Le dernier sommet de l'APEC à HongKong en novembre dernier a été le théâtre d'intenses négociations menées notamment par Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) pour essayer de relancer le cycle de négociations de Doha, qui a débuté en 2001 et a été suspendu en juillet 2006. Pour comprendre cette situation, il faut tout d'abord faire un point historique sur l'évolution de l'OMC, pour savoir dans quel contexte et dans quels buts le cycle de Doha a été initié.
L'Accord général sur les Tarifs douaniers et le Commerce (GATT) fut conclu en 1947 entre 23 pays fondateurs. Il avait pour ambition de lutter contre toutes les formes de protectionnisme qui s'étaient multipliées entre les deux guerres mondiales ou au moins d'instaurer un « protectionnisme mutuellement acceptable » (Kebabdjian), avec pour principale assise la libéralisation des échanges impliquant des principes de lutte contre toutes les formes de discrimination et de concurrence déloyale.
Cet accord international est voulu temporaire, mais donnera naissance 48 ans plus tard à l'issue de l'Uruguay Round (Sommet de Marrakech 1994) à la création de l'Organisation Mondiale du Commerce, véritable institution internationale où décisions sont prises à l'unanimité entre les 150 membres actuels. Sont alors inclus dans la sphère de l'OMC les services (accords GATS : General Agreement on Trade in Services) et la protection de la propriété intellectuelle (ADPIC : Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce). Trois missions principales lui sont attribuées : fonction de veille à la loyauté de la concurrence internationale (abaissement des droits de douane) ; une fonction d' « enceinte pour les négociations entre pays membres au sujet de leur relations commerciales multilatérales», et une fonction d'arbitre des différends éventuels, à travers l'Organe de Règlement des Différents qui possède une procédure précise et peut prendre lui-même des sanctions. Se succèdent les conférences ministérielles de Singapour (décembre 1996), Genève (1998), Seattle (1999). De nombreuses organisations représentant l'opinion publique mondiale y expriment pour la première fois leurs préoccupations face à la concurrence que se livrent les Etats dans le cadre de la mondialisation. Elles dénoncent aussi les inégalités d'accès aux richesses créées par la croissance économique et le développement des échanges internationaux. La grogne des PED (grands oubliés) provoque entre autres facteurs l'échec de la conférence ...
S'ouvre ensuite en 2001 le cycle de Doha, dans un contexte particulier : 2 mois après le 11 septembre et avec l'intégration du géant chinois. Il prévoit de relancer les négociations sur l'accès aux marchés et sur l'incorporation systématique d'un traitement spécial et différencié en faveur des PED pour toutes les négociations. On tente également d'élargir le champ de compétence. Il est baptisé « cycle du développement » et constitue donc un projet ambitieux. Les PED entendent s'y affirmer et y être associés. Mais la difficulté à négocier se décline à Cancùn (2003), HongKong (2005) et Genève (2006) jusqu'à la décision de Pascal Lamy le 24 juillet 2006 de suspendre le cycle de négociation de Doha.
Ainsi, l'échec de Doha marque-t-il l'incapacité des pays à négocier dans le cadre de l'OMC ?
Le cycle de Doha visait à permettre l'affirmation d'une régulation réellement mondiale du commerce. Cela implique une réforme des règles du système commercial multilatéral, à laquelle les pays développés ne sont pas favorables.
[...] Exemple insolite et amusant, mais révélateur du pouvoir de contraindre des pays les plus forts. - Imbroglio juridique des règlementations, avec des échanges plus difficiles notamment pour les pays moins avancés contraints par un plus grand nombre de règles et des coûts pour les entreprises, les plus importantes étant là encore les plus à même de se débrouiller de ces règles. - Risque de gouvernance privée : montée en puissance des acteurs économiques privés qui feraient pression pour écrire leurs règles de la mondialisation. [...]
[...] Après Doha, il faut éviter le vide. C'est-à-dire un retour à la situation d'avant le GATT, un cloisonnement du commerce international. Mais cela implique nécessairement une réforme de l'OMC, pour adapter ses règles aux nouveaux rapports de force économiques du XXIe siècle. A. Eviter le cloisonnement du commerce international La crainte majeure d'un vide des négociations commerciales multilatérales est celle d'un retour à la loi du chacun-pour-soi, via des mesures protectionnistes et des accords bilatéraux préférentiels La crainte d'un retour au protectionnisme C'est le fantôme des années 1930, où le protectionnisme a été désigné comme la cause des troubles des années 1930 et de la Seconde Guerre Mondiale. [...]
[...] La grogne des PED (grands oubliés) provoque entre autres facteurs l'échec de la conférence . S'ouvre ensuite en 2001 le cycle de Doha, dans un contexte particulier : 2 mois après le 11 septembre et avec l'intégration du géant chinois. Il prévoit de relancer les négociations sur l'accès aux marchés et sur l'incorporation systématique d'un traitement spécial et différencié en faveur des PED pour toutes les négociations. On tente également d'élargir le champ de compétence. Il est baptisé cycle du développement et constitue donc un projet ambitieux. [...]
[...] Chiffres alarmants 5 ans plus tard. Responsabilité du Nord : changements minimums sur un médicament en fin de protection ; la déclaration de Doha invitait clairement les pays pauvres à recourir aux licences obligatoires si nécessaire, mais elle n'oblige évidemment pas les Etats à y recourir (garanties inadéquates). Exploitation de cette faille par les USA poussés par les entreprises pharmaceutiques avec la signature d'accords bilatéraux avec des exigences en matière de droit de propriété supérieure (=ADPIC ; responsabilité de l'UE qui profite de la situation (les pays modifient leurs législations pour se conformer aux ADPIC Donc en pratique, utilisation quasi impossible. [...]
[...] Ce phénomène est accru par le rejet des bouleversements induits par la mondialisation sur les structures économiques et sociales. L'introduction d'une dose de protectionnisme viserait à limiter les effets sociaux négatifs liés aux échanges. Mais cet argument est contestable au vu de l'histoire économique : l'augmentation des tarifs douaniers n'a pas toujours une grande influence sur le volume et la destination du commerce mondial, du fait de la nécessité d'un certain délai pour réorganiser la division internationale du travail et les flux d'échanges (cf. [...]
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