Les néo-machiaviéliens

Résumé du document

Le courant néo-machiavélien, né en Italie à la fin du XIXe siècle, connut son apogée à la fin de la Première Guerre Mondiale, principalement en Italie. La pensée néo-machiavélienne s'inscrit dans un contexte de crise du parlementarisme et de la représentation politique, alors que la péninsule italienne parachève son unité. Dans leur filiation à la pensée de l'auteur du Prince (1469-1527), qui se posait la question de comment conquérir, exercer et conserver le pouvoir, les néo-machiavéliens soutiennent la thèse de l'autonomie du politique. L'analyse du pouvoir politique, à laquelle les néo-machiavéliens se livrent, révèle parfois le cynisme (l'appétit de la domination) dont Machiavel avait fait preuve, hors du champ de la morale. Ce courant sociologique s'est intéressé à l'appropriation permanente du pouvoir par une élite. Il est cependant distinct du marxisme, qui fait le lien politique/économie.

Extraits

[...] Cette lutte incessante, parce qu'elle assure la mobilité ascendante des meilleurs, mais aussi la circulation des idées, contribue d'une part à l'équilibre de la société, et d'autre part au changement social. Parfois, les élites anciennes monopolisent abusivement le pouvoir et les jeunes élites ne peuvent y accéder : l'Etat est paralysé, et la pression engendrée peut déclencher une révolution et un remplacement d'une élite par une autre. Cet usage de la force s'avérera utile, prétend Pareto : elle contribuerait à la stabilité. [...]

[...] Son travail porte sur l'accès à l'élite, qu'il relie à l'origine sociale et au phénomène de reproduction (il parle de noblesse d'Etat Michel Crozier et la sociologie des organisations, en lien avec le poids de la bureaucratie Ces contributions tentent de pallier les insuffisances de la théorie néo- machiavélienne, qui ne distingue finalement pas les types de régime, qui entend une conception étroite de la démocratie, et qui évacue des questions fondamentales (la délégation de souveraineté est-elle systématiquement synonyme d'oligarchie ? par exemple). Surtout, la théorie néo- machiavélienne s'inscrit fortement dans un contexte précis et souffre d'un cruel manque de généralisation empirique. [...]

[...] Au mieux, c'est une compétition entre des organisations oligarchiques. Le gouvernement par la majorité n'est que mystification. Quel que soit le mode de recrutement des gouvernants (en cela, le suffrage universel est un leurre), quel que soit le fonctionnement, en théorie ou en pratique, de l'Etat, tout régime politique serait condamné à la dichotomie minorité dirigeante/majorité dirigée. Les formules changent, c'est-à-dire les idées ou principes au nom desquels les minorités règnent, mais le fait oligarchique, que Platon considérait comme l'une des quatre maladies qui peuvent affecter l'Etat, demeure. [...]

[...] Pour Michels, toute organisation tend nécessairement à l'oligarchie. On retrouve, dans l'analyse de Michels, le clivage minorité dirigeante/majorité dirigée. Michels transpose cette analyse aux partis politiques, et souligne combien la souveraineté des masses est illusoire. La direction des partis et des syndicats a tendance à se concentrer, pour des raisons d'efficacité, entre les mains d'une minorité qui fait prédominer ses intérêts personnels au détriment des principes démocratiques proclamés par ces organisations, menant à une séparation téléologique de la classe qu'elle est censée représenter. [...]

[...] Michels rattache la sociologie politique à une théorie générale des organisations. Comme les organisations requièrent une spécialisation des fonctions et presque une professionnalisation la domination de la minorité sur la masse se renforce. L'oligarchie des dirigeants repose sur leur tendance d'une part à se perpétuer et à renforcer leur autorité, d'autre part sur l'inertie des masses, promptes à s'en remettre à une minorité de spécialistes de l'action publique (conférant une assise psychologique aux chefs) ; Michels considère en effet les masses comme atomisées, immatures et apathiques. [...]