La France traverse depuis quelques années une crise de légitimité de sa représentation politique. Chaque nouvelle élection est caractérisée par un fort taux d'abstention et les médias, notamment à travers les sondages, appuient ce constat. Une part importante de la population est désormais sceptique face aux déclarations des candidats qui – trop souvent – une fois élus, donnent l'impression de ne plus être à l'écoute de leurs concitoyens. La persistance d'un niveau de chômage élevé, malgré les engagements successifs de tous les gouvernements de le réduire, est sans doute l'un des facteurs explicatifs.
C'est dans ce contexte que s'est développée la démocratie participative, qui propose de redonner la parole aux citoyens, afin qu'ils apportent leur contribution aux décisions publiques. Le développement de cette pratique fut assuré par une série de lois, et relayé aujourd'hui dans l'opinion par plusieurs personnalités politiques. Les citoyens ont alors l'opportunité d'exprimer leurs doutes et leurs attentes sur la politique menée par une collectivité, et de participer à l'élaboration de projets concrets. Ils peuvent ainsi retrouver le goût de la Res publica.
De nombreux articles et ouvrages portant sur la démocratie participative font référence à l'intérêt général. C'est une notion que nous avons préféré écarter pour la rédaction de cette étude pour éviter toute confusion. Cela mérite quelques explications.
Au XVIIIe siècle, les philosophes des Lumières ont adopté une définition de la démocratie que l'on pourrait résumer ainsi: la méthode démocratique est la technique institutionnelle de gestation des décisions politiques qui réalise le bien commun en chargeant le peuple lui-même de faire pencher le plateau de la balance en élisant des individus qui se réunissent ensuite pour accomplir sa volonté. En d'autres termes, « le gouvernement du peuple par le peuple ».
Or, le concept de Volonté générale, développé notamment par Jean-Jacques Rousseau dans son ouvrage Du contrat social ne résista pas à l'épreuve de l'expérience.
Une réfutation moderne de cette théorie fut apportée par l'économiste américain Murray Rothbard, qui souligna que si chaque personne voulait ce que veut son gouvernement, il faudrait « admettre que les juifs assassinés par le gouvernement nazi démocratiquement élu n'ont pas été victimes de meurtre, mais se sont en fait suicidés volontairement ; implication grotesque mais pourtant logique, de la doctrine qui prétend que la démocratie établit le consentement . »
Un autre économiste, Joseph Schumpeter, avait déjà discrédité quarante ans auparavant cette définition de la démocratie dans son ouvrage Capitalisme, socialisme et démocratie , pour en proposer une nouvelle qui devait servir de référence.
Par une démarche empirique, Schumpeter démontra qu'il était objectivement impossible que tous les individus s'accordent sur le bien commun, que la volonté générale n'existe pas et même, que le citoyen n'est pas aussi rationnel qu'on le suppose habituellement. Puis, après avoir détruit chacun des piliers de la doctrine classique de la démocratie, il proposa sa propre définition de ce qu'il préfère appeler la méthode démocratique : « la méthode démocratique est le système institutionnel aboutissant à des décisions politiques, dans lequel les individus acquièrent le pouvoir de statuer sur ces décisions à l'issue d'une lutte concurrentielle portant sur les votes du peuple ».
Le pouvoir du peuple se résume dès lors à celui d'accoucher d'un comité de dirigeants, dont les membres gouvernent indépendamment de toute « volonté générale », et par la seule vertu de leur victoire électorale. Dans la doctrine classique, les élections sont un instrument de la démocratie. Elles ne désignent pas des dirigeants, mais des représentants. Avec Schumpeter, cette relation est inversée : l'élection est la démocratie. Le pouvoir n'est plus délégué ; il est confié.
L'apport de l'économiste autrichien est évident : il ne s'agit plus d'un gouvernement du peuple, mais d'un gouvernement approuvé par le peuple.
Cette distinction est primordiale pour notre étude, puisque la démocratie participative donne aux citoyens l'occasion de s'exprimer entre les échéances électorales, de manifester leur approbation ou leurs préférences, tout au long du processus de décision politique. Ainsi, le temps démocratique n'est plus seulement celui de l'élection, mais se prolonge et survit entre les élections.
Cependant, la mise en œuvre de la démocratie participative n'est pas toujours aisée, et ses applications soulèvent quelques interrogations. Comment un élu peut-il donner la parole aux habitants d'un quartier, et garder par la suite la possibilité d'imposer sa volonté politique sur un projet ? D'autre part, le processus de participation semble s'opposer au celui, plus traditionnel, de la démocratie représentative. Or, le nombre de citoyens impliqués, sur une base de volontariat, ne saurait remettre en cause la légitimité du vote démocratique. Quelle est alors la légitimité de ces instances qui souffrent d'un défaut de représentativité ?
Nous avons tenté de répondre à ces questions dans notre étude. Conduite à partir d'un ensemble documentaire et d'interviews avec différents acteurs de la démocratie participative, elle n'a cependant pas un caractère exhaustif. Nous espérons toutefois qu'elle contribue à orienter le lecteur, désireux d'en savoir plus sur ce type de démocratie qui joue, et jouera encore dans les prochaines années, un rôle majeur dans la vie des collectivités locales.
[...] BIBLIOGRAPHIE Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social chap du livre IV. La volonté générale est toujours constante, inaliénable et pure Murray Rothbard, L'éthique de la liberté éditions Les Belles Lettres. Joseph Allois Schumpeter, Capitalisme, socialisme et démocratie éditions Payot. www.assemblee-nationale.fr www.senat.fr www.wikipedia.fr www.democratie-particive.fr www.monde-diplomatique.fr Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social chp 1 du livre IV. La volonté générale est toujours constante, inaliénable et pure Murray Rothbard, L'éthique de la liberté éditions Les Belles Lettres, p 217. Joseph Allois Schumpeter, Capitalisme, socialisme et démocratie éditions Payot. Op cit. [...]
[...] L'application de la démocratie participative en Île-de-France Sommaire Introduction I. Veille juridique II. Recommandations Constat Outils et orientations Le contexte de la concertation Le pilotage de la concertation Développer une stratégie de concertation Les actions pour concerter et consulter La France traverse depuis quelques années une crise de légitimité de sa représentation politique. Chaque nouvelle élection est caractérisée par un fort taux d'abstention et les médias, notamment à travers les sondages, appuient ce constat. Une part importante de la population est désormais sceptique face aux déclarations des candidats qui trop souvent une fois élus, donnent l'impression de ne plus être à l'écoute de leurs concitoyens. [...]
[...] Puis, après avoir détruit chacun des piliers de la doctrine classique de la démocratie, il proposa sa propre définition de ce qu'il préfère appeler la méthode démocratique : la méthode démocratique est le système institutionnel aboutissant à des décisions politiques, dans lequel les individus acquièrent le pouvoir de statuer sur ces décisions à l'issue d'une lutte concurrentielle portant sur les votes du peuple[4] Le pouvoir du peuple se résume dès lors à celui d'accoucher d'un comité de dirigeants, dont les membres gouvernent indépendamment de toute volonté générale et par la seule vertu de leur victoire électorale. Dans la doctrine classique, les élections sont un instrument de la démocratie. Elles ne désignent pas des dirigeants, mais des représentants. Avec Schumpeter, cette relation est inversée : l'élection est la démocratie. Le pouvoir n'est plus délégué ; il est confié. L'apport de l'économiste autrichien est évident : il ne s'agit plus d'un gouvernement du peuple, mais d'un gouvernement approuvé par le peuple. [...]
[...] Ils sont forces de proposition et peuvent ainsi soumettre des vœux au Conseil d'arrondissement, celui-ci prenant la décision de l'accepter ou non et de le redistribuer vers les autorités compétentes, en fonction du domaine d'action en jeu. II Recommandations Constat Il est possible de noter quelques observations : la représentativité La concertation autour du projet d'extension du tramway est représentative de cette question. Les associations ont principalement participé aux réunions publiques. Les associations sont précieuses, indispensables comme médiatrices de la démocratie participative mais elles ne représentent pas toute la population concernée. Les études sociologiques montrent que la vie associative est socialement sélective : surreprésentation des couches populaires, des jeunes et des étrangers. [...]
[...] La ville de Morsang-sur-Orge est la première ville en France à avoir pratiqué réellement le budget participatif. Il est défini dans cinq ateliers citoyens où une centaine d'habitants donnent leur avis sur les dépenses municipales à venir. Ils peuvent du reste faire des propositions de budgets. Un Observatoire des engagements a en l'occurrence été constitué. A Paris, la Mairie du XXe arrondissement a installé dès 1995 sept conseils de quartier dont les périmètres ont été définis en concertation avec les habitants. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture