Pour procéder à l'étude des régimes politiques, on utilisera la méthode de l'idéal type au sens où l'entendait Max Weber. La méthode de l'idéal type entend brosser un tableau de pensée homogène mettant en avant les caractéristiques les plus nettes d'un fait social. Elle permet de construire des hypothèses et est également une construction utopique, dans le sens où stylisant une réalité, elle permet aussi de mesurer l'écart entre le modèle établi et la réalité. Étudier de la sorte les régimes politiques implique la mise en place de catégories.
Jean-Louis Quermone, en 1988, définira le régime politique comme "l'ensemble des éléments d'ordre idéologique, institutionnel et sociologique qui concourent à former le gouvernement d'un pays donné pendant une période déterminée". Cette définition, qui met en avant quatre éléments, le principe de légitimité, la structure institutionnelle, le système de partis, la forme et le rôle de l'Etat, est plus restreinte que celle des systèmes politiques. Les auteurs qui, comme David Easton, étudient les systèmes politiques, considèrent généralement que les régimes politiques constituent un sous-système du système politique.
Si l'on entend utiliser cette définition et aller à la recherche des types idéaux, on peut percevoir l'existence de régimes démocratiques, correspondant aux grandes tendances des démocraties pluralistes. Ces régimes se distinguent des régimes autoritaires ou totalitaires. Si, par contre, on utilise des typologies de type "développementalistes", qui fondent leurs méthodes sur la question de la modernisation des régimes, c'est une autre classification qui apparaît.
Section 1 : Les régimes démocratiques
Le terme "démocratie" est abondamment utilisé cependant, quand il s'agit de le définir, l'opération est plus délicate qu'il n'apparaît. Il s'agit donc d'essayer de préciser les caractéristiques des régimes démocratiques ainsi que de tenter d'élaborer une typologie de ces régimes. La confrontation de cette présentation idéale avec la réalité nous permettra de mettre à jour les frustrations des démocraties modernes.
§.1 : Les caractéristiques des régimes démocratiques.
Un certain nombre d'invariants caractérisent les régimes démocratiques : des élections compétitives et libres, un pluralisme politique, la garantie des libertés individuelles et des libertés fondamentales. Cependant, une fois posées ses données, les définitions peuvent être multiples en fonction de l'angle d'approche, ce qui accroît les difficultés à déterminer l'objet que l'on entend traiter (...)
[...] Les conditions d'un gouvernement par le peuple sont difficiles à remplir s'il s'agit d'arrêter collectivement des décisions qui engagent l'avenir d'un groupe, tant pour des raisons techniques que psychologiques. Sur le plan technique, il peut être difficile de rassembler l'ensemble des individus et d'assurer la cohérence des décisions prises. De plus, cela peut déboucher sur un abus de la procédure référendaire qui rend difficile l'adoption d'une décision urgente. Sur le plan psychologique, il faut noter que la majorité des individus ne peuvent ni ne veulent exercer collectivement une telle activité. [...]
[...] Se pose en effet à ce stade le problème de la compatibilité des choix. (Ex. : peut- on augmenter le prix du blé pour satisfaire les producteurs et diminuer le prix du pain pour satisfaire les consommateurs Dans un tel contexte, on s'aperçoit que l'existence des programmes électoraux ne répond pas à tous les espoirs que l'on a mis parfois en eux. Dans la réalité, tout programme politique est déjà le fruit d'un compromis. Daniel Gaxie, dans un ouvrage intitulé cens caché”[12], exprime la division de la société entre des citoyens participants et une majorité d'individus que leur position sociale tient, comme le cens électoral, à l'écart des activités politiques. [...]
[...] Ainsi, le régime démocratique cacherait la domination de l'élite en offrant aux gouvernés un choix illusoire entre les membres d'une même catégorie d'individus relevant de ce que l'on peut qualifier de classe dirigeante ou de classe politique Pareto propose d'ailleurs une définition de l'élite à double entrée. L'élite désignerait ceux qui sont les meilleurs dans leur domaine d'activité, par opposition aux individus moyens. C'est ici la notion d'excellence qui est privilégiée. L'élite désignerait également les membres d'un groupe minoritaire occupant une place supérieure dans la société du fait de leur naissance, de leurs mérites, de leur culture ou de leur richesse. [...]
[...] Cette classification a ses limites. Dans un souci de faire apparaître des catégories, elle donne une vision stylisée de certains pays : le régime parlementaire et la Grande-Bretagne, le régime présidentiel et les Etats- Unis, le régime mixte et la France d'après 1958. Elle prétend à la pureté de la classification et juge tous les autres modèles par rapport à l'original. Ils seraient alors des déviations de modèles supposés purs.Le risque est de développer une démarche occidentalo-centrée. Ainsi, en Amérique latine et en Afrique, on aurait des présidentialismes, formes dégénérées du régime présidentiel. [...]
[...] Field et J. Highley, Elitism, Routledge and Keegan Paul ; G. L. Field, J. Highley et M. Burton, A New Elite Framework for Political Sociology, in Revue européenne des sciences sociales, vol. XXVIII, Daniel Gaxie, Le cens caché, Paris, Le Seuil José Ortega y Grasset, La révolte des masses, Paris, Gallimard Jean Baudrillard, A l'ombre des majorités silencieuses, Paris, Denoël-Gonthier Herbert Marcuse, Eros et civilisation, Paris, Editions de Minuit ; L'homme unidimensionnel, Paris, Editions de Minuit Jürgen Habermas, L'espace public, Paris, Payot Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif rééd. [...]
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