Un monde de fastes et de secrets, de vastes demeures sous des cieux exotiques, des journées épuisantes et futiles à la fois, une foule de domestiques forcément stylés, une garde-robe prêtée par les grands couturiers : c'est encore aujourd'hui l'image de l'épouse de diplomate que renvoie sous forme de feuilleton télévisé la littérature populaire, que véhiculent des films poétiques comme « Une femme à sa fenêtre » de Granier-Deferre, ou « India Song » de Resnais.
Nos mères, déjà, savaient la réalité tout autre : elles nous ont conté les longs voyages éreintants, les conditions d'hygiène et de sécurité précaires, les infinies contraintes d'un protocole minutieux - et surtout, les soirs d'ennui et de bridge, les menues rivalités et les querelles avec le personnel de maison.
Encore n'avaient-elles aucune hésitation quant à leur place dans la société et à leur rôle à jouer au sein de celle-ci.
L'éducation des enfants, moyennant gouvernantes, et plus récemment jeunes filles au pair ainsi que d'excellents pensionnats, n'a pas, pour elles, comporté de difficultés majeures.
Elles coulent en province des vieillesses paisibles sans s'être jamais posé de question sur leur droit possible à une retraite.
Certes, nous savions dépassée cette conception du monde, et nous pensions bien que les mutations de notre époque se refléteraient probablement chez les épouses de diplomates : nous ne nous doutions pourtant pas qu'étaient si vives leurs inquiétudes, si profondes leurs interrogations.
Au lieu d'anecdotes croustillantes, d'historiettes amusées sur les surprises de la vie à l'étranger, nous avons, en nous adressant aux unes et aux autres, déclenché de vigoureuses mises au point.
Car sur les 9 000 agents que compte le ministère et dont les deux tiers se relaient en permanence à l'étranger, toutes les catégories de la fonction publique sont représentées. Il s'agit d'un monde toujours largement masculin (90%), sauf comme partout en France, pour le personnel d'exécution.
La continuité des problèmes évoqués, la résurgence des mêmes difficultés, la convergence de vue de tous ces « conjoints d'agent » selon la formule peu élégante qui les désigne nous ont conduit à leur laisser la parole... Le lecteur, peut-être, sera surpris du sérieux de leurs préoccupations. Il faut savoir que la jeune femme de diplomate (moins de 40 ans), nantie de diplômes, a généralement débuté une carrière avant que le départ en poste de son époux ne vienne tout remettre en cause (...)
[...] Curieusement, le mauvais accuei] dont ses membres font les frais est plus mal vécu que la méfiance dont ils sont l'objet en pays étranger. Les adolescents en particulier découvrent avec angoisse leur différence : auparavant français en milieu étranger, ils se perçoivent étrangers en milieu français. Contraints de lutter contre la nostalgie, ils découvrent un sentiment de solitude plus grave que celui qu'ils éprouvaient en poste auprès de leur famille. On peut se consoler en affirmant que, passé le cap du secondaire, il s'agit d'atouts certains. [...]
[...] Nos mères, déjà, savaient la réalité tout autre : elles nous ont conté les longs voyages éreintants, les conditions d'hygiène et de sécurité précaires, les infinies contraintes d'un protocole minutieux et surtout, les soirs d'ennui et de bridge, les menues rivalités et les querelles avec le personnel de maison. Encore n'avaient-elles aucune hésitation quant à leur place dans la société et à leur rôle à jouer au sein de celle-ci. L'éducation des enfants, moyennant gouvernantes, et plus récemment jeunes filles au pair ainsi que d'excellents pensionnats, n'a pas, pour elles, comporté de difficultés majeures. Elles coulent en province des vieillesses paisibles sans s'être jamais posé de question sur leur droit possible à une retraite. [...]
[...] Il est pour eux certain, en effet, que les enfants d'expatriés vivent plus mal que les autres les situations engendrées par la mésentente des parents, la maladie, le deuil. Il ne s'agit pas, à proprement parler d'un état pathologique mais plutôt d'un contexte psychologique qui doit conduire les éducateurs à redoubler de vigilance. La mère porte dès lors une grande part de responsabilité dans le comportement des enfants à l'occasion des migrations familiales. Ses talents d'organisatrice, son calme, sa gaieté en toutes circonstances limitent le traumatisme causé par la rupture. [...]
[...] Le détachement se révèle plus confortable que la précédente position dans la mesure où il permet au fonctionnaire de continuer à concourir pour l'avancement et de préserver ses droits à la retraite. Cependant, les inconvénients nés de cette situation pour l'agent concerné ne sauraient être sous-estimés : le détachement demeure mal vécu au sein de la plupart des administrations et si l'on peut, à la rigueur, l'admettre lorsqu'il porte sur des fonctions austères exercées à l'intérieur de l'hexagone, il fait l'objet de toutes les suspicions dès lors qu'il implique des tâches supposées plus divertissantes et qui de surcroît auront pour décor des cieux réputés cléments! [...]
[...] Un prix que la mère de famille expatriée va quelquefois payer fort cher. Il n'est pas rare en effet que celle-ci ait à renoncer pendant la durée de la scolarité de ses enfants (vie étudiante comprise) à tout projet individuel. Accaparée d'un continent à l'autre par des tâches à la fois très matérielles (équiper un studio, régler l'intendance en son absence) et de soutien psychologique, sa santé physique et morale, sa bonne humeur sont le garant de la réussite de tous. [...]
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