La décision du Canada de changer d'heure de passage à l'été en 2007, à la suite des États-Unis, offre un cas illustratif de la dynamique de convergence à l'œuvre dans les politiques publiques affectant plusieurs pays. Le but de ce travail est d'analyser la nature et les mécanismes à l'œuvre dans ce processus, puis de tirer quelques conclusions sur le type de rationalité observé. On portera ainsi l'attention sur l'utilité heuristique d'une théorie de la contingence en analyse de politiques publiques.
La tradition d'analyse des politiques publiques a privilégié comme niveau pertinent de réflexion la dimension nationale, et comme acteurs majeurs, l'État, et les autres intervenants publics. De ce fait, les travaux à vocation internationale avaient pour point de départ ces cadres cognitifs, réduisant l'analyse comparative à de la comparaison « inter (nationale) », dont le but était de relever les invariants ou les différences entre politiques d'un même secteur, et les spécificités nationales de ces politiques. Ceci semble fort compréhensible, étant donnée la définition « stato-centrée » des politiques publiques qui prévaut dans la discipline (Dye, 1984; Sharkansky; 1970, Meny et Thoenig; 1989).
[...] C'est sans doute l'une des grandes limites de ce type d'approche qui en adoptant une conception unitaire de la décision occulte une grande dynamique sous-jacente, et un niveau important de l'intelligibilité des interactions politiques. D'où la nécessité de développer une théorie de la contingence pour l'analyse de la prise de décision. Initiative qu'a abordée ce travail. Bibliographie Balme, R., Brouard, S. (2005) Les conséquences des choix politiques : choix rationnels et action publique in Revue française de science politique, Vol 55, nº pp. 33-50. Boucher, C., (2004). “Canadian_US values: distinct, inevitably carbon copy or narcissism of small differences?” in Horizons, Vol no pp. [...]
[...] Il existe deux cas patents de convergence par imposition. L'imposition unilatérale d'une politique d'un pays à un autre pays, ou encore l'imposition d'une politique, par une organisation internationale, à plusieurs pays. Le premier cas est assez rare (étant donnée la consécration du principe de souveraineté comme critère de régulation des rapports entre États), et correspond généralement à des périodes suivant une guerre. Le second cas quant à lui est plus fréquent. Une illustration patente se retrouve dans l'adoption des politiques environnementales par plusieurs États, ou des politiques relatives aux droits de l'homme. [...]
[...] Colin Bennet (ibid.) nous propose, à cet égard, cinq niveaux pertinents d'identification de la convergence de politiques publiques : Convergence sur les buts; Convergence sur le contenu de la politique; Convergence sur les instruments de la politique; Convergence sur les résultats de la politique; Convergence sur le style de la politique. Bien que ces critères de repérage du processus de convergence soient suffisamment clairs, l'approche prescrite par l'auteur présente l'inconvénient, dans notre optique analytique, de brasser trop large. L'exercice peut s'avérer fort ardu s'il embrasse les critères avancés de manière exhaustive. Nous nous tournerons donc vers des auteurs, dont la démarche nous paraît plus adéquate pour notre propos. Holzinger et Knill (ibid.) apparaissent pertinents à cet égard. Ces derniers proposent des indicateurs analytiques permettant de définir un processus de convergence. [...]
[...] Dans ce travail, nous proposons de (re)prendre en considération l'intérêt de l'approche du choix rationnel pour l'analyse, la prise de décision. Cette théorie est souvent balayée rapidement au profit de son antonyme épistémologique, la théorie de la rationalité limitée développée par Herbert Simon. Le concept de rationalité limitée a été développé pour rendre compte de l'existence d'une pluralité de ‘rationalités' et pour récuser la domination monopolistique de l'explication par la rationalité totale ou la rationalité instrumentale des acteurs qui régnait jusque-là. [...]
[...] Cela n'implique pas une perte totale de spécificité, et de souveraineté, surtout du Canada, car cette convergence touche principalement les domaines économiques. Elle n'est de même pas possible si elle contrevient avec les valeurs locales[5]. Notons cependant que cette convergence est facilitée par la grande proximité et dépendance entre les politiques énergétiques canadienne et américaine, les États-Unis étant un acteur de poids dans la politique énergétique du Canada[6]. On reviendra sur ce point plus loin. Cette décision canadienne met en exergue le rôle majeur joué par les États-Unis dans l'économie et la politique canadiennes. [...]
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