Joseph Alois Schumpeter (1883-1950) est souvent considéré – avec des penseurs comme Mosca ou Pareto- comme un des pères fondateurs d'une théorie « élitiste » (ou « minimaliste ») de la démocratie. C'est au chapitre XXI de Capitalisme, socialisme et démocratie, 1942 qu'il développe principalement cette conception.
[...] En effet, Schumpeter développe une conception minimaliste de la démocratie. La démocratie n'est pas considérée comme un idéal en soi puisqu'elle peut aboutir à des politiques inhumaines. De plus, la démocratie ne correspond pas à sa signification logique, à savoir le gouvernement du peuple par le peuple, car il s'agit d'une impossibilité pratique : le peuple est incapable de fonctionner comme commission législative ou comme pouvoir exécutif. S'il s'agit simplement de la légitimité populaire des autorités, l'histoire montre que de nombreux régimes non démocratiques ont obtenu aisément l'appui et le soutien du peuple. [...]
[...] Inversement, des régimes non démocratiques ont respecté les libertés de conscience, d'expression, et le droit de propriété. Cette conception est opposée à la théorie classique de la démocratie que Schumpeter définit ainsi : la méthode démocratique est la technique institutionnelle de gestation des décisions politiques qui réalise le bien commun en chargeant le peuple lui-même de faire pencher le plateau de la balance en élisant des individus qui se réunissent ensuite pour accomplir sa volonté Schumpeter critique cet idéalisme classique puisque selon lui elle implique qu'il existe un bien commun (discernable par tous et impliquant des réponses précises à toutes les questions spécifiques) et une volonté commune du Peuple (qui correspondrait exactement au bien commun Or ces élément sont largement indéfinissables : le bien commun n'existe pas car il doit nécessairement signifier des choses différentes pour des individus et groupes différents. [...]
[...] Cette méthode démocratique minimale a reçu au moins trois séries de critiques. Tout d'abord, il faut que tous les intérêts ayant un poids politique (les partis) acceptent la méthode démocratique. De plus, les élites politiques doivent limiter les décisions politiques et les législations que devraient plutôt énoncer des principes dont l'application serait le privilège d'une bureaucratie autonome, compétente, vertueuse et solidaire et dont l'existence serait pour le moins paradoxale au regard de la conception pessimiste qu'a Schumpeter de la nature humaine. [...]
[...] Sources - SCHUMPETER, Joseph Aloïs, Paris, Payot p. - ZYLBERBERG, Jacques, Schumpeter in DUHAMEL, Olivier, CHÂTELET, François, PISIER, Elizabeth (dir.), Dictionnaire de œuvres politiques. [...]
[...] La démocratie de Schumpeter ne repose plus sur la souveraineté pop, ni sur une rationalité citoyenne généralisée et encore moins sur la vertu des élites politique ; elle insiste au contraire sur l'inévitabilité du commandement hiérarchique, la compétition des partis pour l'appropriation de ce pouvoir de commander et l'arbitrage électoral du peuple. Cette méthode minimale, électorale, permet de discriminer entre les gouvernements démocratiques et non démocratiques. Le processus électoral promeut un arbitrage pacifique de la bataille des chefs de partis et de leurs états-majors. La récurrence d'élections libres permet au peuple de nommer et de révoquer les autorités. Cependant, Schumpeter reconnaît que la compétition électorale, analogue aux enjeux du marché économique, est plutôt une concurrence imparfaite. [...]
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