La Constitution de Weimar (1919) avait instauré un régime parlementaire fonctionnant sur un modèle dualiste (le gouvernement était responsable devant la chambre basse et devant le chef d'Etat). L'exécutif était bicéphale et les pouvoirs répartis entre le Chancelier et le président de la République. Mais le fonctionnement de la République de Weimar n'a pas été satisfaisant, car le régime dualiste n'était pas adapté au paysage électoral allemand des années 1920 : l'atomicité des partis ne permit pas de dégager de majorité électorale, et les différents gouvernements furent instables car ils étaient issus de coalition susceptibles de se rompre. Ainsi, après la Seconde guerre mondiale, les constituants chargés d'établir la Constitution de la RFA voulaient établir un régime stable, dans lequel le Chancelier détiendrait des pouvoirs forts et de manière durable, pour éviter une dérive parlementariste. Pour cela, ils optèrent pour un régime de type moniste (ce qui signifie, dans le cas de la RFA, que le gouvernement n'est responsable que devant le Bundestag, la chambre basse, par opposition au Bundesrat) dans lequel le Chancelier serait prédominant et le président essentiellement symbolique.
Ainsi, le régime allemand de la RFA a été qualifié de kanzlerdemocratie, expression traduite par la « démocratie du Chancelier ». Cette dénomination souligne la prédominance du Chancelier dans le fonctionnement politique allemand, à tel point que l'on pourrait croire que le régime allemand de kanzlerdemocratie se rapproche d'un régime de type présidentiel dans lequel le président serait remplacé par le Chancelier. De plus, le terme de kanzlerdemocratie est né durant le mandat de Konrad Adenauer (1949-1963) et son utilisation a été remise en cause durant le mandat de certains Chanceliers, ce qui laisse penser que l'effectivité (ou non) de la kanzlerdemocratie ne repose pas seulement sur des règles constitutionnelles mais aussi sur la pratique politique et sur la personnalité du Chancelier.
[...] Ainsi les constituants entendant éviter les situations qui avaient eu lieu sous la République de Weimar dans lesquelles la Diète renversait le Chancelier grâce à des alliances dont le seul motif d'entente était l'opposition au gouvernement sans pour autant réussir à en élire un autre. En réalité, ce pouvoir est quasiment inutile puisque les Chanceliers sont le plus souvent assurés, grâce à la discipline de parti, de la confiance de la majorité de l'assemblée. La motion de censure constructive trouve son utilité lorsqu'une coalition se délite, et que le Chancelier ne se trouve plus soutenu par la majorité de la Diète. [...]
[...] La prépondérance du Chancelier est limitée afin que le régime allemand reste un régime essentiellement démocratique. II) Les limites à la prépondérance du Chancelier II.1) Des pouvoirs limités Le Chancelier ne gouverne pas seul en dirigeant le cabinet (comme, par exemple, le président américain qui concentre dans ses mains tout l'exécutif et s'appuie sur son administration). En effet, comme le prévoit l'article 65 de la loi fondamentale, chaque ministre fédéral dirige son département de façon autonome et sous sa propre responsabilité Ainsi, le Chancelier ne peut ni empiéter s'arroger les compétences d'un des ministres ni entraver leur action (à moins de le révoquer). [...]
[...] I.2) La prépondérance du Chancelier accrue par la personnalisation du pouvoir Le Chancelier est élu par la Diète. Le président propose un Chancelier, mais la Diète (c'est-à-dire le Bundestag) n'a aucune obligation de tenir compte de la proposition du parlement. En réalité, la discipline de parti étant traditionnellement forte en Allemagne, le nom du Chancelier est presque arrêté au moment des élections législatives, puisque voter pour un député revient en réalité à voter pour le candidat à la chancellerie que le député soutient. [...]
[...] De plus, au Bundestag, les partis d'opposition ne sont pas rendus muets. Ils peuvent, par exemple, demander la création de commissions d'enquête (il suffit qu'un quart des députés le demande, comme le précise l'article 44 de la loi fondamentale). La présidence de ces commissions est attribuée de manière proportionnelle (sans quoi le parti majoritaire monopoliserait la présidence de ces commissions). Enfin, tribunal constitutionnel de Karlsruhe a un rôle considérable car une grande partie des lois votées en Allemagne fait l'objet d'un contrôle de constitutionnalité posteriori). [...]
[...] De plus, les pouvoirs du Chancelier (appartenant au pouvoir fédéral) sont évidemment limités par la structure fédérale du régime allemand. En effet, les lois votées par le Bundestag (c'est-à-dire le plus souvent sous l'impulsion ou l'influence du Chancelier ou de son cabinet) doivent souvent être appliqué au niveau des länder, qui peuvent par divers moyens ralentir l'application de la loi. De ce fait, les pouvoirs fédéraux et locaux ont tendance à rechercher un compromis, ce qui limite la prépondérance du Chancelier. [...]
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