tel accès dans le cadre d'initiatives bilatérales vont perdre des parts de marché suite à la suppression des quotas. [...]
[...] Mais les problèmes ne font que commencer ; le démantèlement total de l'Accord multifibre à compter du 1er janvier 2005 risque encore d'aggraver l'effritement de la production. Par le biais d'une réaction en chaîne, la demande de travail va également s'affaiblir à partir de 2005 et se maintiendra même certainement à un niveau très bas. La main-d'œuvre très qualifiée est la plus affectée au départ en raison de sa complémentarité avec le capital, mais par la suite l'ampleur de la baisse de la demande de travail est relativement proche pour toutes les catégories de main d'œuvre. [...]
[...] Cette réintégration, ainsi que l'inclusion simultanée des produits agricoles dans le cadre de l'OMC, s'est effectuée en contrepartie de l'acceptation des PED de l'inclusion des services et des règles concernant le respect de la propriété intellectuelle, donnant lieu à un grand- marchandage Nord- Sud. L'accord sur les textiles et les vêtements (ATV) mis en place en 1995 s'applique à tous les pays. Supervisé par un Organe de supervision des textiles, établi au sein de l'OMC, il prévoit d'étaler le démantèlement sur dix ans et en trois étapes. Dès le 1er janvier du volume total des exportations ont rejoint le régime commun. [...]
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