La vie d'un État démocratique est essentiellement rythmée par la convocation régulière des électeurs, qui doivent choisir parmi des candidats et les idées qu'ils défendent. En dehors des périodes « normales » d'élections et de phénomènes difficilement prévisibles, tels que le départ anticipé d'un élu ou la dissolution d'une assemblée, il est possible de mettre aux voix des propositions de lois, le plus souvent sous forme de questions directes, n'admettant pour réponses que « oui » ou « non » : c'est la technique du référendum, au sens large du terme.
Si la pratique du « référendum local » est encore embryonnaire en France - il a été adopté à l'occasion de la révision constitutionnelle de 2003, elle est depuis longtemps mise en oeuvre chez deux de ses plus importants partenaires économiques et politiques, à savoir les États-Unis d'Amérique et l'Allemagne. La structure de l'État y est certainement pour beaucoup, l'Histoire aussi : alors qu'en France, la culture de l'État centralisateur est encore très présente, il en va très différemment aux États-Unis et en Allemagne, qui sont habituellement étudiés comme des modèles de l'État fédéral, où le référendum à l'échelle nationale n'existe pas. Aux États-Unis, il faut remonter à la méfiance originelle des Founding Fathers américains, notamment Alexander Hamilton, qui voyait le peuple d'un mauvais oeil - « il est rare [que le peuple] vise juste ou fasse le bon choix » - pour expliquer le rejet de la démocratie directe à l'échelle nationale ; en Allemagne, la proximité du traumatisme nazi et l'adoption de la Loi fondamentale en 1949 expliquent que celle-ci ne fasse aucune référence à un référendum national - à l'exception de l'article 29 relatif à la restructuration du territoire fédéral - cette pratique sous la République de Weimar puis le régime national-socialiste ayant été détournée à des fins plébiscitaires (...)
[...] Afin de mieux appréhender la technique de la consultation populaire dans ces deux pays, l'étude se focalisera dans un premier temps sur les points de convergence entre les techniques de ces deux États, l'analyse des différences fondamentales étant réservée à une seconde partie. La consultation locale du peuple allemand et américain représente en effet un véritable canon de la démocratie directe moderne mais canon à portée limitée, aussi bien dans sa répartition géographique que dans ses domaines (II). I Une pratique populaire, diversifiée, sous le contrôle des juges Comme affirmé précédemment, l'Allemagne et les États-Unis ne connaissent pas le référendum national. [...]
[...] En 1980, le Massachusetts adopte une disposition similaire, appelée Proposition 2 : les impôts sur la propriété ne peuvent excéder de la valeur de cette propriété, et l'augmentation annuelle de ces impôts ne peut dépasser 2,5%. Il est assez remarquable que le référendum en matière fiscale ne soit pas autorisé dans ces deux états fédérés, surtout en Californie, où les lois sur les recettes fiscales ne peuvent être soumises à référendum. Cette interdiction est contrebalancée par la possibilité qu'a le corps électoral d'employer l'initiative populaire. Ce panorama des consultations populaires n'est ici pas exhaustif. [...]
[...] Par opposition au référendum obligatoire, le référendum facultatif, le plus souvent réservé aux lois ordinaires[18], est employé en opportunité ou en absolue nécessité. Il permet au législateur de transférer la responsabilité du vote au souverain, que ce soit en cas de désaccord aux parlements i.e. absence de quorum pour l'adoption de la loi, voire rejet de la proposition[19] ou de révisions constitutionnelles ne nécessitant pas la procédure référendaire obligatoire[20]. Cependant, les conséquences ne sont pas les mêmes en Allemagne et aux États-Unis : si aux États-Unis, il n'est pas fait état de démission obligatoire du Gouverneur en cas de rejet par le peuple d'un projet soumis à référendum, il en va autrement en Allemagne, plus spécifiquement en Rhénanie du Nord-Westphalie, où le gouvernement doit quitter ses fonctions.[21] La troisième forme de référendum est le référendum consultatif. [...]
[...] Toute proposition soumise à votation populaire doit également s'en tenir à un sujet unique. On évite ainsi ce que l'on appelle le logrolling, qui consiste à créer un texte fourre-tout dont certaines matières n'auraient, seules, jamais recueilli la majorité des suffrages. Force est cependant de constater que cette exigence est reléguée au rang du symbole : au plan pratique, il est rare et difficile de limiter une proposition à une unique idée, car elle entraîne forcément des conséquences dans d'autres matières, conséquences qu'il est utile de mentionner dans la proposition. [...]
[...] De plus, et c'est surtout le cas de l'initiative directe, l'initiative populaire permet de s'affranchir de procédures lourdes et consommatrices de temps, voire de débats inutiles ou peu productifs. À l'échelon des états fédérés, la technique de l'initiative est plus ou moins employée : en 2007, en Allemagne, seules vingt-deux initiatives[23] ont été lancées, tandis qu'aux États-Unis, ce ne sont pas moins de 2236[24] propositions qui ont été initiées par le peuple. La participation directe du peuple au processus décisionnel implique nécessairement le respect de formalités inhérentes à tout État de droit : le juge, selon les textes, joue un rôle capital dans le processus d'initiative B Le rôle formellement capital du juge local dans la consultation directe du peuple La structure de l'État fédéral oblige à respecter plusieurs conditions de fond et de forme, du fait de sa dualité constitutionnelle. [...]
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