On parle aujourd'hui en Inde d'un droit anglo-musulman, exposé par les décisions des tribunaux de l'empire britannique. Il faut savoir que ce terme n'a jamais été accepté officiellement, il n'a jamais été institutionnalisé en tant que tel. Le législateur a quasiment fait du cas par cas en tentant de constater quelles parties du droit musulman pouvaient être appliquées et à quelles personnes. Les juges, eux, n'ont jamais voulu sciemment faire fusionner les deux systèmes. Le seul objectif de ce double droit était de tenter d'appliquer la chari'a et ses dispositions telles qu'elles furent élaborées par les grands juristes musulmans. Mais tout est dans la nuance. Il fallait en effet prendre en compte les habitudes de vie des peuples musulmans auxquels il fallait rendre justice. Si l'on dit que « les règles de la chari'a sont rigides et c'est par la lettre exacte de la chari'a qu'il faut soutenir ou rejeter la cause », l'on n'a pas pu s'empêcher d'y apporter de grandes modifications. Cela a été le cas dans beaucoup d'autre pays, comme l'Algérie ou l'Egypte mais l'Inde fait exception en ce sens que les modifications, en quantité, sont considérables. Le législateur a établit un domaine étroit, le droit familial, où l'empire de la chari'a est absolu. Il a enlevé certaines branches à la chari'a et a imposé certaines bornes, nous verrons d'ailleurs cela plus loin dans le développement.
Les raisons qui ont poussé le législateur à faire toutes ces modifications se résument en un seul mot : la démocratie. On parle de l'Inde comme étant la « plus grande démocratie du monde ». Ceci n'est pas compatible avec certains aspects de la chari'a qui ont dû être modifiés ou même supprimés. Cependant, il n'était pas question de supprimer totalement la chari'a, comme cela a été le cas en Turquie. Il a donc fallu trouver une sorte de compromis, matérialisé dans le droit anglo-musulman. Ceci n'a pas été sans difficultés, bien au contraire, les difficultés sont là encore aujourd'hui. Mais il n'en demeure pas moins que le modèle indien est unique en son genre et nous montre là encore que la religion, par certains de ses aspects, peut ne pas être figée et peut évoluer avec le temps.
Les questions à se poser aujourd'hui sont donc : comment a-t-on réussi en Inde à concilier chari'a et démocratie ? Quelles ont été les difficultés rencontrées ? Sommes-nous arrivés à fondre la chari'a dans la démocratie ?
Afin d'y répondre, nous nous intéresserons dans un premier au contexte général indien qui permit l'émergence de ce droit anglo-musulman, avant de clore notre étude par l'analyse de la mise en pratique de ce droit.
[...] Les raisons qui ont poussé le législateur à faire toutes ces modifications se résument en un seul mot : la démocratie. On parle de l'Inde comme étant la plus grande démocratie du monde Ceci n'est pas compatible avec certains aspects de la chari'a qui ont dû être modifiés ou même supprimés. Cependant, il n'était pas question de supprimer totalement la chari'a, comme cela a été le cas en Turquie. Il a donc fallu trouver une sorte de compromis, matérialisé dans le droit anglo-musulman. Ceci n'a pas été sans difficultés, bien au contraire, les difficultés sont là encore aujourd'hui. [...]
[...] L'on pourrait croire que ce droit anglo-musulman va en se transformant en droit anglais seulement, faisant tache d'huile sur les domaines réservés de la chari'a mais il n'en est rien. On a en effet pu voir que les législateurs ont tenté de transformer le droit familial aussi mais ils se sont retrouvés dans une impasse et ont provoqué de violentes réactions au sein de la communauté musulmane. Le droit familial apparaît donc comme le fief de la chari'a, alors que le droit britannique se concentre sur le reste des domaines du droit. [...]
[...] Il apparaît ainsi que pour les tribunaux, il est possible de réformer autant le droit anglais que le droit musulman si cela peut servir l'équité. A ce propos, la plupart des décisions sont prises au XIXe siècle, avec l'instauration de la suprématie de l'équité dans le système anglais par les Actes de judicature de 1873 et 1875. Disparition complète de la chari'a dans certains domaines Le deuxième trait de l'activité judiciaire en Inde se retrouve dans la disparition complète de la chari'a dans certains domaines, qui se voit remplacée par le droit anglais. [...]
[...] On y a invalidé le revenu du waqf car il était destiné, dans l'ordre, à la descendance des constituants, après leur extinction il se destinait aux veuves, aux orphelins, aux mendiants puis aux pauvres, ce qui a été jugé injuste étant donné qu'il servait à augmenter la puissance de la famille, les pauvres étant tellement éloignés dans la liste des prétendants à ce revenu que c'en était utopique. Dans ce contexte, les notions de charité anglaises et islamiques s'opposent : le rapprochement de Dieu ou qurba constitue l'essence même du waqf et l'on considère que le fait que le constituant abandonne son droit de propriété à sa possession suffit. La chari'a n'a pas à vérifier si le revenu est consacré à un but charitable ou pas. Là encore, il ne faut pas oublier que les juges ont tout de même tenté d'appliquer le droit islamique. [...]
[...] La chari'a dans la démocratie - Le droit anglo-musulman en Inde Introduction On parle aujourd'hui en Inde d'un droit anglo-musulman, exposé par les décisions des tribunaux de l'empire britannique. Il faut savoir que ce terme n'a jamais été accepté officiellement, il n'a jamais été institutionnalisé en tant que tel. Le législateur a quasiment fait du cas par cas en tentant de constater quelles parties du droit musulman pouvaient être appliquées et à quelles personnes. Les juges, eux, n'ont jamais voulu sciemment faire fusionner les deux systèmes. [...]
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